Alison, le Mooc pour tous
Alison
comme Advanced Learning Interactive Systems Online – système d'apprentissage avancé en ligne. Pour une fois le site n'est
pas américain mais irlandais, il est installé à Galway. Pour une fois il ne
s'intéresse pas à la crème des étudiants des meilleurs universités
mondiales ; c'est un site destiné à monsieur et madame tout le monde,
voire à celle et ceux qui n'ont pas fait d'études.
Et donc on y apprend pas les
mêmes choses que sur les plateformes de Mooc des grandes universités...
Exactement.
Les 500 cours disponibles touchent à des compétences générales ou même
professionnelles. C'est d'ailleurs peut-être pour cela qu'on parle moins
d'Alison que de Coursera, EdX ou Udacity. Sur internet aussi, la voie
professionnelle est moins valorisée que la voie académique...
Exemple de ces cours ?
Informatique
de base, anglais, construction d'un site internet, sécurité alimentaire,
introduction aux études de droit... C'est vraiment une approche basique. J'ai
testé le module d'initiation au français. On apprend les couleurs, on apprend à
dénombrer, on apprend les règles de base de la grammaire. Les modules sont
brefs : une ou deux heures pour certains, neuf heures pour les séquences
les plus élaborées. Bref, c'est très accessible. Résultat, d'ores et déjà,
selon BBC News qui consacre un long article à Alison, la plateforme touche
des travailleurs peu qualifiés, des chômeurs, des immigrants. Evidemment la
gratuité des cours est fondamentale dans le succès d'Alison, qui a déjà attiré
deux millions d'étudiants, et qui a reçu des prix de l'Unesco ou tout récemment
du Wise, le World Innovation Summit for Education de Doha. Un succès qui repose
aussi sur le fait que vous pouvez prouver par des certificats ou des diplômes
que vous avez acquis les compétences enseignées sur la plateforme.
Et ce succès ne touche pas
seulement l'Irlande, le pays d'origine d'Alison...
Non.
C'est un projet qui touche tout le monde anglophone, dans les pays d'Afrique, Egypte
et Nigeria par exemple, évidemment en Inde, aux Philippines. Le fondateur
d'Alison Mike Feerick est en convaincu, je le cite : " L'éducation
sous-tend tous les progrès sociaux. Vous pouvez changer le monde si vous
changez l'éducation ".
Les cours sont gratuits... Mais alors qui paie ?
Un peu
les utilisateurs qui veulent des certificats – 30 dollars le certificat, pour
prouver qu'on a suivi un cours. Mais essentiellement la publicité. C'est une
des originalités du modèle Alison : il mélange une approche commerciale et
une mission de service public. Cela s'inscrit dans une tendance plus générale,
au niveau mondial pour compenser le manque de ressources publiques. On voit
donc des entreprises privées ou des associations offrir l'éducation, comme le
ferait un service public, et chercher l'argent ailleurs.
En France c'est exemple de
l'école 42, de Xavier Niel...
Oui. Ou
de la Prep'Etna du groupe Ionis. Dans le cas de Xavier Niel, on n'est pas ou
pas encore dans la démarche commerciale ; on est dans le mécénat. Mais le
résultat pour l'étudiant est le même : il se forme gratuitement dans une
école privée.
Pour faire vivre un modèle
gratuit sur internet grâce à la publicité, il faut réussir à attirer beaucoup
d'audience...
Oui. La
conviction des fondateurs d'Alison, c'est que le secteur de l'éducation va
connaître sur le web le même enchaînement de séquences que dans d'autres
domaines, par exemple la fourniture d'accès à internet il y a quinze ans ou
plus récemment la vente de livres. Au départ, des dizaines de sociétés se sont
créées. Puis il y a eu consolidation et les gros ont racheté ou tué les petits.
C'est la règle du " winner takes all ", le gagnant emporte la mise.
Celle qui assure aujourd'hui la fortune des géants de l'internet commercial
comme amazon ou e-bay.
Un supermarché mondial en ligne
de l'éducation...
Exactement.
Avec ses certificats, ses diplômes.Et ça peut marcher. Alison se situe
résolument en marge des plateformes de
Moocs développées par les grandes institutions universitaires. Quand vous êtes
dans ce registre, il ne sera pas facile de construire des marques capables de
rivaliser avec Harvard ou Stanford – en France avec Polytechnique ou HEC. Tout
le pari d'Alison c'est finalement d'attaquer un marché bien plus important au
niveau mondial que celui des surdiplômés, le marché des personnes qui justement
n'ont pas accès aux études académiques. Selon l'Unesco, cet enseignement à
vocation professionnelle, tourné vers l'acquisition de compétences, cet
enseignement qui demeure partout dans le monde le " cousin pauvre des
filières académiques " devrait être une priorité mondiale. Le New-York
Times, qui a récemment consacré une enquête à Alison le rappelait : il y a
200 millions de personnes sans emploi dans le monde dont 75 millions de jeunes
qui n'ont pas les compétences de bases qui permettent d'entrer sur le marché du
travail. Ce sont ces compétences qu'apporte Alison.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.