Recherche d'un Premier ministre : pourquoi la réforme des retraites est au cœur des négociations

Article rédigé par franceinfo
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Le président Emmanuel Macron lors d'une conférence de presse à Belgrade (Serbie), le 29 août 2024. (ALMIR HAMZAGIC / AFP)
La loi repoussant l'âge de la retraite à 64 ans pourrait être remise en cause par les députés élus aux législatives anticipées alors qu'Emmanuel Macron souhaite vivement la conserver pour son héritage politique.

C'est "une ligne rouge" pour chaque bord politique. Alors qu'Emmanuel Macron continue ses consultations en vue de nommer un Premier ministre, mercredi 4 septembre, un élément apparaît comme bloquant : la remise en cause de la réforme des retraites adoptée en 2023. Celle-ci avait repoussé l'âge légal de départ à la retraite à 64 ans. Très impopulaire, elle était jugée nécessaire par le camp macroniste et avait provoqué de longs mois de manifestations. 

A gauche, le Nouveau Front populaire (NFP) et ses 193 députés ont fait de l'abrogation de la loi l'un des thèmes phares de la campagne des législatives, son programme promettant un "objectif commun du droit à la retraite à 60 ans". Depuis le refus du président de nommer Lucie Castets, pourtant choisie par l'alliance de gauche pour Matignon, La France insoumise et Les Ecologistes-EELV n'ont pas fait évoluer leur position sur ce sujet. Seul le Parti socialiste se montre un petit peu plus divisé, notamment face à une possible nomination de Bernard Cazeneuve, le dernier Premier ministre du mandat de François Hollande.

Sur Radio J, le député socialiste Jérôme Guedj se disait ainsi en faveur d'un "gel" plutôt que d'une "abrogation" de la réforme. Si Bernard Cazeneuve "obtient l'abrogation, je réfléchirai, bien sûr", assurait en écho le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, sur BFMTV. Le lendemain, le bureau national du parti s'est montré plus ferme, en réitérant sa volonté d'abroger la réforme, dans une lettre explicitant les lignes rouges des socialistes en cas de soutien à un Premier ministre autre que Lucie Castets.

Les macronistes refusent tout retour en arrière...

La position socialiste complique grandement toute discussion potentielle avec le camp présidentiel. Certaines voix – minoritaires – avaient fait pourtant fait preuve d'un peu d'ouverture sur le sujet. Sur LCI, François Bayrou, le président du MoDem, s'est dit "persuadé" de pouvoir "trouver mieux comme équilibre". Dimanche, la présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet affirmait sur France Inter qu'elle "ne ferme pas la porte" à des aménagements, particulièrement sur la "pénibilité". Une façon de donner des gages aux députés socialistes dans le cas d'une nomination de Bernard Cazeneuve.

Mais surtout, une majorité du camp macroniste refuse d'entendre parler d'un retour en arrière. "Nous l'avons toujours dit, c'est une ligne rouge pour nous et ce n'est pas un plaisir de le faire. On n'a pas d'autre chemin que de faire en sorte de travailler un peu plus", a ainsi assuré le député Sylvain Maillard sur franceinfo mardi. "Je m'opposerai à toute suppression de la réforme des retraites ou de la loi immigration", a renchéri Benjamin Haddad sur France 2. L'ancien Premier ministre Edouard Philippe a même affirmé être pour la retraite à 67 ans, dans sa déclaration de candidature à la présidentielle.

... mais une majorité de députés veulent l'abroger

Au-delà des négociations entre blocs politiques, la nomination d'un Premier ministre qui promettrait d'abroger la réforme des retraites par Emmanuel Macron n'est pas la plus probable, tant le chef de l'Etat semble décidé à préserver son héritage politique. Bernard Cazeneuve, qui s'est entretenu avec le président lundi, a-t-il fait du sujet l'une de ses lignes rouges comme certains médias l'ont expliqué ? "C'est un homme de gauche et responsable", répond son entourage à franceinfo, sans donner plus de précisions.

De quoi pousser le chef de l'Etat à chercher une solution à droite, avec Xavier Bertrand, le président de la région Hauts-de-France. Le maintien de la réforme fait en effet partie des priorités du "pacte législatif d'urgence" proposé par les troupes de Laurent Wauquiez, malgré les divisions qui étaient apparues chez Les Républicains lors du vote. Même si le prochain Premier ministre est favorable à la réforme des retraites, il devra faire face à une Assemblée nationale majoritairement pour son abrogation.

Cette question devrait donc très rapidement revenir au cœur des débats, d'autant que la proposition faisait partie du programme du Rassemblement national lors des législatives. "Nous proposerons l'abrogation de la réforme des retraites le 31 octobre", a d'ailleurs promis le député d'extrême droite Sébastien Chenu sur BFMTV. Les 126 voix RN pourraient donc se joindre à celles du NFP pour remettre en cause l'un des symboles du second mandat d'Emmanuel Macron.

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