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Les écologistes ont-ils un problème avec l'armée ?

Xavier Cantat, le compagnon de Cécile Duflot, a posté sur Twitter, le 14 juillet, plusieurs messages antimilitaristes. Francetv info s'est intéressé aux positions des écologistes sur les questions de défense.

Article rédigé par Clément Parrot
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Cécile Duflot, alors porte-parole des Verts, et son compagnon Xavier Cantat, le 23 août 2008 à Toulouse (Haute-Garonne). (ERIC CABANIS / AFP)

En quelques messages sur Twitter, Xavier Cantat, le compagnon de la ministre du Logement, Cécile Duflot, a réussi dimanche 14 juillet à créer la polémique. Ce dernier, militant Europe Ecologie-Les Verts (EELV), n'a pas mâché ses mots sur le réseau social : un véritable défilé de tweets où il revendique avec fierté son absence à la cérémonie du 14-Juillet et regrette le temps où la gauche était, selon lui, vraiment antimilitariste.

Les écologistes ont rapidement réagi. Selon Europe 1, Cécile Duflot a fait savoir par son cabinet qu’elle ne se sentait pas engagée par les tweets de son concubin. Jean-Vincent Placé, président du goupe écologiste au Sénat, a de son côté défendu le défilé en rappelant qu'il s'agissait de la commémoration "de l'unité du pays", avant d'affirmer : "Heureusement que dans ce pays on a bien sûr notre armée."

Les messages de Xavier Cantat viennent rappeler une proposition d'Eva Joly qui avait émis l'idée, en juillet 2011, de supprimer le défilé militaire du 14-Juillet pour le remplacer par un défilé citoyen. L'affaire révèle aussi quelques divisions et un certain malaise dans la mouvance écologiste concernant les questions liées à l’armée et à la défense.

Les lignes de fracture entre écolos

Joint par francetv info, Noël Mamère, député EELV de Gironde, divise le courant écologiste entre les purs pacifistes et les pragmatiques, groupe dans lequel il classe François de Rugy, coprésident du groupe EELV à l’Assemblée nationale. Ce dernier, également contacté par francetv info, évoque une frange minoritaire de pacifistes qui refuseront toujours de prendre les armes. Mais le député ajoute qu'à "chaque fois qu'il y a eu débat sur la pertinence d’une intervention militaire, les écologistes ont pris position à une très large majorité pour une intervention", comme au Kosovo en 1999 ou au Mali cette année. Une opération au Mali combattue par Noël Mamère, notait en janvier Le Monde.fr.

Le maintien du défilé du 14-Juillet divise également les écologistes. François de Rugy insiste sur l’héritage de la révolution française, de la construction de la République et de l’unité de la nation. Le député voit aussi dans cette tradition une soumission du pouvoir militaire au pouvoir civil. A l’opposé, Noël Mamère déclare qu’il préfère "un défilé populaire à un défilé de chars". Et de lâcher : "J'aurais préféré ne pas voir de ministre écologiste lors de la cérémonie du 14-Juillet."

Sur la même ligne, le conseiller de Paris Yves Contassot remarque auprès de francetv info que peu de pays démocratiques s'adonnent aux défilés militaires dans le monde. Et ajoute que "l'unité de la nation pourrait plutôt se faire sur des valeurs de solidarité, de vivre-ensemble".

Si les élus écologistes se rejoignent sur la nécessité de réduire le budget de la défense (notamment par la suppression de la composante aérienne dans le dispositif nucléaire) ou sur l'idéal d'une armée européenne, ils s'opposent en revanche sur une sortie totale du nucléaire militaire. C'est un souhait de Noël Mamère et Yves Contassot, qui suivent ainsi la ligne majoritaire du parti. A l'inverse, François de Rugy envisage plutôt un transfert de la dissuasion nucléaire à l'échelon européen. Ce dernier estime aussi que la France peut jouer un rôle ponctuel en Afrique, alors que pour Noël Mamère comme pour Yves Contassot, la France n’a pas à jouer un quelconque rôle de gendarme, en Afrique comme ailleurs.

Un parti de tradition antimilitariste

Pour le politologue Daniel Boy, directeur de recherche au Cevipof et spécialiste de l’écologie politique interrogé par francetv info, il y a toujours eu une "vieille tradition antimilitariste chez les écologistes, même si elle est devenue relativement discrète avec le temps". Il voit par exemple dans l'idée d'une armée européenne, présente dans le programme d'Eva Joly pour 2012, "une traduction polie de cet antimilitarisme historique".

Selon lui, cet antimilitarisme remonte à la lutte du Larzac des années 1970 (un mouvement de désobéissance civile autour de quelques paysans qui protestaient contre l’extension d’un camp militaire). De l'avis des élus EELV interrogés par francetv info, les écologistes ne sont pas antimilitaristes, mais plutôt pacifistes et non violents.

Pour Daniel Boy, l'antimilitarisme des écologistes est devenu une sorte de tabou, un archaïsme. "EELV souhaite s'imposer comme un parti de gouvernement et il a décidé de mettre cette tradition de côté, au second plan, afin de pouvoir nouer des alliances politiques." Mettre en avant des grands idéaux comme cette force de défense européenne "permet aux Verts de se débarrasser des questions de défense avec lesquelles ils sont mal à l'aise", analyse le chercheur. 

De leur côté, les élus EELV reconnaissent l’insuffisance des débats sur les questions de défense dans leur parti, tout en expliquant que ce n’est pas la priorité du moment. Un brin provocateur, Noël Mamère invite François de Rugy, en tant que membre de la commission de la Défense nationale et des forces armées, à organiser des discussions sur ces questions chez les écologistes.

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