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Cinq questions pour mieux comprendre la situation des migrants évacués à Paris

Les forces de l'ordre ont évacué, lundi, la halle Pajol, où se sont retrouvés des migrants évacués une semaine plus tôt. Mais sans vraie solution au problème.

Article rédigé par Anne Brigaudeau
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Des migrants se préparent à dormir place de la Chapelle à Paris, lundi 8 juin 2015. (JOEL SAGET / AFP)

Situation inextricable ? Environ 80 migrants ont été évacués sans ménagement, lundi 8 juin, par les CRS de la halle Pajol, dans le 18e arrondissement parisien. Qui sont-ils ? Pourquoi reviennent-ils dans cet arrondissement ? Quelles solutions s'offrent à eux ? Francetv info fait le point. 

1Qui sont les migrants du 18e arrondissement ?

Les personnes évacuées, lundi, viennent essentiellement de la Corne de l'Afrique : "Ils sont éthiopiens, érythréens ou encore soudanais du Darfour", affirme l'élu écologiste du 18e arrondissement Pascal Julien. Ils faisaient partie, semble-t-il, des 350 migrants du camp de fortune installé depuis des mois sous le métro aérien de la station La Chapelle, qui a été évacué, mardi 2 juin, pour des raisons sanitaires.

Parmi ces 350 migrants, "180 ont été reconnus comme demandeurs d'asile et pris en charge, 60 'personnes vulnérables' - des femmes et des enfants - sont hébergées par la ville de Paris", détaille Bruno Morel, directeur général d'Emmaüs Solidarité. Quelques dizaines d'autres, dont une partie font leur retour après un hébergement d'urgence éloigné ou très provisoire, restent dans le flou. 

2Pourquoi reviennent-ils dans le 18e arrondissement ?

Malgré les promesses d'hébergement faites, le 2 juin, lors de l'évacuation du campement de la Chapelle, une centaine de migrants se retrouvent à nouveau à la rue dès le lendemain. Une partie d'entre eux, probablement guidés par des militants, passent la nuit dans des locaux associatifs situés face à l'église Saint-Bernard (18e arrondissement), célèbre depuis l'évacuation musclée de sans-papiers en 1996. Lundi 8 juin, environ 80 migrants sont également délogés de la halle Pajol et emmenés au commissariat. 

"Aucune solution de relogement pérenne ne leur est proposée", martèle Pascal Julien, pour expliquer pourquoi ces migrants reviennent dans le 18e. Le conseiller EELV de Paris demande, avec d'autres élus écologistes et communistes, l'ouverture d'un centre d'accueil à Paris. "Après l'expulsion de la Chapelle, certains migrants ont été dispersés pour une nuit à Beauvais (Oise), ou Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), explique-t-il. Ensuite, ils sont revenus dans le 18e où se trouvent les associations et les autres migrants qu'ils connaissent."

 

3Demandent-ils tous le droit d'asile ?

"Oui, pour la plupart", assure Pascal Julien. Non, affirme la préfecture. "Ça dépend", répond Marie Lindemann, coordinatrice juridique de l'Association service social familial migrants (Assfam), une association habilitée à aider les migrants détenus dans le centre de rétention administrative (CRA) de Vincennes. Interpellés dans le 18e arrondissement ou à proximité, à la gare du Nord, une trentaine de sans-papiers y ont été amenés depuis une semaine. 

"Samedi dernier, par exemple, sur douze Erythréens et cinq Soudanais arrivés au CRA de Vincennes, deux ont demandé l'asile, explique Marie Lindemann à francetv info. Les autres ont d'autres projets de vie : ils veulent souvent rejoindre des proches en Grande-Bretagne ou aux Pays-Bas. Comme ils ne connaissent pas le droit, tous ne mesurent pas les conséquences d'un refus de demande d'asile." Notamment les risques d'expulsion, qui sont toutefois minimes pour les migrants originaires de la Corne de l'Afrique, une région où règnent les guerres et les dictatures.

4Que deviennent ceux qui sont placés en centre de rétention ?

"Une fois en centre de rétention, les migrants ont cinq jours pour déposer une demande d'asile et l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (Ofpra) donne sa réponse dans les dix jours, précise Marie Lindemann. Si c'est oui, les migrants sont libérés, et cela leur ouvre des droits, notamment à un logement, mais la procédure est longue."

Et si c'est non ? "Ils sont théoriquement expulsables, mais, en pratique, on n'expulse pas les Erythréens." Et s'il s'agit de Soudanais ? "On saisit la Cour européenne des droits de l'homme qui suspend l'expulsion, notamment à cause de la situation au Darfour, poursuit la coordinatrice juridique de l'Assfam. Depuis l'été dernier, aucun Soudanais ni Erythréen n'a été renvoyé chez lui." Au bout de 45 jours, les CRA doivent libérer les migrants. Retour, donc, à la case départ, sans solution satisfaisante.

5Y a-t-il des solutions de relogement ?

Pascal Julien espère que la mairie de Paris accèdera rapidement au vœu qu'il a déposé, avec d'autres élus, et qu'elle ouvrira un nouveau centre d'accueil pour les migrants. "Paris ne manque pas d'immeubles inoccupés, s'indigne-t-il. Ces migrants ont survécu aux drames de la Méditerranée et maintenant, on les renvoie à coups de matraques ?"

Selon L'Obs, la mairie de Paris envisage effectivement d'ouvrir un lieu d'hébergement temporaire "répondant  à deux priorités : informer clairement les migrants sur leurs droits (notamment pour les demandes d'asile), et leur assurer un accueil digne." L'adjoint PCF chargé des affaires sociales et de l'hébergement d'urgence à la mairie du 18e, Gérald Briant, est satisfait que le projet soit "dans les tuyaux". Mais il reste inquiet car il faudra "plusieurs semaines" pour qu'il soit mis en place. Bruno Morel, lui, demande une la création d'une "cellule de crise" coordonnée par l'Etat, la mairie de Paris et les associations. Et il réclame aussi que, face à l'urgence, une même capacité d'hébergement qu'en hiver soit débloquée.

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