Darmanin, Taubira et le "tract ambulant pour le FN" : la polémique en cinq actes
La garde des Sceaux a qualifié, mercredi, de "déchets de la pensée humaine" les propos du député UMP, qui l'avait qualifiée, mardi, de "tract ambulant pour le FN".
La partie (collective) de ping-pong continue. Depuis mardi 3 mars, le monde politique n'en finit pas de commenter les propos de Gérald Darmanin, député-maire UMP de Tourcoing (Nord). En s'attaquant à Christiane Taubira, l'élu s'est attiré les foudres du Premier ministre. Fait rare, la garde des Sceaux a répondu à l'élu de droite, qui a reçu le soutien de l'opposition. Retour en cinq actes sur cette polémique.
Acte 1 : "Taubira est un tract ambulant pour le FN"
"Qu'est-ce qui fait monter le Front national ?, s'interroge mardi matin, l'élu UMP, sur le plateau de LCI. Je réponds Mme Taubira. Si vous pensez que Mme Taubira n'est pas un tract ambulant pour le Front national, mis en avant par François Hollande, c'est que, je pense, vous n'avez pas compris le cynisme des socialistes", poursuit l'ancien porte-parole de la campagne de Nicolas Sarkozy pour la présidence de l'UMP.
Acte 2 : la colère de Valls
Tout au long de la journée, les réactions à gauche se sont multipliées : membres du gouvernement, Europe Ecologie-Les Verts, Jean-Luc Mélenchon... Tous condamnent les propos du député UMP. Interpellant Manuel Valls mardi après-midi à l'Assemblée, Gérald Darmanin s'est attiré une réplique cinglante.
Sur un ton vif et sous les applaudissements des socialistes, le Premier ministre n'a pas retenu ses coups : "Jamais nous avons tenu les propos que vous avez tenus. (...) Ce n'est ni la jeunesse, ni la campagne électorale, ni le combat politique qui doivent vous permettre de tenir de tels propos et nous ne le permettrons jamais", a martelé Manuel Valls, devant des députés socialistes debout, et à quelques mètres de Christiane Taubira.
Acte 3 : Taubira n'a "pas de pitié à gaspiller" pour Darmanin
Habituellement, la ministre de la Justice garde le silence face aux attaques. Mais, mercredi matin, à la sortie du Conseil des ministres, elle est montée au créneau avec des formules particulièrement sévères à l'égard de Gérald Darmanin. "Je trouverais pitoyable que malgré son jeune âge - peut-être même du fait de son jeune âge -, sans doute à cause de la déliquescence de son parti, il en soit contraint à s'exprimer et tenir des propos qui ne soient pas éclairés par un idéal républicain, qui a quand même été porté par sa famille politique pendant un temps", estime Christiane Taubira.
Puis, la ministre décide de taper fort. "Lorsqu'une personne est à ce point pauvre, indigente moralement, politiquement, culturellement, lorsqu'une personne est à ce point indifférente aux dégâts considérables qu'il peut produire par ses paroles qui sont des insultes, qui sont surtout des déchets même de la pensée humaine, je n'en attends rien", raille-t-elle. Et la garde des Sceaux ajoute : "Je trouverais ça pitoyable, si j'avais de la pitié à gaspiller, ce n'est pas le cas pour ce monsieur !"
Acte 4 : l'UMP prend la défense de Darmanin, qui réclame la démission de la ministre
Christiane Taubira est-elle "un tract ambulant pour le Front national" ? Interrogé mardi, dans les couloirs de l'Assemblée sur la déclaration de Gérald Darmanin, le chef de file des députés UMP, Christian Jacob, a répondu : "Chacun a ses mots, mais je considère que Christiane Taubira aujourd'hui est inexistante." Une défense du bout des lèvres dans un premier temps. Mais la réplique cinglante de la ministre de la Justice change la donne. "Je trouve les propos de la garde des Sceaux ignobles, teintés de haine et de mépris. On voit que la violence est l'arme des faibles, déclare Christian Jacob, mercredi après-midi. Ne pas avoir d'autres arguments, ce n'est pas digne d'un ministre, ni, surtout, d'un garde des Sceaux."
Demande-t-il sa démission ? "Ce n'est pas à moi de demander la démission d'un ministre. C'est au Premier ministre de prendre ses responsabilités, et a minima de se désolidariser", répond le président du groupe UMP. Interrogé par LCP, mercredi après-midi, Gérald Darmanin estime, lui, que "la garde des Sceaux n’est plus digne de rester à sa place". "Madame Taubira, comme monsieur Valls hier, ont perdu leurs nerfs. (...) Le terme indigent est fait exprès pour blesser, mon histoire personnelle fait que les indigents de la République, cela me parle", ajoute le député, dont le grand-père était tirailleur algérien et la mère femme de ménage.
Acte 5 : le soufflé retombe un peu à l'Assemblée
Lors de la séance de questions au gouvernement, le député UMP du Rhône Bernard Perrut a, lui, demandé au gouvernement des excuses pour les déclarations de Christiane Taubira. Une demande restée lettre morte. En revanche, la ministre de la Justice a reçu une standing ovation de la part des élus de la majorité lorsqu'elle a été interrogée par un député socialiste.
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