13-Novembre : ces commémorations sont importantes "pour marquer le passage du temps"
Arthur Dénouveaux, rescapé du Bataclan et président de l’association de victimes Life for Paris a confié à franceinfo l'importance des commémorations, deux ans après les attentats : "C'est bien de sentir qu'on n'est pas le seul à avoir ces hauts et ces bas".
Une cérémonie d'hommage aux victimes des attentats du 13 novembre 2015 à Paris et à Saint-Denis, qui avaient fait 130 morts, a eu lieu lundi 13 novembre. Le président Emmanuel Macron s'est rendu sur les six lieux des attaques, en compagnie notamment de son épouse, Brigitte Macron, de l'ancien chef de l'Etat François Hollande et de la maire de Paris Anne Hidalgo.
Arthur Dénouveaux est l'un des rescapés du Bataclan. Il est aussi président de l’association de victimes Life for Paris, qui organisait un rassemblement devant la mairie du 11e arrondissement.
franceinfo : comment vivez-vous ces commémorations deux ans plus tard ?
Arthur Dénouveaux : C'est une question compliquée. Il y a un vrai effet de surprise. L'écoulement du temps depuis le 13 novembre 2015 est assez incompréhensible. Je n'ai pas du tout l'impression que ça fait deux ans, c'est beaucoup trop frais dans ma mémoire pour faire deux ans et c'est un sentiment que partagent beaucoup de victimes donc c'est important de le faire, pour marquer le passage du temps. Déjà, il y a un hommage à rendre aux disparus, il faut aussi montrer qu'on est toujours debout, qu'on est toujours tous ensemble et surtout qu'on va s'entraider. C’est beaucoup plus facile de communiquer avec d'autres victimes que de communiquer avec des gens qui ont été extérieurs à tout ça. Donc pour nous, c'est important de se retrouver. Et encore une fois, on veut avoir la certitude de ne pas être oubliés par les autres. La présence de l'Etat est importante à ce titre-là. Je pense que la présence d'Emmanuel Macron montre qu'il y a aussi de l'intime dans ces commémorations et que ce n'est pas uniquement le président de la République qui est venu. Il y aussi une symbolique où le président a voulu associer sa famille et c'est ce que les victimes cherchent : à avoir un cocon familial le plus étendu possible.
Vous êtes président de l'association Life for Paris. À quoi sert-elle ?
À aider les gens à se rassembler, leur montrer qu'ils ne sont pas seuls, que les gens puissent comparer où ils en sont de leur "guérison", le terme n'est pas exact, mais où ils en sont de leur parcours thérapeutique. C'est aussi s'engager sur : "Comment la mémoire va être traitée dans les prochaines années ? Est-ce qu'il va y avoir un mémorial ?" Donc c'est vraiment accompagner les gens pour les libérer au maximum des contraintes qu'il pourrait y avoir. Personne n'avance à la même vitesse d'une semaine sur l'autre, il y a des hauts et des bas, c'est le propre du stress post-traumatique, et je vous épargne évidemment tous les gens qui sont blessés : il y a encore huit personnes qui sont à l'hôpital de jour.
Deux ans après, la vie peut-elle reprendre "normalement" après un tel traumatisme ?
Evidemment les comparaisons sont très difficiles, il y a des moments faciles, des moments difficiles. Ces dernières semaines ont été globalement extrêmement difficiles quand la date approche et c'est bien de sentir qu'on n'est pas le seul à avoir ces hauts et ces bas. Sur les séquelles physiques deux ans plus tard, les études épidémiologiques sur lesquelles de nombreux scientifiques se penchent à l'heure actuelle montrent par exemple une sur-représentation d'accidents cardiaques chez les survivants donc le stress post-traumatique. C'est psychologique mais ça a aussi une influence sur la forme physique des gens. Le stress post-traumatique, c'est plein de choses, par exemple tout à l’heure, on a fait un lâcher de ballons : il y a des ballons qui ont explosé en touchant des arbres, vous auriez vu le nombre de gens qui sursautent parce que ça rappelle le bruit des balles. Et ça, c'est quelque chose qui est ancré dans votre mémoire et c'est extrêmement difficile de s'en départir.
Vous avez choisi d'être l'un des visages des victimes en devenant président de cette association. Pourquoi ?
Faire partie de l'association, égoïstement, ça m'aide à aller mieux. Après, la médiatisation qui va avec, on essaye d'être le maximum de gens à parler. Moi, je fais le mégaphone quand il y a une cérémonie publique mais par ailleurs, l'idée c'est que chaque personne a un vécu différent et on essaye que tous ceux qui le veulent puissent en témoigner.
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