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Centrales nucléaires : la polémique provoquée par Ségolène Royal en quatre actes

Les propos de la ministre de l'Ecologie sur la construction de nouveaux réacteurs relance le débat sur l'avenir du nucléaire en France. 

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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La ministre de l'Ecologie, Ségolène Royal, à l'Elysée, à Paris, le 5 janvier 2015.  (MARTIN BUREAU / AFP)

Le gouvernement a-t-il changé de cap en matière de nucléaire ? Pour la première fois, il a évoqué, par la voix de sa ministre de l'Ecologie, Ségolène Royal, la possibilité de construire de nouvelles centrales en France. Cette sortie a provoqué un tollé et relance le débat sur l'avenir du nucléaire dans le pays.

Retour sur une polémique en quatre actes.  

Acte 1 : Ségolène Royal évoque la construction de nouveaux réacteurs

C'est une petite phrase mais qui pourrait avoir de lourdes conséquences pour l'industrie nucléaire. Dans un entretien publié mardi 13 janvier par le magazine spécialisé L'Usine nouvelleSégolène Royal estime qu'"il faut aussi programmer la construction d'une nouvelle génération de réacteurs, qui prendront la place des anciennes centrales lorsque celles-ci ne pourront plus être rénovées".
 
Pour la première fois, l'exécutif évoque donc la possibilité de construire de nouvelles centrales nucléaires. Jusqu'à présent, il n'en était pas question. Au contraire, la loi de transition énergétique, votée en première lecture par les députés et qui doit être examinée début février au Sénat, prévoit de réduire la part d'énergie nucléaire de 75% aujourd'hui à 50 % d'ici 2025. 

Voici trois ans, Ségolène Royal souhaitait que le nucléaire ne soit plus qu'une énergie d'appoint. Elle envisageait même l'arrêt de la construction de l'EPR, la nouvelle centrale de Flamanville (Manche).

Acte 2 : les écologistes dénoncent ce revirement

Les écologistes perçoivent cette annonce comme un revirement de la ministre, à l'instar de la députée EELV Cécile Duflot. "Après le vote de la loi sur la transition énergétique, je regrette infiniment les propos de Ségolène Royal. (...) Comme elle nous avait donné l'habitude d'être moderne sur ces sujets, je trouve cela dommage, très dommage", regrette-t-elle sur France Info.  

"Construire de nouveaux réacteurs nucléaires représenterait un choix économique calamiteux pour la France et un déni de réalité industrielle", a estimé de son côté Sébastien Blavier, de Greenpeace. "Que l'on produise de l'électricité avec des réacteurs anciens exploités au-delà de 40 ans ou bien avec des réacteurs nouveaux de type EPR, le coût de production sera plus élevé que celui des [énergies] renouvelables", ajoute l'ONG dans un communiqué, en relevant qu'en 2013 les investissements mondiaux dans l'éolien ont été cinq fois supérieurs à ceux réalisés dans le nucléaire.

Acte 3 : EDF pense pouvoir prolonger la durée de vie des centrales 

Intervenant dans le débat, le nouveau PDG d'EDF, Jean-Bernard Lévy, s'est dit "confiant" sur l'obtention par le groupe du droit de prolonger la durée de vie des centrales nucléaires qu'il exploite en France. Actuellement, la durée de vie des 58 réacteurs nucléaires français est limitée à 40 ans.

"Le parc existant en France a 30 ans d'âge moyen et je suis confiant sur la capacité d'EDF à prolonger avec ses grands partenaires et en toute sécurité la durée de fonctionnement de ce parc jusqu'à 50 ans, voire jusqu'à 60 ans", a-t-il déclaré devant la commission des affaires économiques du Sénat.

Concernant la fermeture éventuelle de la centrale de Fessenheim (Haut-Rhin), promesse électorale de François Hollande, Jean-Bernard Lévy a indiqué que le gouvernement lui a dit être prêt à étudier la fermeture d'autres réacteurs à la place.

Acte 4 : Ségolène Royal persiste et signe

Dans un communiqué publié mercredi, la ministre estime qu'il n'y a pas lieu de "polémiquer" sur le nucléaire et que ses déclarations sont "conformes à la loi de transition énergétique". Le projet de loi limite la capacité nucléaire de la France à 63,2 gigawatts, son niveau actuel, ce qui implique que toute mise en service d'un nouveau réacteur, comme l'EPR de Flamanville, se combine avec la fermeture d'autres de capacité équivalente.

"En cohérence avec le maintien d'une part d'énergie nucléaire dans le mix énergétique français, nos entreprises (EDF, AREVA, CEA) travaillent donc, comme je l'ai dit lors du débat à l'Assemblée nationale, sur les réacteurs futurs qui pourront remplacer, au sein des sites actuels, une partie des réacteurs qui ne pourront plus être prolongés", explique Ségolène Royal.

Ses déclarations de mardi avaient également suscité des interrogations sur le type de nouveaux réacteurs auquel pensait Ségolène Royal. Elle précise qu'il "s'agit à la fois de tirer parti des retours d'expérience des réacteurs de troisième génération (EPR, ATMEA) et de travailler sur une quatrième génération de réacteurs consommant beaucoup moins de combustibles et les recyclant, générant des déchets en moindre volume et moins nocifs (démonstrateur ASTRID du CEA)".

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