"Il n'y a pas de sécurité" à Saint-Martin déplorent les habitants face aux pillages
L'État assure que l'ordre et la sécurité sont rétablis sur l'île de Saint-Martin, victime de pillage après le passage de l'ouragan Irma. Sur place, les habitants dénoncent pourtant l'insécurité, malgré la présence des forces de l'ordre.
"Aujourd'hui, l'ordre républicain règne", assurait dimanche 10 septembre Gérard Collomb. Le ministre de l'Intérieur expliquait que la sécurité est rétablie sur l'île de Saint-Martin, après le passage de l'ouragan Irma. "Il n'y a plus les scènes de pillages et les scènes violentes que vous avez connues", affirmait-il lors de sa conférence de presse hier. Pourtant, sur place, la réalité est toute autre : les pillages continuent et les habitants oscillent entre peur et colère.
Des militaires non armés pour assurer la sécurité
"Ils sont encore en train de piller, il faut arrêter ça !", s'insurge un habitant dans une petite zone d'activité, à 200 mètres du bâtiments où s'est installée la sécurité civile. "Il faut qu'il y ait une patrouille qui tourne ici", réclame-t-il. Un pick-up est garé devant un magasin d'équipements électriques éventré. Deux hommes le chargent tranquillement d'une chaise, de trois lampadaires et quelques autres appareils. La scène se déroule sous les yeux de deux militaires en treillis qui pénètrent aussi dans le magasin, visiblement pas pour y rétablir l'ordre. "Vous ne savez pas s'il y a des lampes torches ?", interrogent-ils. Ils sont interpellés par un chef d'entreprise voisin. "Vous n'êtes pas armés ?" "Non", répondent les militaires. "Il y a pourtant un PC de la sécurité civile à 200 mètres et pourtant il n'y a pas de sécurité", déplore-t-il.
On est protégés par des gens qui n'ont pas d'armes, ça m'écoeure
Benjamin Laurent, commerçant sur l'île de Saint-Martinà franceinfo
Il a lui même été victime de pillages, douze heures après le passage d'Irma. La porte de son entrepôt de vins et de spiritueux a été forcée à coup de transpalettes. On lui a notamment dérobé des grands crus, sous ses yeux. "Si tu l'approchais il te mettait un coup de club de golf dans la tête", se souvient-il, photo des malfaiteurs à l'appui.
À quelques mètres de là, un homme se sert en tonneaux dans un autre entrepôt. Il n'a pas le sentiment d'enfreindre la loi. "Ce n'est pas un vol, quand c'est cassé on prend les choses mais quand ce n'est pas abîmé on ne prend rien. Ce n'est pas une bonne chose." De l'autre côté du volet roulant arraché, une femme lui passe quelques cartons : "On prend des oreillers pour être plus à l'aise parce que j'ai une fille de deux ans qui n'a pas de lit et dort par terre", explique-t-elle.
Des affrontements entre habitants et pilleurs
En plus des sinistrés qui comblent leurs besoins et des opportunistes qui se servent, il y a aussi de vrais délinquants qui profitent de la situation. Arnaud habite juste à côté de la galerie commerciale West Indies de Marigot, la principale ville de l'île. Elle abrite des boutiques de luxe sur le front de mer. "Le soir même du passage du cyclone, il y a eu des échanges de tir entre le propriétaire des lieux, qui habite juste au-dessus du centre commercial, et les pilleurs et casseurs qui sont venus, raconte-t-il. Mes enfants et ma femme ont été traumatisés parce qu'on habite à trois mètres." Arnaud est inquiet pour la sécurité de sa famille.
Il faut que les forces de l'ordre arrivent en masse pour sécuriser tout et calmer le jeu
Arnaud, un habitant de Saint-Martinà franceinfo
Les effectifs des forces de l'ordre ont été portés à 2 000 hommes, selon la ministre des Outre-Mer, Annick Girardin. Elle assure que la sécurité est revenue sur le territoire. Le général Jean-Marc Descoux, patron de la gendarmerie locale, tient le même discours. "Sur chaque secteur, on a plusieurs points qui ont vocation à apporter une sécurité de proximité. Notre dispositif est très réactif et nous arrivons à apporter une réponse dans les cinq minutes à tout trouble à l'ordre public, assure-t-il. C'est d'ailleurs pour ça qu'il n'y a pas de trouble grave à l'ordre public depuis les dernières 48 heures et les dernières nuits." Selon le procureur de la Réublique dépêché sur place, une enquête a quand même été ouverte pour des tirs essuyés par les gendarmes samedi soir et moins d'une heure après la conférence du général Descoux, à moins de 500 mètres du PC, un bazar de quartier était à nouveau visité par des pilleurs.
Selon la préfecture de Guadeloupe, "à cela s'ajouteront 30 hommes du GIGN et une quinzaine d'hommes du GIPN pour venir compléter le dispositif".
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