"Beaucoup de questions sur la table", inquiétude face à des "positions d'austérité violentes"... Les syndicats réagissent à la nomination de Michel Barnier

Connu pour être homme de dialogue, le nouveau Premier ministre a déclaré lors de son discours de passation avoir "beaucoup de respect" à l'égard des partenaires sociaux. Ces derniers ont rapidement réagi.
Article rédigé par franceinfo
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Michel Barnier, le jeudi 6 septembre 2024, lors de la passation de pouvoir à Matignon. (SARAH MEYSSONNIER / POOL)

Et maintenant, "au travail" : le poncif qui conclut tous les discours de passation de pouvoirs avait des allures de défi pour Michel Barnier jeudi 5 septembre dans la cour de Matignon. Tout juste nommé à Matignon, où il a promis "des changements et des ruptures", le nouveau Premier ministre doit désormais s'atteler à composer un gouvernement susceptible de démontrer sa capacité à rassembler et à s'émanciper d'Emmanuel Macron.

Chargé par le président de la République de "constituer un gouvernement de rassemblement au service du pays", le Savoyard de 73 ans se sait déjà en sursis et va devoir trouver les bons équilibres pour ne pas tomber à la première motion de censure. Les partenaires sociaux se montrent également sur leurs gardes. La CFDT déclare ainsi prendre "acte de la nomination de Michel Barnier", dans un communiqué. "La nomination d’un Premier ministre était urgente au regard de la grande responsabilité dont a fait preuve la population dans les urnes". Mais pour Solidaires, cette nomination "ne répond pas aux urgences sociales et écologiques".

"Cette nomination remet le Rassemblement national au centre du jeu" politique, estime vendredi 6 septembre sur France Inter Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT. Elle "s'inscrit à l'inverse du résultat des élections législatives", marquées par une "mobilisation historique" pour "empêcher le RN d'entrer à Matignon"

Selon elle, le Rassemblement national aura désormais le "pouvoir de vie ou de mort" sur le gouvernement, "car c'est leur vote qui fera basculer une possible motion de censure", affirme-t-elle. La syndicaliste s'inquiète également des "positions d'austérité violentes" que portent Les Républicains, le parti de Michel Barnier. Elle estime qu'il faut, au contraire, "une rupture avec la politique économique et sociale d'Emmanuel Macron", qui a été "sanctionnée" par les électeurs lors des législatives le 7 juillet dernier. 

"Un signal positif" pour la CFTC

La Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) et la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) saluent en revanche un homme de dialogue. Jean-Eudes du Mesnil du Buisson, secrétaire général CPME se dit "soulagé" sur France Inter vendredi 6 septembre. "La situation ne pouvait pas perdurer comme elle était. On avait une forme d'attentisme du côté des entreprises, ça se ressentait sur l'activité économique, et en même temps on avait une surenchère de gens qui proposaient d'augmenter les impôts, le Smic, ça suscitait une inquiétude." Il ajoute que le Premier ministre est "un homme d'expérience", selon lui, "qui a montré sa capacité de négocier et on va probablement en avoir bien besoin"

Cyril Chabanier, président de la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC), a salué sur franceinfo "un signal positif". Il y voit "un changement de méthode même qui a été évoqué clairement dans son discours". Cyril Chabanier estime que son expérience européenne fait de lui un homme de dialogue : "Michel Barnier est quelqu'un de compétent, de respectueux du dialogue social et habitué, y compris dans ses fonctions qu'il a eues à l'Europe, à être dans le compromis", a-t-il expliqué.

Michel Barnier a d'ailleurs évoqué lors de la passation de pouvoirs avec Gabriel Attal sa mère chrétienne, de gauche. Une référence bien accueillie par le président du CFTC : "Ces valeurs que nous partageons permettent d'être dans un moment d'apaisement, on en a besoin, de dialogue, d'écoute et de recherche du compromis plutôt que d'affrontement".

Le dossier brûlant des retraites

Il a de "bonnes capacités" d'écoute estime de son côté François Hommeril, le président de la CFE-CGC qui attend tout de même d'être convaincu sur les gros dossiers. Même analyse du côté de Jean-Eudes du Mesnil du Buisson du CPME affirme que "La mère de toutes les batailles, maintenant, c'est le sujet des finances publiques". Il attend désormais que "des mesures courageuses" soient prises à ce niveau-là. "Il y a une chose dont on ne veut pas entendre parler, c'est de céder à la facilité en se contentant simplement d'augmenter les prélèvements obligatoires et de taxer davantage les entreprises."

Cyril Chabanier, lui, espère rencontrer le nouveau Premier ministre rapidement, car "il y a beaucoup de questions sur la table", notamment des sujets qui fâchent comme la réforme des retraites. Il continue de demander son retrait, mais a "peu d'espoir". En revanche, le leader de la CFTC semble plus optimiste sur la réforme de l'assurance chômage. "J'ai beaucoup plus d'espoir de pouvoir trouver des compromis", a-t-il estimé.

Les intentions sont plus radicales pour l'Union nationale des syndicats autonomes (UNSA) sur le dossier des retraites. "S'il n'y a pas de 'bougé' sur cette réforme, ce sera un problème" prévient Laurent Escure, le secrétaire général de l'UNSA.

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