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Blague sur l'Algérie : retour sur la polémique en cinq actes

Après les officiels algériens, des responsables de l'UMP mais aussi du Front de Gauche se sont offusqués de la phrase prononcée par le président. L'Elysée temporise. Retour sur l'affaire en quatre actes.

Article rédigé par franceinfo avec AFP et Reuters
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Le président de la République, François Hollande, à Paris, le 18 décembre 2013. (ALAIN JOCARD / AFP)

D'abord passée inaperçue, la blague de François Hollande au sujet de l'Algérie, prononcée lundi 16 décembre à l'Elysée, à l'occasion d’un dîner avec des responsables du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), fait polémique. Dimanche 22 décembre, les déclarations outrées se sont succédées, tant en Algérie que dans l'Hexagone. Obligeant l'Elysée, qui considère qu'il s'agit "d'une polémique sans fondement" à temporiser. François Hollande "exprime ses sincères regrets pour l'interprétation qui est faite de ses propos", selon un communiqué de l'Elysée.

Acte 1 : La phrase maladroite de François Hollande

Le président français, qui fêtait les 70 ans du Conseil représentatif des institutions juives de France, s'est félicité de la présence dans la salle du ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, de retour d'Algérie. "Il en revient sain et sauf, c'est déjà beaucoup", déclare-t-il dit sur le ton de la plaisanterie.

Gaffe de Hollande sur la visite de Valls en Algérie (FRANCE TELEVISIONS)

Acte 2 : Indignation massive en Algérie

Immédiatement, les déclarations indignées et éditoriaux accusateurs se multiplient de l'autre côté de la Méditerrannée. Pour le ministre algérien des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, "le sens de l'humour peut apporter une valeur ajoutée au sens des responsabilités lorsqu'il s'exprime avec élégance, avec mesure". Mais il est ici "générateur d'une moins-value".

"L'année 2012 s'est terminée avec le succès éclatant de la visite d'Etat du président Hollande en Algérie. L'année 2013, n'est pas encore terminée, et nous ne souhaitons pas la terminer sur une mauvaise note", ajoute-t-il, qualifiant l'épisode "d'incident regrettable".

Le Rassemblement national démocratique, deuxième force politique du parlement algérien, a estimé que ces propos "dénotaient la haine vouée par les Français aux Algériens". Et la porte-parole du parti Nouara Saadia Djaafar d'asséner : "De tels propos, qui n'affectent nullement le peuple algérien (...) attentent par contre aux relations algéro-françaises qui connaissent une nette amélioration ces dernières années."

Enfin, le quotidien El Watan qui titre dimanche "Alger s'indigne", dénonce "une plaisanterie de mauvais goût" et "des insinuations pathétiques".

Acte 3 : Des condamnations politiques en France

La polémique monte également en France. A droite, d'abord, avec les déclarations de Jean-François Copé. "Je regrette le dernier dérapage verbal du Président de la République. Sur un thème aussi important que la relation de la France avec l'Algérie, l'exigence de la fonction présidentielle n'autorise pas une formule aussi déplacée", a réagi en trois tweets le patron de l'UMP.

L'ex-ministre UMP Valérie Pécresse a trouvé les propos de François Hollande "particulièrement maladroits" tandis que le secrétaire général adjoint de l'UMP Geoffroy Didier avait invité, samedi, le président de la République à "présenter ses excuses au peuple algérien" pour cette plaisanterie qu'il qualifiait d'"indigne"

De l'autre côté de l'échiquier politique, le co-président du Front de gauche, Jean-Luc Mélenchon, a tweeté que la boutade de François Hollande sur la sécurité en Algérie lui donnait "la nausée".

Enfin, Farouk Ksentini, président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), a lui aussi appelé François Hollande à présenter des excuses."Les propos du président français relèvent de la provocation et constituent une grave atteinte à l'Algérie", a-t-il expliqué.

Acte 4 : L'Elysée tente de calmer les esprits

La boutade du président François Hollande sur la sécurité en Algérie était une "plaisanterie légère qui pouvait viser n'importe qui dans n'importe quel pays", a fini par temporiser l'entourage du chef de l'Etat. Cette phase "n'avait aucun sens particulier concernant l'Algérie", martèle-t-on à l'Elysée. Qui insiste : "Il n'y a pas de tension particulière au niveau des autorités algériennes." 

Puis l'Elysée a publié un communiqué : François Hollande "exprime ses sincères regrets pour l'interprétation qui est faite de ses propos" sur l'Algérie et "en fera directement part" au président Bouteflika. "Les quelques mots prononcés lundi par le président de la République dans le cadre du 70ème anniversaire du CRIF, concernant un déplacement de Manuel Valls en Algérie, font l'objet d'une polémique sans fondement", selon la présidence de la République.

Et le communiqué d'ajouter : "Chacun connaît les sentiments d'amitié que François Hollande porte à l'Algérie et le grand respect qu'il a pour son peuple, comme l'ont prouvé la visite d'État qu'il a effectuée en décembre dernier et les discours qu'il a prononcés."

Acte 5 : Alger "satisfait" des regrets de Hollande

Le chef de la diplomatie algérienne a "pris connaissance avec satisfaction du communiqué rendu public par M. Hollande, en particulier les sentiments d'amitié qu'il porte à l'Algérie et le grand respect qu'il a pour son peuple", a déclaré son porte-parole, Amar Belani.

Celui-ci ajoute que "l'état et les perspectives du partenariat d'exception entre l'Algérie et la France" seraient "l'objet d'échanges à l'occasion de la communication téléphonique que le président de la République Abdelaziz Bouteflika recevra de son homologue français".

 

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