Dix métiers méconnus qui ont de l'avenir
Suite de notre série en trois volets sur les grandes tendances du monde du travail. Aujourd'hui, zoom sur de nouvelles activités, parfois un brin futuristes.
Vous n'en avez peut-être jamais entendu parler, et pourtant, ces métiers pourraient devenir banals dans quelques années. Inventaire à la Prévert de dix professions émergentes, choisies parce qu'elles préfigurent des tendances d'avenir, dans la santé, l'alimentation, l'énergie, les loisirs ou le mieux-être.
1Ingénieur en nanotechnologies
"La nanotechnologie, c'est la science du petit. Pour vous donner un exemple : 2 000 à 3 000 nanoparticules représentent le diamètre d'un cheveu. Ce sont des tout petits objets, qu'on fabrique pour qu'ils aient des fonctions physiques : ils peuvent être magnétiques, luminescents, etc. Et on en fait des applications dans tous les domaines", explique Laurent Levy, patron de Nanobiotix, entreprise spécialisée en nanomédecine.
Et de donner un exemple : "On développe un produit qui est injecté pour détruire les cellules cancéreuses. Il absorbe les rayons X et en délivre une dose beaucoup plus importante. Ça augmente l'efficacité de la radiothérapie pour éliminer ces cellules."
Laurent Levy juge qu'il y aura à l'avenir un besoin croissant d'ingénieurs en nanomédecine, technique qui enregistre déjà ses premiers succès, selon le magazine Futura-Sciences. Sa société emploie une trentaine de personnes, dont vingt-cinq ingénieurs ou doctorants dédiés au développement. Plus d'explications sur la nanomédecine dans ce sujet de France Bleu :
2Eleveur d'insectes comestibles
"Encore peu répandu - ça se compte en unités pour l'instant -, le métier de technicien d’élevage d’insectes comestibles réclame des connaissances en entomologie et en traçabilité agroalimentaire", estime Cédric Auriol, fondateur de la société Micronutris, qui espère lancer le marché avant que les géants du secteur ne s'en mêlent.
Il définit ainsi la mission de cet éleveur d'un nouveau genre : "Permettre aux grillons et aux vers de farine de grandir correctement : nettoyage et récolte des pondoirs, préparation des unités de croissance… Sur 650 m2, on produit une dizaine de tonnes d’insectes par an."
Au fait, qui sont les acheteurs ? 1) Ceux qui aiment le ludique 2) ceux qui ont déjà mangé des insectes à l’étranger 3) ceux qui cherchent une nourriture "saine", répond Cédric Auriol. En gros, la clientèle du bio et celle qui fuit les protéines classiques, effrayée par les crises alimentaires. A quand le scandale de la sauterelle folle ?
3Responsable d'association de patients
"Ce métier récent est né après l’épidémie de sida, rappelle Emmanuelle Garassino, directrice adjointe des affaires sociales, industrielles et de la formation du LEEM (Les entreprises du médicament). Des patients jeunes, informés, se sont organisés pour réclamer des améliorations de leur traitement." En témoigne cette action d'Act Up devant le ministère de la Santé, le 19 mai 2010.
"Il a alors fallu créer dans les entreprises du médicament des postes d’interlocuteurs chargés de dialoguer avec les associations de patients, poursuit-elle. Leur rôle est d'être à l’écoute des problématiques pour faire avancer le médicament, d’autant plus qu’avec Internet, un patient est beaucoup plus exigeant qu’il y a vingt ans."
Un poste - il en existerait une centaine en France - confié le plus souvent à des médecins expérimentés, même s'il arrive qu'une entreprise recrute… directement chez une association de patients.
4Itéiste
La Fédération française du bâtiment préfère parler d'évolution plutôt que de nouveau métier proprement dit. Ainsi, l’itéiste est au départ un peintre ou un plaquiste. Son rôle : améliorer l’isolation thermique par l’extérieur, en rajoutant une nouvelle couche de matériau, une plaque d’isolant.
Un métier d'avenir, comme ceux de la filière photovoltaïque, surtout si les prix de l'énergie continuent de s'envoler. Pour l'ONG négaWatt, une transition énergétique bien menée créerait de 220 000 à 330 000 emplois en 2020 et de 570 000 à 820 000 en 2030, rapportent Les Echos.
5Manager du développement durable
Lorsqu'il évoque les professions du management durable, François Petit, directeur de l'Institut de la responsabilité sociétale et de l'innovation à Sup de Co La Rochelle, est intarissable.
"Notre école forme cinquante masters par an dans le développement durable et dans le management de l'environnement, s'enflamme-t-il. En moyenne, 80% des étudiants trouvent un emploi dans les six mois."
Pourquoi ? Parce qu'il y a "une pluie de réglementations dans ce domaine-là, comme le bilan carbone", obligatoire depuis fin 2012 pour les entreprises de plus de 500 salariés et les collectivités territoriales d'une certaine taille. Parce qu'il y a, aussi, "une pression des consommateurs et de certains marchés, comme les pays scandinaves, qui pousse à 'verdir' la production".
"Mais on sait moins que le management du développement durable englobe la responsabilité sociétale, telle que définie par la norme internationale ISO 26000", poursuit-il. Une notion très large puisqu'"elle comprend le respect des droits de l'homme, la loyauté dans la pratique des affaires, la lutte contre la corruption, le souci de l'ancrage territorial, donc de l'emploi local, ou la relation avec le consommateur... La lutte contre l'obésité par exemple, en fait partie, pour les industries agroalimentaires." Autant dire que son application requiert des cadres ultraformés.
6Ecoconcepteur
Autre métier "vert", l'écoconcepteur, qui imagine des produits ayant un impact minimal sur l'environnement : matériaux écologiques, fabrication économe en ressources et en énergie, possibilité de recyclage en fin de vie…
François Petit donne un exemple dans l'aéronautique : "A Air France Industries, le prochain siège de l'A320 sera entièrement écoconçu." Mais l'écoconception dépasse le cadre des produits matériels : "Même un service bancaire peut être écoconçu, notamment s'il n'est pas trop blanchi, si vous voyez ce que je veux dire", plaisante-t-il, en pleine affaire Cahuzac.
Seule limite à ce type de nouvelles formations, qu'il s'agisse de manager en développement durable ou d'écoconcepteur : "Ce sont des métiers émergents, donc le recrutement se fait surtout, pour l'instant, dans les grandes entreprises ou dans des ONG comme WWF qui ont besoin de se professionnaliser." Mais François Petit note aussi, optimiste, que le souci de l'environnement, qui "appartenait hier au registre des vœux pieux, est aujourd'hui devenu opérationnel".
7Art-thérapeute
En quoi consiste l'art-thérapie ? "En un accompagnement dans un processus de création, qui permet d'aller vers un mieux-être", expose Patrick Laurin, artiste-peintre et formateur en art-thérapie à l'Inecat, l'Institut national d'expression, de création, d'art et transformation.
"J'accompagne essentiellement des personnes atteintes d'Alzheimer, poursuit-il. L'idée est de s'adresser à la personne, non aux symptômes. Car ce qui soigne, ce n'est pas l'art, c'est l'accompagnement dans le processus de création, parfois en l'absence de toute parole. On peut exercer en institution, en libéral, chez soi."
Un témoignage sur les pouvoirs de l'art-thérapie ? "Cette personne atteinte d'Alzheimer, raconte Patrick Laurin, qui, en franchissant le seuil de l'atelier, était incapable de témoigner de sa présence. Sa fille me salue et me dit : 'ah, c'est vous le peintre !' Et la mère répond : 'non, c'est moi le peintre !' Elle s'est revendiquée comme auteure : quelque chose d'elle comme sujet a pu émerger."
Ce qui marche avec la peinture fonctionne aussi avec la musique, comme le montre la guitariste en photo ci-dessous.
8Scénariste
Dans un monde d'images, l'avenir appartient à ceux qui savent raconter des histoires. Fans de Mad Men et autres séries anglo-saxonnes, si cette voie vous tente, l'élitiste Conservatoire européen d'écriture audiovisuelle, basé à Paris, forme chaque année douze personnes triées sur le volet à écrire les Game of Thrones de demain. Le concours est sélectif, avec plus de 250 postulants sur la ligne de départ.
"On est les seuls à délivrer un titre professionnel de scénariste, avec une formation dédiée", insiste Marie-Laure Lotti, chargée de la coordination générale au Conservatoire. Esprits imaginatifs, à vos claviers !
9Socio-esthéticien
Un métier neuf ? "Pas vraiment", s'insurge Marie-Claude Jonquoy-Michalon, attachée de presse du Codes (Cours d'esthétique à option humanitaire et sociale), qui l'a inventé il y a trente-cinq ans et a déjà formé plus d'un millier de professionnels.
Mais aujourd'hui, la formation, désormais reconnue par l'Etat, fait florès, et "plusieurs écoles se mettent à former des esthéticiens sur cette problématique", poursuit-elle. Et la demande va croître avec la crise puisque le socio-esthéticien intervient en milieu fragilisé, dans les prisons, auprès des personnes âgées, en recherche d'emploi ou, comme ci-dessous, à l'hôpital. "Médecins et psychologues sont témoins du mieux-être des malades ou personnes fragilisées", assure Marie-Claude Jonquoy-Michalon.
10Comportementaliste-médiateur pour animaux de compagnie
"La France, championne du monde des animaux domestiques", titrait en 2011 Le Figaro. C'est aussi un gros marché : les Français ont dépensé 4,5 milliards d'euros en 2011 pour leurs 61 millions de chiens, chats et autres canaris.
Dernière-née des spécialisations reconnues par l'Etat dans ce secteur, la formation de "comportementaliste-médiateur pour animaux de compagnie" délivrée par l'Eapac (éthologie appliquée pour animaux de compagnie). La première promotion verra le jour en 2013.
A quoi ça sert ? Quand la relation maître-animal déraille, le comportementaliste-médiateur appelé à la rescousse intervient. Et s'intéresse souvent à l'être humain pour l'aider à "lâcher ses comportements inadaptés", précise Alix Reynaud, cofondatrice de l'Eapac.
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