Centrafrique : la prolongation de Sangaris pose la question du relais de la France
Les députés ont très majoritairement voté pour la poursuite de l'intervention de l'armée française, malgré les dissensions à droite et les critiques du Front de gauche. Le Sénat a lui aussi adopté le texte à une large majorité.
Le Parlement a donné son feu vert, mardi 25 février, à la prolongation de l'opération militaire française Sangaris en Centrafrique. La France va aussi envoyer 400 hommes supplémentaires dans le pays, ce qui va porter le contingent à 2 000 hommes. La présidente de transition centrafricaine, Catherine Samba-Panza, "se réjouit que le peuple français accepte de voler au secours du peuple centrafricain".
Dans le détail, les députés se sont prononcés par 428 voix pour, 14 contre et 21 abstentions, la plupart des groupes ayant décidé de voter la prolongation. Au Sénat, le vote a été acquis par 328 voix pour, 3 sénateurs ont voté contre, et 15 se sont abstenus.
Paris veut un relais de l'ONU au plus vite
La situation humanitaire est dramatique en République centrafricaine. Selon le Haut commissariat aux réfugiés (HCR) de l'ONU, au moins 15 000 personnes, essentiellement des musulmans, sont encerclées et risquent d'être attaquées par des groupes armés dans l'ouest du pays. Devant les députés, Jean-Marc Ayrault a appelé les Nations unies à faire "davantage et plus vite" pour prendre le relais de la France.
Tout en admettant que les difficultés restent "considérables" en Centrafrique, le Premier ministre a souligné les "réels progrès" réalisés depuis décembre, et assuré que l'opération française a permis d'éviter "l'embrasement général" du pays.
"La France n'a pas vocation de se substituer aux forces internationales auxquelles il incombe d'assurer dans la durée" la sécurisation du pays, a-t-il affirmé, en soulignant l'urgence de mettre en œuvre une opération de maintien de la paix avec des Casques bleus de l'ONU.
L'opposition refuse de donner un blanc-seing
La logique d'un soutien aux forces françaises engagées dans une opération plus complexe que prévu a prévalu chez les élus, malgré les échanges parfois houleux entre majorité et opposition.
Début décembre, le président, François Hollande, avait prédit une opération "rapide". Mais le gouvernement avait reconnu depuis que ce serait "plus long que prévu". Si les violences ont baissé à Bangui, les représailles entre chrétiens et musulmans ont provoqué la fuite de dizaines de milliers de musulmans vers le nord.
"Nous sommes en relais d'une opération de maintien de la paix des Nations unies", a martelé Jean-Yves Le Drian. Il faut, selon le ministre de la Défense, "tout mettre en œuvre" pour qu'une élection présidentielle puisse avoir lieu, comme annoncé, en février 2015 en Centrafrique.
"François Hollande n'est pas un bon chef des armées", a asséné l'UMP Christian Jacob. Le président du groupe d'opposition à l'Assemblée nationale a accusé le chef de l'Etat d'avoir entraîné la France dans "un piège" dont on voit mal comment elle va se sortir. L'UMP a également dénoncé comme une "aberration" la baisse programmée des effectifs de l'armée de terre alors que ses soldats sont plus que jamais sollicités.
Des questions sur la durée et la nature de l'intervention
La durée de l'intervention française a été au cœur du débat. "Qu'est-ce que deux mois et demi pour un pays plongé depuis des décennies dans un chaos politique ancien et complexe, qui a fini par ébranler l'unité même de son peuple?", s'est interrogé le chef de file des députés PS Bruno Le Roux. Soulignant que "la situation ne pourra s'améliorer durablement sans une aide internationale accrue", il a affirmé que "la France pallie au plus pressé" et regretté que "certains de nos partenaires freinent des quatre fers".
Les interrogations ont également été nombreuses sur les effectifs français déployés, jugés globalement insuffisants, et le montant de la facture dont la France doit pour l'instant s'acquitter seule.
Rejetant les critiques selon lesquelles la France est isolée en Centrafrique, Elisabeth Guigou (PS) a souligné que l'Union européenne devait commencer à déployer dans le pays à partir de mars une force qui doit compter près d'un millier d'hommes.
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