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Cinq graphiques pour comprendre le vote des Français aux européennes

Article rédigé par Gaël Cogné
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Un homme vote pour les élections européennes à Saint-Cloud (Hauts-de-Seine), le 25 mai 2014. (FRED DUFOUR / AFP)

Abstention, électorat du FN, immigration... Francetv info décortique une enquête d'opinion d'Ipsos/Steria pour mieux saisir les choix des Français.

"Claque", "coup de tonnerre""séisme", "tsunami", "big bang"... Au lendemain des élections européennes en France, tous les superlatifs y passent dans les médias et la bouche des politiques pour décrire les résultats du Front national (25% des suffrages). Mais que signifient-ils ? Pour y voir plus clair, francetv info a épluché les résultats d'un sondage "veille du vote" d'Ipsos/Steria. En voici les principaux enseignements.

Des abstentionnistes désabusés, qui se trouvent mal informés

 

  (IPSOS / STERIA / FRANCETV INFO)

Les chiffres. Environ 57% des électeurs ont boudé les urnes. Mais, surprise, ce n'est pas tant qu'ils ont une dent contre l'Union européenne. Non, ils trouvent surtout que ces élections ne changeront rien à leur vie quotidienne ou ne s'estiment pas assez informés sur ces élections.

L'analyse. Comme souvent, les abstentionnistes viennent "de milieux populaires, sont jeunes [73% chez les moins de 35 ans], moins intégrés dans le système", remarque d'abord Brice Teinturier, le directeur général délégué de l'institut Ipsos. Il pointe une "vaste poche de mécontentement contre le système politique", pour expliquer la défiance vis-à-vis des élections et des représentants politiques. Quant au manque d'information, il analyse : "Les européennes semblent lointaines, complexes, opaques, peu identifiées et identifiables. Le personnel politique européen est mal connu. La campagne n'a pas permis de révéler une controverse tranchée. Ainsi, ces élections étaient illisibles pour certaines catégories d'électeurs."

 

Le FN a été porté par un vote populaire et l'adhésion des jeunes

Les chiffres. Selon ce sondage Ipsos/Steria, le Front national a été porté par les moins de 60 ans. Précisément là où l'UMP peine à renouveler son électorat vieillissant. Par ailleurs, la formation de Marine Le Pen a été portée par un électorat populaire : 43% des ouvriers et 38% des employés ont voté pour le FN. D'ailleurs, le parti frontiste arrive nettement en tête des intentions de vote dans les foyers avec moins de 20 000 euros brut par an (30%) ainsi qu'entre 20 000 et 30 000 euros brut par an (31%).

L'analyse. La composition de l'électorat FN, plutôt jeune et populaire, évoque celle des abstentionnistes. "Il y a des zones de recouvrement, note Brice Teinturier. Ils ont en commun leur scepticisme, mais, à la différence des abstentionnistes, les électeurs du FN veulent activement manifester leur mécontentement." "La composition de l'électorat frontiste est conforme à ce que l'on connaît", poursuit le politologue. Toutefois, il relève que "les professions intermédiaires sont maintenant prêtes à voter FN dans des proportions importantes (20%). On remarque que jusqu'aux moins de 60 ans, c'est le FN qui mobilise le plus. On le savait mais c'est amplifié. Finalement, nous sommes dans une configuration où les résultats du FN sont amplifiés".

L'immigration a été au centre des motivations de vote

  (IPSOS / STERIA / FRANCETV INFO)

Les chiffres. L'immigration a été au centre des préoccupations des Français. Dans l'enquête d'opinion Ipsos/Steria, 31% estimaient que ce thème représentait le principal enjeu du scrutin. Ce chiffre s'élève à 64% chez les sympathisants FN.

L'analyse. Curieusement, si le Front national a peu parlé de l'immigration pendant cette campagne, c'est notamment pour ses positions sur la question qu'il est arrivé en tête. "Ce n'est pas surprenant, selon Brice Teinturier. Depuis toujours l'immigration est le marqueur mobilisateur du FN. L'électorat est obnubilé par cette question. Le Front national n'a même plus besoin de faire campagne là-dessus. Il lui suffit d'évoquer les frontières de l'Europe, les Roms, pour réactiver le moteur premier du FN. Certes, le parti surfe sur la question sociale, mais son moteur premier reste l'autre, l'étranger, le sentiment qu'on ne serait plus chez soi. Marine Le Pen n'a plus besoin de beaucoup parler d'immigration."

Les votants se préoccupent de l'Europe, sauf au FN 

 

Les chiffres. Majoritairement, les sondés ont dit se préoccuper d'abord des propositions des partis sur les questions européennes (61%), surtout chez les sympathisants écologistes (82%), socialistes (79%) ou centristes (76%). Il n'y a qu'au FN qu'on s'en détourne. Ils sont 58% à affirmer se préoccuper d'avantage des questions nationales.

L'analyse. Pour le politologue, en votant FN, les électeurs parlent de "ce qui les préoccupe prioritairement. Ils ont une lecture hexagonale et ont choisi le vote sanction" à l'égard des autres partis. Quelque part, cette élection a été plus nationale qu'européenne, pour eux. D'ailleurs, 64% des sondés estiment qu'"il faut renforcer les pouvoirs de décision de notre pays, même si cela doit conduire à limiter ceux de l'Europe". Ils ne sont que 22% à penser le contraire.

Les électeurs du FN ont voulu sanctionner le gouvernement, mais pas que...

 

Les chiffres. Encore une fois, les électeurs du Front national sont en décalage avec le reste des votants. 58% des électeurs sondés ne voulaient manifester ni leur soutien, ni leur opposition au président et au gouvernement. Mais les sympathisants Front national sont très nombreux à avoir dit leur mécontentement de l'exécutif : 69%.

L'analyse. Pour Brice Teinturier, "c'est un vote sanction généralisé. D'abord, le niveau de la gauche est historiquement bas. Moins de 35% pour l'ensemble du bloc de gauche. C'est une catastrophe pour le PS". En effet, rappelle Mediapart, la gauche a fait pire qu'en 1984 et 1994 (39%). "Mais c'est aussi une catastrophe pour l'UMP. Elle fait à peine 20% alors qu'elle est dans l'opposition." Pour lui, les responsables de droite sont perçus comme "pas crédibles". 62% des sondés pensent que si l'UDI ou l'UMP venait au pouvoir, les deux formations politiques ne feraient "ni mieux, ni moins bien" que le gouvernement de Manuel Valls. Bref, "la deuxième sanction est contre l'UMP", juge le politologue. 

 

* Sondage réalisé pour France Télévisions du 22 au 24 mai auprès de 2 048 personnes constituant un échantillon national représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus.

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