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Le décryptage éco. CETA : l'accord de libre échange entre l'Europe et le Canada va-t-il capoter ?

On parle du CETA, ce fameux accord commercial conclu entre l’Europe et le Canada. Mardi 19 octobre, la Commission européenne a lancé un ultimatum à la Wallonie qui entend faire jouer son droit de veto.

Article rédigé par franceinfo
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Banderole contre le CETA sur le Parlement à Namur, le 18 octobre 2016. (NICOLAS LAMBERT / BELGA)

il faut un peu se frotter les yeux de si bon matin, pour comprendre pourquoi la Wallonie, qui mérite bien sûr le plus grand respect, dispose d’un droit de veto sur un accord commercial européen ? Bien oui, hier on a assisté à une réunion surréaliste à Luxembourg où les 28 ministres du commerce européens, tous favorables à l’accord, y compris le ministre Belge, ont constaté que celui-ci ne pouvait pas signer cet accord, parce que le petit parlement régional francophone de Wallonie refuse d’approuver le texte. Et s’il persistait dans son obstination, et bien tout s’effondrerait comme un château de cartes, plus de sommet jeudi 27 octobre avec le Canada et les 28 pays de l’Union, plus d’accord commercial, et sans doute, et c’est le plus important, un possible coup d’arrêt donné à ces grandes négociations commerciales bilatérales.

Alors pourquoi ce pouvoir exorbitant au parlement francophone de la Belgique ? Et bien parce que la Belgique est le seul l’Etat de l’union dont les règles institutionnelles réclament une validation a priori, c’est à dire avant même la signature, de tels accords internationaux. Dans tous les autres Etats membres, il y aura bien une ratification bien sûr par les parlements nationaux, mais à la toute fin du processus.

Quels sont les enjeux du Ceta, de cet accord commercial entre l’Europe et le Canada ?

L’enjeu est d’abord très politique. C’est in fine le principe même de ces grands accords commerciaux, de libre échange, qui serait atteint en cas d’échec. On vit d’ailleurs un moment tout à fait décisif sur l’avenir du commerce mondial, dont on sait, je l’ai souvent expliqué ici, qu’il ralentit, qu’il marque une inflexion dans ce moment critique de la mondialisation que nous vivons. Le CETA oppose, en grand traits deux camps : il y a les favorables, notamment le gouvernement français, qui affirment que le CETA, c’est un modèle du genre, que c’est à peu près ce qu’on peut faire de mieux en matière d’accord international, qu’il y a eu une vraie négociation, une vraie volonté partagée de faire monter en gamme les normes, et qu’il offre donc toutes les garanties en matière de sécurité alimentaire, de respects des appellations, d’ouverture de marché public, bref ce serait une percée politique inégalée.

En face, il y a les opposants, résolus, très hostiles au libre échange par principe, qui ne croient pas à ses bienfaits partagés, qui estiment que le CETA est le petit frère du Tafta, un projet d’accord transatlantique, négocié dans la plus grande opacité entre l’Europe et les Etats-Unis, qui lui a suscité une très grande hostilité en France et en Allemagne notamment, un projet qui a d’ailleurs du plomb dans l’aile. Même aux Etats-Unis, le vent a tourné.

Comment cette bataille peut se terminer ? 

Nous pouvons nous tromper mais nous ferons volontiers le pari que la Belgique parviendra à faire céder le parlement wallon, mais que sur le fond, cela ne règlera pas tout le problème, beaucoup plus vaste. Et cela tient au fait que les négociateurs, qu’ils soient d’ailleurs européens ou américains, ont un mal fou à associer les sociétés civiles, qui veulent être partie prenantes, être informées, et participer à ces discussions. Quand on voit par exemple que Nicolas Hulot et sa fondation, qui ne sont pas du tout des ennemis du commerce, nous dire que ça va trop vite, qu’il voudrait pouvoir vérifier que le CETA n’est pas contradictoire avec l’accord sur le climat de la COP21, et qu’il faut remettre l’accord en chantier, on se dit bien sûr que quelque chose cloche vraiment dans ces négociations internationales. Et c’est embêtant, parce que pris globalement, les Français, nous tous les Européens et l’écrasante majorité des pays, nous avons tous énormément profité, notamment en terme de niveau de vie, de l’explosion du commerce mondial depuis près de trois décennies.


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