Budget de la Défense : "L'armée manque de tout" s'indigne un général français
François Hollande a estimé que le budget de la Défense était suffisant alors que le chef d'État-major des armées, Pierre de Villiers, plaide pour une hausse. Mercredi sur franceinfo, le général Vincent Desportes, spécialiste de défense et de sécurité, lui donne raison.
François Hollande a estimé mercredi 21 décembre que le budget de la Défense avait augmenté et qu'il était suffisant. Chef d'État-major des armées, le général Pierre de Villiers a lui réclamé une hausse progressive du budget de la Défense pour atteindre les 2% du PIB, contre 1,77% actuellement. "On a énormément augmenté les engagements militaires et, en même temps, les moyens n'ont pas été mis en place", s'est indigné sur franceinfo le général Vincent Desportes, spécialiste de défense et de sécurité.
franceinfo : Selon vous, qui a raison ? Le président de la République ou le chef d'État-major des armées ?
Général Vincent Desportes : Nous sommes habitués à ce que le président Hollande soit toujours très satisfait de son bilan. Le chef d'État-major des armées a raison d'alerter les Français, il est dans son rôle de dire que les moyens que nous attribue la nation ne sont pas suffisants pour conduire au mieux les missions qu'elle nous donne. [La hausse du budget attribué aux armées] n'est pas suffisante. Les armées sont sous-entraînées par rapport aux normes. Nos véhicules sont vétustes, dans un état de disponibilité très faible. Seul un hélicoptère sur trois peut voler.
La loi de programmation militaire a été révisée à la hausse, n'est-ce pas suffisant ?
La loi de programmation militaire a été définie en 2013, à partir d'une situation très différente de celle d'aujourd'hui. Les armées sont sur-engagées par rapport au contrat donné aux armées à ce moment-là.
Dans cette période de restrictions budgétaires, est-il vraiment possible d'augmenter le budget à 2% du PIB plus rapidement, comme le général de Villiers le demande ?
Ce n'est pas une affaire budgétaire mais de compréhension de la menace d'aujourd'hui. Elle est réelle. On manque de troupes, de moyens, de munitions, de temps d'entraînement et d'argent pour faire rouler des véhicules. L'armée manque de tout. Jamais un gouvernement n'aura autant sacrifié le futur au profit du présent. Jamais un gouvernement n'aura laissé les armées dans un état comme celui qui va être celui des armées en 2017. Les 600 millions d'euros attribués aux armées sont incapables de remplir le déficit budgétaire, qui ne date pas de ce gouvernement. Ça fait 25 ans que les budgets décroissent. Ce qui est terrible, c'est qu'on a énormément augmenté les engagements militaires et en même temps, les moyens n'ont pas été mis en place.
Est-ce-que la solution peut venir de l'Europe ? Doit-elle être mise à contribution ?
C'est nécessaire mais ça n'est possible qu'après-demain. Cela fait 60 ans qu'on essaie de faire l'Europe de la défense et que cela ne fonctionne pas. Un gouvernement responsable, qui veut protéger les citoyens et son territoire face aux menaces, doit se réengager et réinvestir dans la défense. Je souhaite que l'effet Brexit, qui va faciliter la construction de l'Europe de la défense, et l'effet Trump, avec le désengagement des Américains [dans la protection de l'Europe], nous donne le coup de pied aux fesses nécessaire pour se rendre compte qu'il faut construire cette Europe de la défense. Quand le chef d'état-major des armées dit 2% en 2022, il a le droit mais aussi le devoir de le dire. C'est à lui de dire à la nation : "Il faut absolument exiger de votre prochain gouvernement qu'il fasse l'effort nécessaire pour votre défense".
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