Pourquoi les vaccins n'ont pas fini de faire parler d'eux
Une association est en grève de la faim depuis dix-neuf jours contre la présence de sels d'aluminium dans les vaccins. Une polémique de plus dans l'histoire de la vaccination.
Une polémique de plus dans l'histoire des vaccins. L'Agence du médicament (ANSM) a annoncé, jeudi 13 décembre, qu'elle allait financer une étude sur les sels d'aluminiums dans les vaccins. Mais pour l'association E3M, dont certains membres ont entamé une grève de la faim le 26 novembre dernier, cette annonce est insuffisante. Ses revendications : davantage de recherches sur le sujet et le retour des vaccins sans aluminium sur le marché.
E3M est une association de malades atteintes par la myofasciite à macrophages, une maladie rare qui se caractérise par des lésions musculaires entraînant parfois de lourds handicaps. Selon elle, les sels d'aluminium utilisés comme adjuvants dans la plupart des vaccins sont responsables de cette pathologie. Didier Lambert, le président de E3M, contacté par francetv info, estime même qu'ils causent "beaucoup d'autres maladies" et que la myofasciite à macrophages n'est que la face émergée de l'iceberg.
Un déficit d'études sur la question
L'unité de recherche de l'hôpital Henri Mondor (Créteil) a observé qu'une partie de l'aluminium vaccinal pouvait migrer dans le cerveau. Selon le professeur Gherardi, membre de l'unité, certains patients au "terrain génétique" particulier développent des lésions musculaires et cérébrales à cause de ces sels. L'association E3M s'appuie sur ses travaux, mais aussi sur ceux de plusieurs chercheurs étrangers, rappelle son communiqué.
François Hollande, sollicitée par E3M au moment de la campagne présidentielle, s'était engagé à veiller "à ce que tous les travaux scientifiques soient pris en compte pour déterminer la dangerosité des produits de santé". Or l'ANSM a refusé en novembre de financer la poursuite des recherches de l'équipe Inserm de l'hôpital Henri Mondor. Excédée, l'association a décidé d'entamer une grève de la faim le 26 novembre. Deux de ses membres, atteintes de la myofasciite à macrophages, ont jeûné pendant dix-huit jours. Elles viennent d'être relayées par deux autres personnes qui campent aujourd'hui devant le ministère de la Santé.
Les politiques s'en mêlent
L'ANSM a finalement annoncé jeudi qu'elle était favorable à une étude. Mais pour Didier Lambert, "même si c'est un premier pas, il faut des engagements plus précis". Il demande que l'étude soit menée par l'unité de Créteil et non par une nouvelle équipe, comme le propose l'ANSM. Le président de E3M insiste aussi sur la nécessité de mettre à disposition des patients des vaccins sans aluminium, notamment pour le vaccin DT Polio, obligatoire pour qu'un enfant puisse entrer à la crèche ou à l'école.
Les grévistes de la faim ont reçu le soutien d'Europe Ecologie-Les Verts et du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA), ainsi que de divers parlementaires. En mars, le groupe d'études sur les vaccinations de l'Assemblée nationale, présidé par le député Olivier Jardé (Nouveau Centre), a publié un rapport sur la question. Bien que réservé sur l'éventuelle toxicité de l'aluminium, le groupe préconise l'application du principe de précaution et "un moratoire sur les adjuvants aluminiques". C'est-à-dire plus d'utilisation tant qu'il n'y pas plus d'études.
Les médecins s'inquiètent du climat de "suspicion"
L'Académie des sciences et l'Académie nationale de médecine n'ont pas apprécié les recommandations du rapport Jardé. Selon elles, aucune étude ne permet aujourd'hui de montrer que l'aluminium dans les vaccins est dangereux. Pierre Bégué, pédiatre et infectiologue, membre de l'Académie de médecine, s'est inquiété en octobre d'un climat général de "suspicion" contre les vaccins, avec de plus en plus de parents refusant la vaccination de leurs enfants par "conviction personnelle". Ces derniers craindraient notamment l'apparition d'effets secondaires.
"Le nombre de publications anti-vaccins explose sur Internet : sur les sites et les blogs, on trouve en effet beaucoup plus de critiques alarmistes que de recommandations en faveur des vaccins", expliquait en juillet le docteur Bégué à Top Santé.
Les vaccins, source de controverse
L'aluminium n'est pas le seul sujet de préoccupation. Le vaccin contre l'hépatite B a longtemps été controversé, certaines études dans les années 90 ayant fait le lien entre ce dernier et l'apparition de quelques cas de sclérose en plaque (SEP). L'Académie nationale de médecine a pourtant rappelé en 2008 que "huit études nationales et internationales [avaient] démontré l'absence de relation statistiquement significative entre la SEP et la vaccination contre l'hépatite B". Le climat de psychose autour de ce vaccin s'est depuis dissipé.
Le vaccin ROR (rougeole-oreillons-rubéole) a lui aussi un temps suscité des inquiétudes parce qu'une étude anglaise datant de 1998 affirmait qu'il pouvait être responsable de l'autisme infantile. "Plusieurs études (britannique, canadienne, américaine...) publiées après l'étude en cause, qui avait été réalisée sur un échantillon de seulement douze enfants, n'ont établi aucune corrélation entre la survenue d'autisme et le triple vaccin ROR", rappelle pourtant Le Monde.fr (article payant).
Plus récemment, ce sont les vaccins contre les papillomavirus (cancer du col de l'utérus) qui ont fait débat. En janvier 2011, les produits Gardasil et Cervarix, utilisés pour ce type de vaccin, ont rejoint la liste des "médicaments particulièrement surveillés" à la demande du ministère de la Santé.
Lancez la conversation
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour commenter.