Présidentielle : mais pourquoi Vincent Peillon est-il candidat à la primaire de la gauche ?
Sa candidature vous a surpris ? Franceinfo tente d'expliquer les dessous de ce retour inattendu de l'ancien ministre de l'Education nationale.
L'information a surpris tout le monde ou presque. Vincent Peillon est candidat à la primaire de la gauche. Après avoir passé plus de deux ans en retrait de la scène politique nationale, l'ancien ministre de l'Education nationale, actuellement député européen, vient d'officialiser sa décision lors du journal télévisé de France 2, dimanche 11 décembre. Franceinfo vous explique les raisons de cette candidature.
Le retrait de Hollande lui ouvre la voie
Pour Vincent Peillon, tout commence le jeudi 1er décembre au soir, quand François Hollande annonce sa décision de ne pas être candidat à sa réélection. Un scénario sur lequel personne, sauf peut-être Manuel Valls, n'avait misé. La décision du président rebat toutes les cartes à gauche. "Tout est une question de moments dans la vie politique, (...) ça crée des conditions beaucoup plus favorables pour la candidature de Vincent Peillon", estime un proche.
"L'électrochoc" du départ de Hollande ouvre un espace politique, entre Montebourg et Valls. "Il manquait quand même, dans cette primaire, le cœur de la social-démocratie française", dit un député qui soutient l'ancien ministre. "Peillon peut incarner le point d'équilibre de la gauche, dit un autre soutien, il n'a pas participé à tout ce qui a marqué négativement la gauche –déchéance ou 49.3."
Dans ma circonscription, cela fait une semaine que j'entends : on ne veut pas de Valls ni de Montebourg.
Il prend la place que les autres ne voulaient pas
Pour éviter le choix d’un vote entre Manuel Valls et Arnaud Montebourg, de nombreux socialistes tentent donc de faire émerger une troisième voie. De nombreux noms circulent, de Ségolène Royal à Najat Vallaud-Belkacem en passant par Bertrand Delanoë, mais aucun ne se détache. Christiane Taubira, qui est sollicitée par des parlementaires et par une pétition, ne semble pas décidée à se lancer. Reste Marisol Touraine, dont beaucoup espèrent la candidature, mais la ministre de la Santé jette également l’éponge. "Elle représentait une certaine image de la gauche et elle a un bilan", regrette un aubryste.
Vincent Peillon, lui, a bien une idée. D’après l'un de ses proches, il songe immédiatement à la possibilité de se présenter quand François Hollande renonce, le 1er décembre. "Il teste l’hypothèse dès le week-end suivant, en appelant des parlementaires et des élus locaux. Et quand l’information commence à sortir dans la presse, il reçoit plein d’appels, de messages de soutien ou de promesses de ralliement." Parmi eux, le député socialiste Patrick Mennucci : "On est plusieurs à l’avoir appelé pour le sonder sur ce nouvel espace existant entre ceux qui ont honni pendant trois ans François Hollande et la ligne droitière de Manuel Valls."
Avec quelques députés proches de Vincent Peillon, Patrick Mennucci consulte alors dans les couloirs de l'Assemblée, comme le confirme Pascal Terrasse, un ami de longue date de l’ancien ministre. Ce député socialiste manque d’ailleurs de tomber de sa chaise en apprenant la nouvelle.
Je ne comprends pas le sens de cette candidature, si ce n'est pour faire plaisir à Aubry, Royal, Taubira ou Hidalgo, qui ne veulent ni de Valls, ni de Montebourg. Ils sont allés chercher Taubira, Touraine... et ça n’a pas marché, donc ils ont tout fait pour faire monter Peillon.
Il est capable de rassembler
Pour ses soutiens comme Patrick Mennucci, Vincent Peillon peut porter une candidature au centre de la gauche : "C’est un homme politique de bon niveau qui peut incarner la social-démocratie dont nous avons besoin, capable de gouverner mais qui reste fidèle à ses valeurs". S’il y arrive, Vincent Peillon pourra rassembler plus facilement qu'Arnaud Montebourg, que rejette l’aile réformiste du PS, et Manuel Valls, qui hérisse l’aile gauche.
D’autant plus que Vincent Peillon, Arnaud Montebourg et Benoît Hamon se connaissent par cœur : ils ont fondé ensemble le Nouveau parti socialiste en 2003. "Le grand avantage de Peillon, c’est qu’il est compatible avec Montebourg et Hamon, ils ont longtemps travaillé ensemble, assure un soutien du député européen. C’est un atout politique majeur. Dans la perspective du deuxième tour, il peut sceller des alliances, ce qui est beaucoup plus difficile pour Montebourg et pour Valls."
On ne sait jamais, il peut nous faire 'une Fillon', car une primaire se gagne sur ses fondamentaux, et il est solide sur ses bases.
Il veut prendre sa revanche
Au Parti socialiste, comme dans tous les partis, il y a le positionnement politique, mais aussi les relations personnelles. Nul doute que voir ses ex-compagnons du Nouveau parti socialiste, Hamon et Montebourg, concourir à la primaire, a fait partie des motivations de Vincent Peillon. Sans compter le ressentiment qu’il a pu ressentir après avoir dû quitter le ministère de l’Education nationale quand Manuel Valls a pris Matignon. "Peillon vient pour se venger de Valls, persifle un haut dirigeant socialiste, son prochain polar [Peillon écrit des romans], il pourrait l’appeler Meurtre au PS."
Au-delà de la primaire, Vincent Peillon a sans doute aussi en tête, comme tous ses concurrents, l’avenir du PS. "J’attends de voir si sa candidature porte un projet, ou si elle consiste à faire de cette primaire un congrès du PS", dit ainsi la députée Marie-Arlette Carlotti. Qui récupérera le parti en cas de défaite à la présidentielle ? Quelle ligne s’imposera ? Une partie de la réponse se joue dès la primaire de janvier.
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