: Vidéo Complément d'enquête. Kerviel : des témoignages troublants
Jérôme Kerviel a été condamné à trois reprises pour avoir fait perdre presque 5 milliards à la Société générale. L'ancien trader demande la révision de son procès en s'appuyant sur plusieurs témoignages de cadres de la Fimat, une filiale de la Société générale. Extrait de "Complément d'enquête" du 14 janvier.
En octobre 2010, Jérôme Kerviel est condamné à trois ans de prison ferme pour avoir fait perdre presque 5 milliards à la Société générale à la suite de mises frauduleuses. La banque ne savait-elle vraiment rien de ses paris à 50 milliards d’euros ? Après avoir rédigé le rapport qui a envoyé l'ancien trader en prison, Nathalie Le Roy n’en n’est plus si sûre. L'enquêtrice de la brigade financière a dû reprendre son enquête, car l'accusé fait appel et porte maintenant plainte contre la banque.
Nathalie Le Roy va alors découvrir des éléments de plus en plus troublants. Parmi eux, les témoignages de deux employés de la Fimat. Cette filiale de la Société générale exécute les ordres des traders et gère le flux de leurs opérations.
Un ingénieur voit le trafic exploser
L'un d'eux, ingénieur, joue le rôle d'une tour de contrôle en aiguillant le trafic informatique des traders. Durant l’été 2007, il voit le trafic exploser et plusieurs serveurs tomber en panne. "Imaginez le trafic du péage de Saint-Arnoult un 14 juillet sur une route nationale... Et ça tous les jours, pendant des mois !" Du jamais vu. Cette activité totalement anormale est générée, comme il va le comprendre, par le compte SF581… celui d’un certain Jérôme Kerviel.
Un comptable décrit une "cash machine"...
Le compte SF581, Philippe Houbé, un ancien comptable de la Fimat qui avait accès aux comptes de tous les traders de la Socgen, le connaît bien. Comme tout le monde à la Fimat : en cette fin 2007, le compte de Jérôme Kerviel est devenu une vraie "cash machine" et attire des mails de félicitations à la Société générale. Le champagne coule à flots... Comment la banque peut-elle ignorer une activité dont sa filiale se réjouit ouvertement ?
... et des appels de marge impossibles à ignorer
En outre, la Fimat envoie chaque jour les relevés à sa maison mère. Ce découvert de 559 millions d'euros affiché par le compte SF581 n'a pas pu passer inaperçu, explique Philippe Houbé devant un écran d'ordinateur. En effet, la banque a dû verser cette somme sur le compte, comme dépôt de garantie : c'est cela, un "appel de marge". Pour l'ex-comptable, "ça signifie qu'elle est clairement au courant de l'activité du trader".
La Société générale répond "montant global"
Pas du tout, rétorque la Société générale par la voix de son avocat, Jean Veil : "L'ensemble arrivait avec un montant global, sans que l'on regarde les actions individuelles de chacun des traders." Une banque qui n'éplucherait pas ses relevés de comptes ? Nathalie Le Roy n'en croit pas un mot. La Société générale aurait-elle dissimulé des informations ?
Le responsable du courrier électronique avoue
L'enquêtrice soupçonne la Société générale d'avoir voulu dissimuler qu'elle était au courant des appels de marge de Kerviel. Nathalie Le Roy décide alors d'interroger le responsable du courrier électronique de la Fimat. Lui a-t-on demandé d’effacer des mails ? "Au bout d'un certain temps de silence", se rappelle la policière, elle insiste, et la réponse vient, sans équivoque : c'est "oui".
Extrait de "Kerviel : au cœur du mensonge", un "Document de Complément".
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