Remaniement : en séparant Economie et Finances, Bercy se cale sur le modèle allemand
Michel Sapin a hérité du ministère des Finances, et Arnaud Montebourg de celui de l'Economie.
C'est une quasi-première. Alors que ces deux pôles sont habituellement regroupés, François Hollande a nommé, mercredi 2 avril, Michel Sapin ministre des Finances et Arnaud Montebourg ministre de l'Economie.
Dans l'histoire récente, le gouvernement a toujours compté un ou une ministre de l'Economie et des Finances, flanqué(e) d'un ou une ministre du Budget, délégué ou pas. Seule exception, entre 1993 et 1995, un duo avec Edmond Alphandéry ministre de l'Economie seulement, et Nicolas Sarkozy ministre du Budget (et non des Finances).
Cette séparation inédite soulève un certain nombre de questions. Qui se rendra à Bruxelles pour y porter la voix de la France devant l'Union européenne ? Et dès la semaine prochaine, quel ministre participera aux assemblées de printemps de la Banque mondiale et du FMI à Washington ? La question n'est pour l'heure pas tranchée officiellement, même si la logique voudrait que Michel Sapin, chargé des Finances et des Comptes publics, joue ce rôle jusqu'ici dévolu à Pierre Moscovici.
En Allemagne, cette répartition des tâches fonctionne
Jeter un coup d'œil de l'autre côté du Rhin peut toutefois fournir un éclairage. Depuis de longues années, il est en effet de coutume qu'au sein du gouvernement allemand cohabitent deux ministres, l'un des Finances, l'autre de l'Economie. Traditionnellement, ces postes sont souvent occupés par des membres de partis différents, voire adversaires, en fonction du jeu des coalitions.
C'est le cas actuellement dans le gouvernement d'Angela Merkel : le conservateur Wolfgang Schäuble tient les Finances et défend les positions allemandes à l'étranger, et le social-démocrate Sigmar Gabriel contrôle l'Economie et l'Energie. Et le tandem fonctionne, comme d'autres avant, grâce à une séparation stricte des pouvoirs. Schäuble, Européen fervent, ne s'aventure pas à visiter des entreprises ou à rencontrer des patrons. Gabriel, qui dans l'opposition ne s'est pas privé de plaider pour une Europe plus soucieuse de croissance, préfère lui vanter les investissements qu'il pilote, plutôt que de commenter les budgets de son collègue.
Le Commerce extérieur pourrait gripper la mécanique
Reste à savoir si, à Paris, les mêmes règles du jeu prévaudront, entre le bouillant Arnaud Montebourg, qui clame volontiers sa défiance vis-à-vis de Bruxelles, et un Michel Sapin plus pondéré. Tout en rejetant l'austérité forcenée, ce dernier est considéré comme plus en phase avec le positionnement social-démocrate de l'Elysée.
Le jeu pourrait encore se compliquer avec l'intervention d'un troisième homme, Laurent Fabius. Le ministère des Affaires étrangères a fait savoir, mercredi, qu'il prenait en charge les dossiers du Commerce extérieur, alors que dans l'entourage de Montebourg, on assure que c'est ce dernier qui sera aux manettes.
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