Pourquoi Steve Bannon, l'influent et sulfureux conseiller de Donald Trump, a été chassé de la Maison Blanche
Icône de la droite conservatrice, il avait été nommé chef de la stratégie et haut conseiller à la Maison Blanche.
Le bruit courait depuis des semaines. Le controversé Steve Bannon, conseiller stratégique de Donald Trump, quitte la Maison Blanche. "Le secrétaire général de la Maison Blanche John Kelly et Steve Bannon se sont mis d'accord sur le fait qu'aujourd'hui serait le dernier jour de Steve", a indiqué Sarah Huckabee Sanders, porte-parole de la Maison Blanche, vendredi 18 août. Selon le New York Times, qui avait révélé le départ imminent du conseiller, celui-ci aurait présenté sa démission dès le 7 août, mais l'annonce en a été retardée par les retombées des violences à Charlottesville. Franceinfo revient sur les raisons de ce départ.
Parce qu'il fait les frais d'une guerre des chefs à la Maison Blanche
Selon le New York Times, "la rumeur du départ de Steve Bannon courait depuis longtemps à Washington". Même s'il a joué un rôle déterminant dans la campagne de Donald Trump, Steve Bannon "a affronté pendant des mois d'autres conseillers spéciaux" du président américain, "ainsi que des membres de la famille" de ce dernier, souligne le quotidien américain. Ainsi, "le gendre et conseiller de Donald Trump, Jared Kushner, et le directeur du Conseil économique national, Gary Cohn", ancien de Goldman Sachs, étaient en friction avec lui, rapporte le site américain Politico.
Steve Bannon était également un rival de l'ancien chef de cabinet de Donald Trump, Reince Priebus, limogé le 28 juillet, ainsi que de Stephen Miller, conseiller politique, et Kellyanne Conway, conseillère spéciale du président. "Il y a quatre chefs de cabinet et c’est trois de trop", résumait un membre de l’administration, interrogé par Politico en février 2017.
Mais celui que le départ de l'ancien patron du site Breitbart News conforte surtout, c'est bien le successeur de Reince Priebus comme secrétaire général de la Maison Blanche, John F. Kelly, choisi "pour sa capacité à organiser un personnel chaotique", comme l'explique le New York Times. Ce général de corps de Marine à la retraite "aurait été fatigué de la longue querelle du stratège en chef avec le lieutenant général McMaster, le conseiller en sécurité nationale", analyse le journal.
Parce qu'il prenait trop de place
Quoique discret devant les caméras, Steve Bannon, ancien banquier d'affaires de Goldman Sachs et ex-officier dans la marine, semblait disposer de plus de pouvoir que les autres. "Président Bannon ?" titrait d'ailleurs le New York Times, le 30 janvier 2017. Et pour cause : l'homme avait été nommé par décret au Conseil national de sécurité, un groupe chargé notamment de réfléchir à la stratégie militaire des Etats-Unis, mais auquel aucun proche du président n'avait appartenu auparavant.
Sauf que selon le New York Times, Donald Trump ignorait qu'il accorderait tant de pouvoir à son conseiller en le nommant. Selon le New York Times, Donald Trump s'en serait agacé, et Steve Bannon avait fini par perdre ce poste.
Parce qu'il est soupçonné d'avoir fait fuiter des informations à la presse
Ces dernières semaines, malgré les mises en garde d'Anthony Scaramucci, l'éphémère directeur de la communication de Donald Trump, Steve Bannon avait vraisemblablement alimenté plusieurs fuites d'informations dans la presse, afin de nuire aux factions rivales au sein de la Maison Blanche.
Irrité, Donald Trump s'était exprimé sur son conseiller en des termes très ambigus en début de semaine. "J'aime bien M. Bannon, c'est un ami (...) C'est quelqu'un de bien, pas un raciste" , avait d'abord estimé le président américain. Avant de rappeler que celui que les médias décrivaient parfois comme son "éminence grise", était arrivé "tard" dans son équipe. Et de lancer, comme un avertissement : "Nous verrons ce qui arrivera à M. Bannon".
Parce qu'il prenait le contre-pied de Donald Trump dans une récente interview
Steve Bannon était fragilisé depuis la parution inattendue, le 16 août, d'une interview donnée au mensuel The American Prospect, marqué à gauche. Dans cet entretien, l'ancien patron du site conspirationniste Breitbart News, tire à boulets rouges sur ses détracteurs à la Maison Blanche, évoquant ses "combats quotidiens" contre ceux qu'ils décrit comme des "globalistes", "ceux de Goldman Sachs" qui ne partagent pas ses vues protectionnistes. Steve Bannon y critique également, dans des termes fleuris, ses opposants à la Défense, au Trésor et au département d'État "qui se pissent dessus" à l'idée de changer de politique commerciale.
Plus génant, alors que Donald Trump menace depuis plusieurs semaines Kim Jong-un d'une action militaire, Steve Bannon balayait cette option : "Il n'y a aucune solution militaire, il faut oublier ça". "Jusqu'à ce que quelqu'un résolve la partie de l'équation et montre que 10 millions de personnes ne mourront pas dans les trente premières minutes, je ne vois pas de quoi on parle", estime-t-il. "Ils nous ont coincés".
Enfin, alors que Donald Trump a défendu une partie des manifestants d'extrême droite présents à Charlottesville - où l'un d'eux a tué d'une contre-manifestante antifasciste, le 12 août - Steve Bannon n'a pas tenu la même ligne dans son interview, décrivant les "ethno-nationalistes" comme "des losers". "Ils sont à la marge. Je pense que les médias en parlent trop, et nous devons aider à les écraser. (...) Ces mecs sont une collection de clowns", a-t-il ajouté.
Même si Bannon a indiqué qu'il pensait que ses propos n'étaient pas destinés à être rendus publics, ceux-ci ont été interprétés, par beaucoup à la Maison Blanche, comme une provocation incompatible avec le maintien de Steve Bannon, rapporte le New York Times.
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