Manuel Valls, un ministre populaire qui chatouille le PS
Star des sondages, le ministre de l'Intérieur agace certains parlementaires socialistes. Ils l'accusent d'être trop à droite ou de jouer trop personnel.
POLITIQUE - Il fait la une des journaux, on le soupçonne de vouloir concurrencer son Premier ministre, et il surclasse tous ses collègues dans les enquêtes d'opinion. Dans le hall de l'auditorium de Dijon (Côte-d'Or), qui accueillait mercredi 19 et jeudi 20 septembre les Journées parlementaires socialistes, Manuel Valls a reçu un accueil de star, attirant les journalistes par grappes autour de lui.
Le maire d'Evry détonne par rapport à un François Hollande drapé dans sa posture de président au-dessus de la mêlée et à un Jean-Marc Ayrault plutôt lisse. Il se retrouve donc sous le feu des projecteurs. Une médiatisation dont il feint de s'étonner, mais qu'il entretient. En prenant le contrepied du Premier ministre sur le sujet des récépissés pour les contrôles d'identité, en émettant des doutes sur le droit de vote des étrangers aux élections locales, promesse de François Hollande, Manuel Valls montre qu'il n'a pas grand-chose à craindre des recadrages du couple exécutif.
"S'il fait dans l'angélisme, on court à la catastrophe"
Car Manuel Valls est populaire. "Oui, surtout à droite !" persifle un député, interrogé à Dijon. Le ministre ne supporte pas ce reproche. "Je suis en troisième position chez les sympathisants de gauche, rectifie-t-il devant quelques journalistes, en brandissant une liasse de sondages. Si je convainc la gauche, tant mieux. Cela vous étonne ? Pas moi."
Tôt jeudi matin, le ministre de l'Intérieur a eu droit à un petit traitement de faveur. Comme son collègue du Budget, Jérôme Cahuzac, la veille, il a eu le privilège de s'exprimer à huis clos devant les parlementaires de la majorité. A la sortie, la plupart des élus lui reconnaissent un vrai talent pour démontrer que la gauche est capable de mener une politique de sécurité. "S'il fait dans l'angélisme, on court à la catastrophe. Je me demande parfois si les collègues qui le critiquent ont bien tiré les enseignements des derniers scrutins, avec ce FN si fort", souligne un député bourguignon.
Manuel Valls, en effet, agace. "Un ministre ne peut pas toujours être quelqu'un qui va dans le sens de l'opinion. Si on raisonne comme ça, Mitterrand n'aurait jamais aboli la peine de mort et de Gaulle ne serait peut-être pas parti à Londres !" balance un élu, déçu par ses prises de position sur le droit de vote des étrangers et l'affaire des récépissés.
Instrumentalisé par la droite ?
"Il devrait se souvenir un peu mieux des propositions de campagne de François Hollande. Sur les Roms, par exemple, on a toujours dit : 'Pas d'expulsion sans relogement'", regrette une parlementaire bretonne. Les coups d'œil de Manuel Valls sur sa droite irritent nombre d'élus socialistes. "Il me rappelle Claude Allègre [ministre de Lionel Jospin, puis soutien de Nicolas Sarkozy], critique l'un d'eux. Et puis Alain Bauer [un criminologue controversé] est son ami. Je ne suis pas sûr que ce soit un grand ami du PS."
Manuel Valls est-il de droite ? "C'est l'idée qu'essaie de faire passer l'UMP. La droite a tout intérêt à l'instrumentaliser pour que la gauche lui tombe dessus", remarque une députée francilienne, pour qui la popularité de Manuel Valls tient plutôt à sa fonction : "Il a vraiment l'image-type d'un ministre de l'Intérieur". "On ne peut pas lui faire le reproche d'être populaire à droite, abonde un jeune député entrant à l'Assemblée. De par sa fonction, il incarne l'ordre et l'autorité. Or, il s'agit de valeurs auxquelles sont attachées les électeurs de droite. Cela paraît logique."
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