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Salarié, retraité, patron... Ce que la réforme fiscale Macron risque de changer pour vous

Emmanuel Macron avait dévoilé pendant sa campagne ses mesures phares sur la fiscalité et les prélèvements obligatoires.

Article rédigé par Anne Brigaudeau
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 10min
Le candidat d'En marche ! à la présidentielle, Emmanuel Macron, visite une ferme laitière, le 16 janvier 2017 à Ploeven (Finistère). (FRED TANNEAU / AFP)

Tant bien que mal, vous venez à peine de boucler votre déclaration de revenus. Et vous vous demandez déjà à quelle sauce vous allez être mangé l'an prochain. Pendant sa campagne présidentielle, Emmanuel Macron n'a pas fait mystère de ses intentions quant à la fiscalité ou aux prélèvements obligatoires. Maintenant qu'il a accédé à l'Elysée, à quoi faut-il s'attendre ? Si le président tient ses promesses, franceinfo vous livre un petit aperçu de ce qui vous attend.

Si vous payez une taxe d'habitation 

Vous n'en paierez probablement plus. C'est l'une des promesses phares de la campagne d'Emmanuel Macron : "Nous exonérerons de taxe d’habitation quatre Français sur cinq", pouvait-on lire sur le programme d'En marche ! La mise en œuvre de cette mesure, d'un coût de 10 milliards d'euros, sera progressive avec des allègements en trois paliers, jusqu’à "un dégrèvement total en 2020 pour les foyers concernés", assure En marche !. Quels seront les bénéficiaires de cette mesure ? "Le seuil sera celui d’un revenu fiscal de référence de 20 000 euros par an et par part (soit 40 000 euros pour un couple)".

Concrètement, un couple avec deux enfants gagnant moins de 5 000 euros par mois n'aura plus à s'acquitter de cette taxe. Il pourra ainsi économiser "1 206 euros à Amiens, 1 385 euros à Marseille" ou encore "1 207 euros à Saint-Denis de La Réunion", selon En marche !. "Cette suppression va distribuer pas mal de pouvoir d'achat aux classes moyennes", analyse Xavier Timbeau, directeur de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).

Mais le bénéfice n'est pas généralisé. "Les classes populaires n'y gagneront rien, relève La Tribune. Les 20% de ménages les plus modestes sont, pour l'essentiel, déjà exonérés de taxe d'habitation". Quant au remplacement des ressources manquantes aux collectivités, l'Etat y pourvoira... "sur la base des taux 2016".

Si vous êtes marié ou pacsé

Vous pourrez "individualiser" votre impôt sur le revenu. De quoi potentiellement alléger la facture fiscale de certains ménages mariés ou pacsés, obligés de réaliser une déclaration de revenus commune. 

Plus des deux tiers des contribuables n'y gagneraient rien, selon le magazine Capital, qui cite une étude de référence du Haut conseil de la Famille datant de 2011. Mais 30% des couples à deux salaires y trouveraient un intérêt, puisqu'ils paient davantage d’impôts ensemble que s'ils vivaient seuls. C'est particulièrement vrai en cas de fort écart de salaire entre les deux conjoints. Capital prend ainsi l'exemple d'un "couple avec 4 enfants""l’un des conjoints touchant 60 000 euros, l’autre 20 000". Leur impôt atteint 3 283 euros avec une déclaration commune, et tomberait à 2 816 euros avec une imposition individualisée, soit 467 euros de moins.

Si vous êtes salarié

Votre salaire net devrait augmenter. Comment ? Les cotisations salariales à l'assurance maladie (0,75% du salaire brut) et celles pour l'assurance chômage (2,4%) seront supprimées. De quoi entraîner une augmentation de la fiche de paie équivalente à 3,15%. Une mesure financée par une hausse de 1,7 point de la Contribution sociale généralisée (CSG), un impôt plus large puisqu'assis sur l'ensemble des revenus.

Concrètement, pour une personne au smic, touchant 1 466,62 euros bruts par mois en 2016, la suppression de la cotisation maladie représente une économie de 11 euros par mois, celle sur le chômage de 35,20 euros, calcule Capital. La hausse de la CSG équivaut à 24,50 euros en moins. Le gain total serait donc de 21,70 euros par mois (35,2 + 11 – 24,5). Soit environ 260 euros par an. L'économie annuelle se chiffrerait à 533 euros pour une personne rémunérée 3 000 euros bruts par mois, à 888 euros pour une autre touchant 5 000 euros bruts.

Le programme d'En marche ! précise qu'une mesure équivalente sera prise pour dégager également "du pouvoir d’achat pour les fonctionnaires et les indépendants"

Si vous êtes retraité

Vous risquez de sentir passer l'augmentation de la CSG de 1,7 point, sauf si vous faites partie des retraités modestes, "ceux exonérés de CSG ou soumis à la CSG à taux réduit, c’est-à-dire 40% environ des retraités", assure le programme d'En marche !. 

Emmanuel Macron ne prévoit d'augmenter que le taux normal de la CSG, qui s'applique aux foyers dont les revenus annuels sont supérieurs à 14 375 euros pour un célibataire ou 22 051 euros pour un couple, rappellent Les Echos. Sur une pension de 1 500 euros par mois, 1,7 point de CSG représente près de 25 euros de prélèvement supplémentaire.

En clair, la majorité des retraités paieront plein pot la hausse de la CSG. Contrairement aux salariés, ils ne bénéficieront pas du surplus de revenu engendré par la suppression des cotisations chômage et maladie. "Cette mesure favorise les actifs au détriment des retraités, explique Xavier Timbeau. Les 60% de retraités aux pensions les plus élevées sont mis à contribution."

Si vous êtes épargnant 

"Le régime fiscal et social du livret A, de même que celui du PEA, seront maintenus inchangés", selon le site d'En marche !. Les intérêts du plus populaire des livrets d'épargne, le livret A, restent donc "exonérés d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux", tout comme (sous conditions) le Plan épargne action.

En revanche, l'assurance-vie sera davantage taxée, au-dessus d'un certain seuil. "Le régime fiscal et successoral de l'assurance-vie sera maintenu, a détaillé Emmanuel Macron dans une interview aux Echos. Toutefois, une fois le prélèvement forfaitaire de 30% entré en vigueur, il s'appliquera aux nouveaux versements sur l'assurance-vie mais seulement pour les encours d'assurance-vie supérieurs à 150 000 euros."

Si vous avez un gros patrimoine 

Avis aux plus riches d'entre vous : si vous payez l'ISF, l'impôt de solidarité sur la fortune, son calcul sera changé. Il sera remplacé par un "impôt sur la fortune immobilière" (IFI), qui prendra seulement en compte les biens immobiliers, dans les mêmes conditions que l'ISF aujourd'hui. En revanche, si vous possédez un portefeuille d'actions, elles ne seront plus assujetties à cet impôt.

Le cadeau fiscal est estimé à environ deux milliards d'euros. Mais qui avantagera-t-il ? En mars, le socialiste Christian Eckert, alors secrétaire d'Etat au Budget, assurait dans Marianne que "ceux qui en bénéficieront seront très peu nombreux… Et on sait que ceux qui paient beaucoup d’ISF sont ceux qui sont très investis en valeurs mobilières". Selon lui, seul le haut du panier (1% des foyers concernés par l’ISF, soit 3 400 contribuables) bénéficiera de cet avantage. Des chiffres "absurdes, qui ne viennent de nulle part", a rétorqué Jean Pisani-Ferry, chargé du programme à En marche !.

Une étude confidentielle relayée par Le Figaro révèle toutefois qu'avec cette réforme, les plus gros contribuables soumis à l'ISF (ceux dont le patrimoine dépasse 2,5 millions d'euros) ne seraient plus redevables que de 520 millions d'euros à l'Etat, contre 2,8 milliards aujourd'hui. De quoi confirmer en partie les calculs de Christian Eckert…

L'autre mesure controversée est la mise en place d'un "prélèvement forfaitaire unique" (PFU) sur les revenus du patrimoine mobilier (intérêts, dividendes, plus-values…). Actuellement, les ménages les plus aisés peuvent ainsi voir certains de leurs revenus du patrimoine taxés jusqu'à 60%... Ce ne sera plus le cas avec la réforme Macron, puisque le taux de son PFU sera de 30%. "Les gagnants sont les très hauts patrimoines, et les patrimoines professionnels", précise Xavier Timbeau, directeur de l'OFCE.

Si vous êtes chef d'entreprise

Vous avez droit à plusieurs gestes en votre faveur. "Nous réduirons sur le quinquennat le taux de l’IS (impôt sur les sociétés) de 33,3% à 25%. La baisse commencera dès 2018 et sera opérée graduellement", garantit le programme d'En marche !. Quant aux "petites entreprises", elles "continueront de bénéficier d’un taux réduit". 

Autre proposition en votre faveur : une baisse des cotisations sociales employeurs de six points – qui remplacera le CICE – et de dix points pour les salariés rémunérés au smic. L'objectif de cette mesure est clair : vous aider, en tant qu'entrepreneur, à embaucher davantage. Selon les calculs d'En marche !, vous pourriez ainsi économiser “près de 1 800 euros par an et par salarié au smic”, et jusqu'à 2 200 euros par an "pour un salarié payé 3 000 euros bruts par mois”. En contrepartie, Emmanuel Macron compte vous pénaliser si vous avez trop recours aux contrats courts. Vous devrez payer davantage de charges si tel est le cas, et en payerez moins si vous créez “des emplois stables”.

Si vous dirigez une micro-entreprise (avec le statut d'auto-entrepreneur), vos charges seront supprimées la première année. Les plafonds pour bénéficier de ce régime seront doublés, pour que vous puissiez bénéficier plus longtemps de ce régime fiscal. Si vous êtes artisan ou commerçant, vous pourrez décider chaque année d'opter ou non pour le régime fiscal de la micro-entreprise.

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