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Harlem Désir, la nomination la plus polémique du nouveau gouvernement

L'ancien premier secrétaire du Parti socialiste est devenu secrétaire d'Etat aux Affaires européennes. Et cela ne plaît pas à tout le monde. 

Article rédigé par franceinfo
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Harlem Désir, alors premier secrétaire du Parti socialiste, à l'Assemblée nationale pour une réunion avec les parlementaires socialistes, mardi 8 avril 2014.  (FRED DUFOUR / AFP)

Le nouvel exécutif est officiellement opérationnel. Le secrétaire général de l'Elysée sortant, Pierre-René Lemas, a annoncé, mercredi 9 avril, le nom des 14 secrétaires d'Etat qui viennent en renfort des 16 ministres du gouvernement de Manuel Valls

Parmi les nouveaux venus, c'est Harlem Désir qui suscite le plus de commentaires de part et d'autre du spectre politique. Si le but affiché de ce remaniement était de répondre à la débâcle socialiste aux municipales, la nomination du secrétaire national du parti aux Affaires Européennes fait grincer des dents à deux mois des élections européennes. Revue de commentaires. 

Une "exfiltration" de la tête du PS 

Secrétaire d'Etat aux Affaires européennes, Harlem Désir quitte la tête du PS un an et demi seulement après son arrivée, avec dans son attaché-case, un bilan qui n'a pas convaincu à gauche. A commencer par François Hollande : "Le parti ne travaille pas. Harlem n’est pas à la hauteur. Il faut le changer. Il porte une responsabilité dans la défaite des municipales", a déclaré le chef de l'Etat, selon Le Canard Enchaîné de mercredi. Déjà en novembre 2013, le président de la République avait taclé le premier secrétaire du PS, poursuit Le Lab d'Europe 1. "Harlem Désir ferait mieux de se trouver un nouveau job", a-t-il dit, toujours selon le Canard. 

S'il est par ailleurs défendu par certains, comme Malek Boutih, pour qui le résultat des municipales s'explique avant tout par le "bilan gouvernemental", les commentaires évoquent davantage une "exfiltration" qu'une promotion. Certes, Harlem Désir a hérité d'un PS dans lequel il fallait trouver le juste milieu entre soutien au gouvernement et expression d'une voix autonome dans les débats politiques. Mais pour l'opposition, cette nomination apparaît comme une drôle de porte de sortie. 

Pas assez assidu au Parlement européen  

Cependant, le député européen Harlem Désir, élu en 1999 puis réélu en 2004 et 2009, dispose du CV adéquat pour ce portefeuille justement centré sur les Affaires Européennes. Mais son fort taux d'absentéisme aux sessions parlementaires, relevé par le site VoteWatch.eu, donne du grain à moudre à ses détracteurs : son taux de participation s'élève à 48,69%. 

 Un portefeuille ingérable

Par ailleurs, les Affaires Européennes font figure de portefeuille maudit. Douze secrétaires d'Etat s'y sont succédé depuis 2002. Depuis l'élection de François Hollande, Bernard Cazeneuve l'a occupé avant de passer au Budget puis à l'Intérieur, suivis de Thierry Repentin, désormais absent du gouvernement. 

Ainsi, pour L'Express.fr, "Harlem Désir hérite de fait d'une coquille vide... dans la mesure où c'est l'Elysée qui pilotera les Affaires européennes." Pas vraiment un cadeau.

Une condamnation qui fait tache 

Il y a une tache dans la carrière d'Harlem Désir, que l'opposition ne manque pas de rappeler. En 1998, le secrétaire d'Etat a été condamné à 18 mois de prison avec sursis pour recel et abus de biens sociaux. En cause, son emploi fictif comme formateur dans une association lilloise entre novembre 1986 et octobre 1987, alors qu'il occupait la présidence de SOS-Racisme, rappelait Le Monde.fr au moment de son élection à la tête du PS. 

Cette nomination fait d'autant plus jaser dans l'opposition que François Hollande, lors de sa campagne, avait indiqué dans sa célèbre tirade du "moi, président de la République", qu'il ne s'entourerait pas de personnes jugées et condamnées.

Une succession hâtive à la tête du PS 

La fronde à l'encontre de la direction du Parti socialiste montait depuis les municipales. Cependant, Harlem Désir avait écarté toute idée de démission ou de congrès extraordinaire du PS, comme l'avait demandé le député des Landes Henri Emmanuelli.

Nommé mercredi secrétaire d'Etat du gouvernement Valls, il a ainsi "proposé", devant l'exécutif du Parti socialiste, le nom de Jean-Christophe Cambadélis pour lui succéder à la tête du PS. L'instance dirigeante du PS, le Bureau national (BN), se réunit mercredi soir, mais la proposition a provoqué la colère de l'aile gauche du parti, rapporte Le JDD.fr. "J’aime être sûr que ce qui se passe au PS soit décidé au PS", a ainsi tonné Guillaume Balas, le chef du courant de Benoît Hamon, cité par le site de l'hebdomadaire. Marie-Noëlle Lienneman a quant à elle dénoncé un "coup d'Etat". 

Selon une bonne source au PS, le BN procèdera donc à la "désignation d'une direction provisoire" qui sera ensuite entérinée par le Conseil national ou parlement du parti, qui se réunit le 15 avril. "Le premier secrétaire tirant sa légitimité des militants, leur vote est nécessaire, mais pas tout de suite" et "un congrès extraordinaire n'est pas forcément nécessaire", explique cette source au milieu du brouhaha. 

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