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Histoires d'info. Aux origines du vote ouvrier en faveur du Front national

Le Front national a recueilli 43 % du vote ouvrier lors des dernières élections régionales.un score jamais vu depuis le Parti communiste dans les années 1970. Une évolution dont on trouve trace dans les années 1980.

Article rédigé par franceinfo, Thomas Snégaroff
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Jean-Marie Le Pen, président du Front national, invité de "L'heure de vérité" sur Antenne 2, le 17 octobre 1985. (KEYSTONE PICTURES USA / MAXPPP)

Aux dernières élections régionales, le Front national a recueilli 43 % du vote ouvrier, un score jamais vu depuis le Parti communiste dans les années 1970. Si cette poussée est aujourd'hui une réalité connue de tous, elle est longtemps passée inaperçue dans les médias. Une évolution dont on peut pourtant trouver trace dès les années 1980.

Les temps sont durs pour le Parti communiste en cette année 1984. L’année précédente, le parti de Georges Marchais a connu un échec retentissant lors des municipales de 1983, perdant par exemple la gestion de Reims ou de Nîmes, ou connaissant des revers historiques dans la ceinture longtemps rouge autour de Paris. Mais invité de L’Heure de Vérité, Georges Marchais se montre confiant et optimiste : "La remontée de l'influence de notre parti est une certitude. Sociologiquement parlant, le Parti communiste français n'a plus de raison d'être. Moi je trouve au contraire, savez-vous combien il y a actuellement d'ouvriers, de techniciens et d'employés dont les intérêts sont communs ? 74 % de la population active."

Le journaliste : "Pourquoi ils ne viennent pas vers vous ? C'est ça la question."

Georges Marchais :  "Il y en a, il y en a."

Pour le premier secrétaire du Parti communiste, la sociologie serait donc favorable aux communistes, comme si par nature, le vote ouvrier lui était assuré. Aveuglement ou méthode Coué ? Il est difficile de trancher.

Un mouvement de fond s’est engagé dans ces années 1980

La gauche au pouvoir, avec des ministres communistes jusqu’en 1984, a déçu une partie du monde ouvrier, même si ce sont d’abord des ouvriers de droite qui les premiers sont tentés par le vote Front national.

En 1988, déjà, mais les médias n’en parlent pas, Jean-Marie Le Pen obtient 18 % du vote ouvrier lors du premier tour de la présidentielle. Un an plus tard, le président du Front national tente de capitaliser sur ce nouvel électorat, il soutient à la surprise générale les grévistes de la RATP : "Les électromécaniciens du métro, haute qualification et haute responsabilité, touchent 7 000 francs par mois au départ et 9 700 francs en fin de carrière, avec les primes moins de 11 000 francs. C'est scandaleux ! C'est un scandale social et un scandale économique !"

Il reprend même le gimmick de Georges Marchais. Au premier tour de la présidentielle de 1995, le FN devient le premier parti ouvrier sous le triple effet politique de :

1. La "désouvriérisation" du discours de la gauche (qui ne parle finalement plus du monde ouvrier)

2. L’évolution du discours frontiste de la défense du libéralisme à la promotion du protectionnisme

3. Un renouvellement générationnel au sein du monde ouvrier

Lors des élections régionales de 2015, le FN a obtenu 43 % du vote ouvrier. Depuis le parti communiste des années 1970, aucun parti n’avait obtenu un tel score chez les ouvriers, nous indiquant que désormais le FN parvient à chercher des ouvriers précédemment à gauche.

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