"La publication de leur patrimoine par les politiques est une mascarade"
Monique Pinçon-Charlot, sociologue spécialiste de la bourgeoisie, réagit aux déclarations de patrimoine publiées par des élus et ministres, dans la foulée de l'affaire Cahuzac.
Dans la presse, sur leur compte Twitter ou sur leur blog, de plus en plus d'élus et de ministres publient leur déclaration de patrimoine, en gage de transparence, dans la foulée de l'affaire Cahuzac. Une opération de communication et de diversion, juge la sociologue Monique Pinçon-Charlot, auteure avec Michel Pinçon de L'Argent sans foi ni loi (Textuel).
Francetv info : Que vous inspire la publication de leur patrimoine par certains responsables politiques ?
Monique Pinçon-Charlot : C'est une mascarade. Les hommes politiques jouent la transparence individuelle, mais ce n'est pas ce qu'on leur demande. Cette stratégie de communication leur permet de cacher le problème de la responsabilité collective de la classe politique. Ce qu'il faut, c'est un arsenal législatif qui empêche les politiques de s'accaparer le bien commun : une loi d'embargo sur les paradis fiscaux et des moyens pour lutter contre la fraude fiscale.
Certains éléments de ces déclarations vous ont-ils interpellée ?
Quand je lis : "Une Peugeot 5008 de 2012 estimée à 23 000 euros à l’argus" [un élément de la déclaration du député UMP Bruno Le Maire], cela me fait rigoler. Ça n'a aucun intérêt. C'est naïf et populiste. Dans la tempête, ils veulent montrer qu'ils sont simples, modestes, qu'ils font du vélo… Une fois encore, ce n'est pas ce qu'on leur demande. Empêcher les plus riches d'avoir des comptes offshore, le trou noir du capitalisme, me paraît autrement plus important.
Cette démarche n'est-elle pas une avancée vers une plus grande transparence et une meilleure lutte contre la fraude ?
Non. Un des moyens de lutter efficacement contre les fraudes serait d'avoir une assemblée plus représentative de la population française, et plus seulement des personnes issues du même milieu favorisé, en connivence avec les milieux financiers. Pour cela, il faudrait une transformation en profondeur du système électif, avec le vote obligatoire et la limitation du nombre de mandats des élus pour en finir avec les carrières politiques. Avec des députés ouvriers, employés, universitaires, élus pour un temps court, on éviterait les petits arrangements entre amis.
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