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Présidentielle américaine : cinq questions pour comprendre les enjeux du "Super Tuesday"

C'est un passage obligé mais redouté pour les candidats outre-Atlantique : ce mardi 1er mars, douze Etats participent aux primaires démocrates et républicaines. De quoi bouleverser la course à la Maison Blanche ?

Article rédigé par Mathieu Dehlinger
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Dans un bureau de vote de Loundon (New Hampshire), lors de la primaire républicaine du 9 février 2016. (JEWEL SAMAD / AFP)

Les choses sérieuses commencent. Après l'Iowa, le New Hampshire, le Nevada et la Caroline du Sud, un nouvel obstacle se dresse sur la route des prétendants à la Maison Blanche : le redouté "Super Tuesday". Mardi 1er mars, les électeurs de douze Etats américains sont invités à participer, le même jour, aux primaires démocrates et républicaines.

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Quelle est l'histoire de ce "super mardi" ? Quelle est son importance ? Quelles en seront les conséquences ? Francetv info passe en revue les principales questions qui se posent sur ce jour très spécial aux Etats-Unis.

1Le "Super Tuesday", c'est quoi ?

C'est une étape ultra-symbolique pour les prétendants à la Maison Blanche, chez les démocrates comme chez les républicains. Comme son nom l'indique, il s'agit d'un mardi, généralement en février ou en mars. Ce jour-là, un grand nombre d'Etats tiennent simultanément des caucus ou des primaires.

La journée est donc cruciale pour les candidats, surtout pour ceux qui n'ont pas encore brillé dans les urnes, car de nombreux délégués – essentiels pour obtenir une investiture – sont en jeu. Cette année par exemple, 595 délégués sont à répartir lors du "Super Tuesday" côté républicain (sachant qu'il en faut 1 237 au total pour crier victoire) et 865 côté démocrate (sur les 2 382 nécessaires pour l'emporter).

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2De quand ça date ?

Les débuts du "Super Tuesday" ne sont pas très clairs. L'expression apparaît dans certains articles de presse dès 1976, mais c'est en 1988 que naît véritablement l'événement. Les démocrates se relèvent péniblement d'une déroute électorale, rappelle NPR (en anglais). Quatre ans plus tôt, le parti a perdu l'élection présidentielle, et pas de la meilleure des manières : son candidat, Walter Mondale, un libéral du Midwest des Etats-Unis, s'est effondré face au républicain Ronald Reagan, en ne remportant qu'un seul Etat, le Minnesota.

Les candidats aux primaires démocrates de 1988, rassemblés lors d'un événement de campagne aux Etats-Unis, le 7 octobre 1987. (TRIPPETT / SIPA)

Les démocrates du Sud des Etats-Unis ont alors l'idée d'une primaire régionale pour faire émerger un candidat plus modéré. "Le Super Tuesday a été imaginé pour nationaliser" le processus des primaires, explique à l'époque Chuck Robb, présenté comme l'un des "principaux architectes" du système, à la chaîne PBS (en anglais). L'ancien gouverneur de Virginie affirme vouloir limiter l'influence des premiers scrutins, organisés dans l'Iowa et dans le New Hampshire, pas forcément représentatifs du reste du pays et "tester les compétences des candidats dans une élection générale". Ont-ils une organisation assez solide ? Assez d'argent pour faire campagne ? Une capacité à motiver un large panel d'électeurs ? Autant de questions auxquelles le "Super Tuesday" est censé apporter une réponse.

3Ce sont toujours les mêmes Etats qui votent ?

Non, ça change à chaque fois. En 1988 par exemple, neuf Etats étaient concernés : l'Alabama, la Floride, la Géorgie, le Kentucky, la Louisiane, le Mississippi, l'Oklahoma et le Texas. En 2008, un gigantesque "Super Tuesday" était organisé, le plus important jusqu'à présent avec pas moins de 25 Etats ou territoires américains appelés à se prononcer en même temps.

Cette année, ce sera un peu plus calme : l'Alabama, l'Alaska, l'Arkansas, le Colorado, la Géorgie, le Massachusetts, le Minnesota, l'Oklahoma, le Tennessee, le Texas, le Vermont et la Virginie. Douze Etats donc, auxquels il faut ajouter les Samoa américaines.

4Est-ce que c'est VRAIMENT si important ?

Les candidats le savent : sortir vainqueur du "Super Tuesday" est plutôt bon signe pour obtenir l'investiture au bout de la course. Que ce soit Michael Dukakis et Bill Clinton chez les démocrates en 1988 et 1992 ou Bob Dole et Mitt Romney chez les républicains en 1996 et en 2012… Tous s'en sont sortis avec les honneurs lors des primaires organisées ce jour-là.

Parfois, l'affrontement est plus serré. C'était le cas en 2008, lors du face-à-face entre Hillary Clinton et Barack Obama dans le camp démocrate. Lors du "Super Tuesday", les deux adversaires avaient engrangé sensiblement le même nombre de délégués. Une désillusion pour Hillary Clinton : certains analystes attribuent sa défaite cette année-là en partie au fait qu'elle n'avait pas de "plan B" en cas d'échec face à Barack Obama lors de ce jour crucial, explique le Guardian (en anglais).

5Bon, alors quels sont les enjeux cette année ?

Les candidats à l'investiture démocrate Bernie Snaders et Hillary Clinton, le 4 février 2016 à Durham, dans le New Hampshire (Etats-Unis), lors d'un débat télévisé animé. (JUSTIN SULLIVAN / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)

Bernie Sanders va-t-il résister ? Le "socialiste" s'est révélé être un adversaire coriace pour Hillary Clinton au début des primaires, mais sa campagne a-t-elle une "date d'expiration", comme le dit le Daily Beast (en anglais) ? De nombreux observateurs doutent de sa capacité à tenir sur la durée et le "Super Tuesday" pourrait bien être un sérieux obstacle à surmonter, d'autant qu'il a été très largement battu en Caroline du Sud.

Avec autant d'élections au même moment, l'événement favorise les candidats qui disposent d'une grosse organisation, d'importantes ressources et de soutiens locaux pour mobiliser les électeurs, note le Washington Post (en anglais). Sur le papier, Hillary Clinton a donc l'avantage. Trop peu de sondages ont été réalisés pour se faire une idée, concède le journal, mais tout de même, le "Super Tuesday" est "dangereux" pour Bernie Sanders.

Ted Cruz et Marco Rubio, candidats aux primaires républicaines, lors d'un débat télévisé à Des Moines (Etats-Unis), le 28 janvier 2016. (SCOTT OLSON / GETTY IMAGES NORTH AMERICA)

Un adversaire à la hauteur de Donald Trump ? Pour l'instant, le milliardaire domine la course, même s'il a dû concéder une défaite dans l'Iowa à l'ultraconservateur Ted Cruz. Ce dernier reconnaît que le 1er mars sera "la plus importante soirée" des primaires, explique le New York Times (en anglais). Elle pourrait peut-être permettre de montrer qu'il est l'unique candidat capable de battre le milliardaire, comme il le prétend. A moins que Marco Rubio, plus acceptable pour l'establishment républicain, ne finisse par s'imposer avec l'abandon des autres prétendants.

Le neurochirurgien Ben Carson, candidat à la primaire républicaine, lors d'un débat télévisé à Las Vegas (Etats-Unis), le 15 décembre 2016. (ROBYN BECK / AFP)

Vers l'abandon de Ben Carson ? Pourfendeur de l'establishment républicain, comme Donald Trump, le neurochirurgien a eu un temps les faveurs des sondages, avant de s'effondrer à nouveau. Depuis, il n'a obtenu que des scores décevants, avec moins de 5% des voix lors du caucus du Nevada. En cas d'échec lors du "Super Tuesday", il devrait arrêter les frais, à en croire des proches cités par Politico (en anglais). Les perspectives d'avenir de John Kasich, arrivé dernier dans le Nevada, sont elles aussi plus qu'incertaines.

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