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Tribune Greenpeace : "Macron ne nous enthousiasme pas et Le Pen s'oppose à nos valeurs"

Dans une tribune publiée par franceinfo, l'ONG Greenpeace France renvoie dos à dos les propositions écologistes des deux candidats de la présidentielle. 

Article rédigé par franceinfo - Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France
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Publié Mis à jour
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Des panneaux électoraux à l'entre-deux-tours de la présidentielle 2017.  (ROBERT PRATTA / REUTERS)

L'écologie n'a pas passé le premier tour. Très présentes dans les programmes de certains candidats, comme Jean-Luc Mélenchon ou Benoît Hamon, les questions environnementales occupent une faible place dans ceux des deux finalistes de la présidentielle, Emmanuel Macron et Marine Le Pen. Aucun des deux n'a d'ailleurs choisi de s'attarder sur le sujet depuis le premier tour. A quelques heures du débat d'entre-deux-tours, Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France, juge sévèrement leurs programmes écologiques dans une tribune publiée sur franceinfo. Il s'exprime ici librement.

L’environnement n’a pas été traité à la hauteur de ses enjeux pendant cette campagne électorale. Alors que la crise climatique s’intensifie et que la pollution de l’air atteint des taux inégalés dans beaucoup de métropoles mondiales, l’écologie ne s’est pas imposée dans les débats. Pourtant, pour la première fois, trois candidats –Benoît Hamon, Jean-Luc Mélenchon et Philippe Poutou– avaient placé cette question au cœur de leur programme en s’engageant notamment pour une sortie totale du nucléaire.

C’est seulement dans l’entre-deux-tours que plusieurs médias ont pris le temps d’aborder plus en profondeur cet aspect des programmes des deux derniers candidats. Mieux vaut tard que jamais, diront les plus optimistes d’entre nous. Dans tous les cas, l’occasion est belle de s’attarder sur les promesses d’Emmanuel Macron et de Marine Le Pen dans le domaine.

"Aucun des deux ne nous enthousiasme"

Autant le dire d’emblée, aucun des deux ne nous enthousiasme. Ni le candidat d’En marche ! ni la présidente du Front national n’ont, semble-t-il, perçu la nécessité d’entamer au plus vite une véritable transition écologique qui passe notamment par une remise en cause des modèles économiques dominants. Nous sommes convaincus que les menaces environnementales d’aujourd’hui représentent autant de solutions à mettre en œuvre pour surmonter les crises sociales et économiques subies par nos sociétés. 

La transition énergétique qui repose sur la sobriété de notre consommation et l’efficacité de nos productions, la rénovation des bâtiments et le déploiement massif des énergies renouvelables est bien plus prometteuse d’emplois et de relance économique que la poursuite dans l’impasse du tout-nucléaire. De la même manière, une profonde mutation du modèle agricole intensif et industriel au profit d’une agriculture écologique est indispensable pour notre environnement, nos sols, nos eaux et notre nature, mais aussi pour les agriculteurs et leurs familles. Si l’on regarde le monde entier, s’attaquer sérieusement et avec détermination aux causes du dérèglement climatique est un préalable indispensable à l’apaisement des conflits et à la prévention de nouveaux déplacements majeurs et forcés de populations.

Aucun de ces trois enjeux dont dépend tellement notre quotidien demain n’est une réelle priorité dans les programmes des deux candidats et nous le regrettons.

Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France

"Les enjeux environnementaux ne se règlent pas retranchés derrière des murs ou des frontières"

Evacuons rapidement la question de savoir si Marine Le Pen s’est découvert un engagement écolo soudain… Ce n’est pas le cas ! Son concept "d’écologie patriote" ne trompe personne. Les enjeux environnementaux ne se règlent pas retranchés derrière des murs ou des frontières. Personne ne pourra résorber la crise climatique, protéger les océans ou empêcher la déforestation en se repliant à l’intérieur d’un territoire fermé au monde. Cette vision est un non-sens d’un point de vue écologique. Elle l’est tout autant que l’engagement de Marine Le Pen à vouloir poursuivre dans la voie du nucléaire, tout en développant les énergies renouvelables… mais pas toutes ! La candidate du FN aspire à un moratoire immédiat sur l’éolien qui tuerait dans l’œuf une transition énergétique naissante.

Mais "l'écologie patriote" de Marine Le Pen témoigne également d’une vision particulièrement égoïste et excluante, qui est diamétralement opposée à celle de Greenpeace sur le terrain des valeurs. Nos valeurs d’ouverture, de diversité, de solidarité, d’humanisme et de non-violence sont profondément menacées par le projet dangereux du Front national. 

La patronne du FN doit aussi vivre dans une bulle à l’abri de toute pollution vu qu’elle ne propose rien concernant la régulation du diesel ni aucune diminution du transport routier.

Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France

Pour Marine Le Pen, l’environnement n’est que le support d’une tactique politique destinée à élargir son électorat. Le coup de gueule des associations locales lorsque la candidate a tenté de récupérer la lutte historique contre les "boues rouges" déversées dans la Méditerranée en est la plus récente illustration.

"Il faut que Macron nous explique comment il compte s'y prendre"

De son côté, Emmanuel Macron tente de se positionner en champion du climat. Dès le début de sa campagne, il a rappelé son attachement à l’accord de Paris obtenu en décembre 2015 et son envie de placer cet enjeu au cœur des missions du réseau diplomatique de la France. C’est déjà le cas depuis 2013, mais tant mieux si le candidat d’En marche ! souhaite poursuivre dans cette voie. Tant mieux aussi s’il rappelle son attachement à la loi de transition énergétique et à la réduction prévue du nucléaire à 50% d’ici 2025.

En revanche, il faut qu’il nous explique comment il compte s’y prendre. En 2012, François Hollande avait promis la fermeture d’une seule centrale et il n’y est pas parvenu. Nous ne nous contenterons pas de nouvelles promesses, surtout s’il s’agit de soutenir l’ouverture des EPR de Flamanville en Normandie et d’Hinkley Point en Angleterre, comme le fait Emmanuel Macron. S’il veut être pris au sérieux sur ces sujets, Emmanuel Macron doit préciser sa pensée et dévoiler dès maintenant son plan d’action, y compris concernant l’avenir de l’entreprise EDF.

La "réelle ambiguïté" d'Emmanuel Macron sur l'agriculture

Un autre engagement porté par le candidat concerne la mise en place d’un "Grenelle de l’alimentation". Aucune raison de s’en réjouir tant que nous n’en savons pas plus sur les objectifs et la vision des transformations agricoles nécessaires selon Emmanuel Macron. 

A ce stade, le candidat entretient une réelle ambiguïté, évoquant les dangers des pesticides tout en soutenant la FNSEA et le modèle agricole toxique porté par le syndicat majoritaire.

Jean-François Julliard, directeur  général de Greenpeace France

Au plan international, si Marine Le Pen a refusé de ratifier l’accord de Paris, Emmanuel Macron a quant à lui exprimé son soutien au CETA, le traité de libre-échange entre le Canada et l’Union européenne dont les conséquences néfastes pour l’environnement et la santé ont été largement dénoncées. L’Europe a apporté son lot de mesures positives (sur la qualité de l’eau, la réduction des émissions de gaz à effet de serre, l’interdiction de produits chimiques, etc.) mais il est temps de pousser les institutions européennes à aller plus loin. Emmanuel Macron ne doit pas se contenter de rappeler son attachement à l’Europe. Il doit nous expliquer comment il compte s’y prendre pour ramener de la justice sociale, de l’égalité dans nos droits et de la solidarité sur le Vieux continent. Ce n’est qu’à ce prix, et en intensifiant nos efforts dans tous ces domaines, que notre environnement sera renforcé. 

Voilà pourquoi aucun des deux candidats ne nous paraît à la hauteur des enjeux écologiques de notre époque

Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France

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