Le congé maternité va-t-il être réduit par les ordonnances modifiant le Code du travail ?
Si le gouvernement s'en défend, la réforme du Code du travail pourra bien entraîner une réduction du congé maternité dans certains cas.
Quel sera l'impact des ordonnances modifiant le Code du travail sur le congé maternité ? "[Il] reste tel quel pour les femmes salariées dans le Code du travail. La durée ne varie pas, l'indemnisation ne varie pas", assure Marlène Schiappa, secrétaire d'Etat chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes, invitée de France Inter, lundi 25 septembre.
Marlène Schiappa n'a pas tort. C'est bien le Code du travail, donc la loi, qui définit le congé maternité des salariées du privé : une femme enceinte a droit à six semaines avant la date présumée de l'accouchement et dix semaines après la naissance du bébé. Pendant cette période, elle est rémunérée par la Sécurité sociale mais elle ne touche pas 100% de son salaire net.
L'accord d'entreprise primera dans certains cas
Toutefois, certaines branches professionnelles (le secteur bancaire ou les mutuelles, par exemple) accordent un allongement du congé maternité ou une prise en charge de la différence de salaire. Et c'est là que les ordonnances peuvent changer la donne, comme l'explique Libération. Car les accords d'entreprise pourront dorénavant primer sur les accords de branche.
Deux scénarios seront possibles. Premier cas : la convention collective (c'est-à-dire l'accord négocié au niveau de la branche) prévoit un recours à un organisme de prévoyance pour compléter l’indemnisation accordée par la Sécurité sociale. Dans cette situation, un accord d'entreprise ne pourra pas remettre en question les dispositions plus avantageuses de la branche.
Deuxième cas : si l'employeur prend en charge directement cette indemnisation (sans passer par un organisme de prévoyance), la durée du congé maternité et les indemnités complémentaires pourront désormais être fixées par un accord d'entreprise. Par exemple, une entreprise qui accorde 20 semaines de congé maternité pourra, si elle obtient l'accord de ses salariés, réduire cette durée au minimum légal (16 semaines) ou à 17, 18, 19 semaines…
Dans les PME, les salariés "n'auront pas le choix"
"C'est ubuesque d'imaginer que les entreprises vont se précipiter pour changer cela", a réagi Marlène Schiappa, interpellée sur cette question. La secrétaire d'Etat a ajouté : "Je fais confiance aux partenaires sociaux pour négocier des accords d'entreprise." Elle sous-entend par là que salariés et employeurs signeront des accords favorables aux droits des premiers.
Dans une tribune intitulée "Les droits des femmes passent (aussi) à la trappe", plusieurs personnalités et organisations féministes dénoncent au contraire un risque de régression. "Quand un droit est négocié entreprise par entreprise, il est généralement moins favorable que quand il est négocié au niveau des branches", affirme à franceinfo Caroline De Haas, militante féministe et signataire de la tribune. "Dans une petite entreprise, le rapport de force ne se fait pas au profit des salariés", poursuit-elle. Traduction : ces derniers "n'auront pas le choix" de refuser.
Si une entreprise perd un appel d'offres ou ne parvient pas à baisser ses prix, le patron va regarder ses employés et dire : 'Nous ne sommes plus concurrentiels, il faut repasser à 16 semaines de congé maternité. C'est ça ou licencier'.
Caroline De Haasà franceinfo
La militante féministe alerte également sur le risque de dumping social entre les entreprises et de "nivellement par le bas" : "L'intérêt de la branche, c'est que toutes les entreprises ont les mêmes obligations." Et le congé maternité n'est pas le seul concerné : "L'ensemble des droits dits familiaux, qui concernent essentiellement les femmes, pourront faire l'objet d'un accord d'entreprise", regrette Caroline De Haas. C'est par exemple le cas des congés pour enfant malade, qui pourront être rallongés ou raccourcis, dans la limite de ce que prévoit la loi.
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