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Bernard Bajolet, un nouveau patron de la DGSE très diplomate

Le nouveau directeur général de l'espionnage français a beaucoup travaillé à la libération des otages dans le passé. Portrait.

Article rédigé par Hervé Brusini
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Bernard Bajolet, nommé directeur général de la DGSE le 10 avril 2013. (DGSE)

Pour une fois, un patron de service secret est un personnage connu, et tout spécialement des professionnels de l'info. Pas étonnant, puisque Bernard Bajolet, nommé mercredi 10 avril à la tête de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) - l'espionnage français -, a souvent contribué à libérer des journalistes pris en otage. En Irak ou en Afghanistan, ils sont plusieurs (Christian Chesnot, Georges Malbrunot, Florence Aubenas, Hervé Ghesquière) à lui être redevables.

Voilà donc un homme de l'ombre qui ne redoute ni les micros, ni les caméras. Car souvent, il s'est expliqué sur ses missions, allant jusqu'à confier, dans le film de Laurent Portes Otages en Irak, contre-enquête sur leur libération : "Le maître espion Philippe Rondot est un ami, mais je ne lui disais rien. Même s'il voulait jouer un rôle." Il peut être comme cela, Bernard Bajolet. A chacune de ses interventions, on peut observer un homme élégant, mais qui peut décocher le trait d'esprit subreptice, sourire en coin.

Un diplomate fin connaisseur du monde musulman

A 63 ans, Bernard Bajolet est un énarque rompu à l'exercice de la diplomatie. Il est polyglotte, a été en poste à Damas, Amman, Sarajevo, Alger, Bagdad, Kaboul. Comme l'écrit Jacques Massey, spécialiste des services de sécurité, sur le site Intelligence Online (lien payant), le passé de ce haut fonctionnaire est éloquent : "Il a depuis longtemps un pied dans la communauté française du renseignement. Coordinateur interministériel sur l'Algérie en 1991, il a collaboré avec la DGSE en Bosnie de 1999 à 2003... Coordinateur national du renseignement de 2008 à 2011 sous l'ère Sarkozy..."

"C'est sûr qu'il connaît parfaitement la musique", expliquent certains parmi les plus aguerris du monde de l'espionnage. Mais ils ajoutent aussitôt : "Même s'il est expérimenté et compétent, il reste que c'est un diplomate, qu'à ses côtés, ses directeurs du renseignement et de la stratégie sont aussi des diplomates. Alors on peut s'interroger : la DGSE doit-elle rester dans le giron de la Défense ou être rattachée directement au Premier ministre ?"

Un homme de terrain

De fait, Bernard Bajolet ne manque pas de relais politiques. Il a fait partie du dispositif mis en place par l'ancien pouvoir, tout en étant l'ami de l'actuel président de la République. L'histoire veut qu'en 1978, quand François Hollande débute son stage d'énarque à Alger, son chaperon est précisément Bernard Bajolet.

De quoi sceller des rapports de confiance. Cet ambassadeur des zones difficiles a donc souvent eu des airs d'agent très spécial. Sur le terrain, on le voit avec un gilet pare-balles et l'arme jamais très loin. En août 2004, c'est lui qui prend l'initiative inédite de correspondre par mail - et en arabe - avec ceux qui détiennent le tandem Chesnot-Malbrunot. Bernard Bajolet est alors particulièrement inquiet. Les ravisseurs viennent d'exécuter un journaliste italien. Le diplomate est prévenu par une source qui lui confie : "Les deux Peugeot vont bien [comprendre les journalistes français], mais la Fiat va casser", selon les propres termes rapportés par Bernard Bajolet.

"Il n'a pas le côté quai d'Orsay coincé"

Quant à Hervé Ghesquière, il rencontre le futur chef de la DGSE le 29 juin 2011, alors qu'il vient tout juste d'être libéré. "Il s'est occupé de notre dossier les six derniers mois de notre détention, dit l'ancien otage détenu en Afghanistan. Lorsqu'il nous a reçus, nous avons parlé de la Syrie. Et c'était très bien, cela nous vidait la tête de ce que nous avions vécu et la remplissait par un incroyable savoir sur la situation à Damas. Sa grande compétence s'accompagnait d'un vrai souci pédagogique. Il ne faisait pas vraiment ambassadeur, pas le côté quai d'Orsay coincé. Un homme serein, et en même temps très concentré." 

Nul doute qu'il faudra l'être. Bernard Bajolet a devant lui la redoutable question des otages - à nouveau, mais cette fois autrement plus massive, ils sont seize -, une guerre au Mali et ses conséquences terroristes, et toute la panoplie des agressions habituelles que peut subir la France. Un vrai travail d'homme de l'ombre, dans la lumière d'un monde en fureur.

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