L'Autriche, "victime du nazisme", un mythe aux conséquences actuelles ?
Retour le 21 septembre 1945. Depuis quelques temps déjà, Soviétiques, Britanniques, Américains et Français occupent l’Autriche et sa capitale Vienne libérée du joug nazi. Il en est de même de l’Allemagne et de sa capitale Berlin. Pour autant, les actualités françaises distinguent très clairement les deux pays :
"Vienne n'est pas morte comme Berlin. Vienne a souffert de la guerre, mais la guerre n'a pu effacer le visage de Vienne. Dans cette Vienne toute emplie de souvenirs musicaux et charmants, les Français sont revenus. Ils occupent un quart de la ville et un quart de l'Autriche. Ils sont revenus en vainqueurs décidés à effacer les traces nazies."
C’est bien dans l’esprit de la diplomatie française qui n’a jamais voulu faire de l’Autriche autre chose qu’une victime du nazisme. Etait-ce lié au passé pour le moins trouble de Vichy ? C’est possible. Pour autant, les faits sont bien réels. En mars 1938, au moment de l’Anschluss, l’annexion de l’Autriche par l’Allemagne nazie, Hitler est accueilli avec liesse dans sa ville natale de Linz où il prononce un discours devant environ 80.000 personnes. Puis, pendant la guerre, l’Autriche a apporté un soutien constant et souvent enthousiaste à la funèbre entreprise nazie.
L’Autriche s’est évidemment satisfaite de ce statut de victime, lui évitant le travail d’introspection douloureux qu’a connu l’Allemagne. En 1948 est même promulguée une amnistie en faveur d’1/2 million d’anciens membres autrichiens du parti nazi. Et un an plus tard, se tiennent les élections générales en Autriche :
"Les résultats des élections en Autriche sont maintenant connus intégralement. On peut caractériser ces élections en disant avant tout qu'elles constituent un succès pour le parti des Indépendants d'inspiration néo-nazie. Ce parti obtient avec des moyens matériels de propagande médiocres 11,67% des suffrages..."
Seize néo-nazis au parlement quatre ans après la fin de la guerre. Et à partir de 1955, quand les forces d’occupation quittent l’Autriche, le pays désormais totalement indépendant cultivera à plein le mythe de la victime. Les choses commenceront à bouger dans les années 1980, notamment après les révélations du passé nazi du président Kurt Waldheim. Mais pour de nombreux observateurs, c’est trop tard. En 2000, quand le FPÖ de Jorg Haider est arrivé au pouvoir au sein d’une coalition, le grand historien autrichien Georg Schmid s’est posé la question qui fâche :
"Comment expliquer cette surabondance de haine en Autriche ?"
Sa réponse trouve ses racines dans l’histoire.
"La dénazification après 1945 fut un échec. Le traité d’Etat de 1955 fut une chance manquée de proclamer une fois pour toutes le caractère intolérable de toute forme de nazisme, même intelligemment déguisée."
En 2013, une enquête menée par un journal autrichien révélait que 42% de la population considérait que "La vie n’était pas si mal sous les nazis."
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