La justice reconnaît la responsabilité partielle de l'Etat dans la mort d'un militaire tué par Mohamed Merah
Le tribunal administratif de Nîmes a jugé que l'Etat est en partie responsable de la mort du caporal-chef Abel Chennouf, assassiné le 15 mars 2012 à Montauban (Tarn-et-Garonne).
L'Etat est en partie responsable de la mort d'un militaire tué par Mohamed Merah en mars 2012. Dans un jugement rendu mardi 12 juillet, le tribunal administratif de Nîmes (Gard) "juge que la décision de supprimer toute mesure de surveillance de Mohamed Merah, prise à la fin de l'année 2011 (...) est constitutive d'une faute engageant la responsabilité de l'Etat" dans la mort du caporal-chef Abel Chennouf. Il avait été assassiné le 15 mars 2012 à Montauban (Tarn-et-Garonne).
Le tribunal administratif avait été saisi par le père de la victime, Albert Chennouf-Meyer. "Cette faute a compromis les chances d'empêcher l'attentat", précise le tribunal, qui "fixe à un tiers la part de responsabilité de l'Etat". Cette tuerie était la deuxième commise par Merah, après l'assassinat d'un premier militaire et avant celle qui a coûté la vie à quatre personnes, dont trois enfants, dans une école juive de Toulouse.
"Une reconnaissance" pour le père d'Abel Chennouf
Certes, le tribunal reconnaît "la difficulté de la mission de prévention des actions terroristes et de surveillance des individus radicaux incombant aux services de renseignement". Mais il pointe aussi "le profil de Mohamed Merah et (le) caractère hautement suspect de son comportement, établi depuis plusieurs années". "C'est une victoire, se réjouit Me Béatrice Dubreuil, l'avocate d'Albert Chennouf-Meyer, contactée par francetv info. Pour mon client, c'est la reconnaissance que la mort de son fils aurait pu être évitée."
Selon le ministre de l'Intérieur à l'époque des faits, Claude Guéant, entre 2007 et 2012, Mohamed Merah avait "fait l'objet de dizaines d'écoutes téléphoniques (...) de filatures très longues. Il y a eu un abandon du suivi de Merah puis une reprise du suivi à son retour du Pakistan" en novembre 2011. "Personne n'a jamais décelé d'intention criminelle chez lui", avait aussi expliqué Claude Guéant.
A cette époque, Mohamed Merah avait été convoqué dans les locaux de la DGSI. Après cette entrevue, le dispositif de surveillance avait été interrompu, une décision "inadmissible et incompréhensible" selon l'avocate d'Albert Chennouf Meyer qui motive la décision du tribunal y voit "une faute engageant la responsabilité de l’Etat compte tenu notamment du profil de Mohamed Merah et du caractère hautement suspect de son comportement".
L'Etat condamné à verser des indemnisations
La demande d'indemnisation des parents et frère et sœur d'Abdel Chennouf a été rejetée parce qu'ils ont déjà été indemnisés. Mais l'Etat a été condamné à indemniser la veuve et l'enfant du soldat, ainsi que ses beaux-parents et le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme. "Cette décision n'élude pas la responsabilité de Mohamed Merah et de ses complices, qui vont bientôt être jugés, explique Me Béatrice Dubreuil à francetv info. Mais M. Chennouf-Meyer espère que cette affaire va obliger l'Etat à prendre ses responsabilités et à faire que les choses changent au niveau des services de renseignements. Ce dossier a mis en lumière des failles inadmissibles pour les familles des victimes mais aussi pour l'ensemble des citoyens français."
Pour l'heure, le ministère de l'Intérieur n'a pas encore indiqué son intention de faire appel de la décision. Mais s'il ne le fait pas, cette condamnation pourrait faire jurisprudence et conduire d'autres victimes d'actes terroristes d'attaquer à leur tour l'Etat pour sa responsabilité partielle dans ces attaques.
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