Syrie : le Liban dans la peur de l'engrenage
La population craint une recrudescence des attentats à la voiture piégée et appréhende les conséquences d'une intervention occidentale en Syrie. Reportage à Beyrouth.
"D'habitude, à cette heure-ci, on n'avance pas, il y a des bouchons partout. Là, c'est presque fluide, on sent que la situation n'est pas normale." Hassan, notre chauffeur de taxi, hoche la tête d'un air dubitatif. Il est 17 heures et dans les rues de Beyrouth, la capitale du Liban, la chaleur est écrasante en cette fin de mois d'août.
"Les gens sortent moins, ils ont peur. Il y a une vraie psychose de la voiture piégée", m'explique Jeanine, une journaliste libanaise francophone, alors que nous sommes installées à la terrasse d'un café sur l'avenue Gemmayzeh, bien moins animée qu'en temps normal.
La Syrie ravive les tensions confessionnelles
Depuis plusieurs mois, le Liban vit sous tension, les yeux rivés sur les soubresauts de son voisin syrien. Mais ces dernières semaines, le climat s'est alourdi. Surtout depuis les attentats survenus d'abord en banlieue de Beyrouth, dans le chef-lieu du parti chiite Hezbollah, soutien du régime de Bachar Al-Assad, puis le 23 août à Tripoli, dans le nord du Liban. Un double attentat à la voiture piégée contre deux mosquées sunnites, qui a fait au moins 45 morts. L'attaque la plus meurtrière depuis la fin de la guerre civile.
Le Liban semble bien pris dans l'engrenage de la crise syrienne, qui ravive les tensions confessionnelles qui ont déjà coûté si cher au pays du cèdre. Personne ici ne veut rouvrir les blessures de la terrible guerre civile qui a ravagé le Liban entre 1975 et 1990. Mais la menace d'une action occidentale amplifie les inquiétudes.
Hassan s'interroge sur les conséquences d'une telle décision sur son pays. Une recrudescence des attentats ? L'exacerbation des querelles entre chiites et sunnites ? Un coup supplémentaire à l'économie, qui tourne déjà au ralenti ? Ahmad, le serveur du café où nous sommes assises, nous traite comme des reines. "Il y a beaucoup moins de touristes que d'habitude. Le tourisme a vécu un nouvel été très difficile, cette année", regrette-t-il. L'instabilité dans la région a fait fuir les touristes du Golfe, qui représentent 60% de la clientèle.
"S'il y a des frappes, personne ne sait quelles répercussions cela aura sur le Liban. J'ai un peu peur, c'est vrai", conclut Hassan en nous déposant devant l'hôtel, dont le patron tente chaque jour d'attirer les clients avec de nouvelles promotions.
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