Rythmes scolaires : "Il faut faire passer les enfants d'abord pour une fois"
Jean-Jacques Hazan, président de la FCPE, une association de parents d'élèves classée à gauche, revient sur la mobilisation des enseignants parisiens de ce mardi.
La réforme des rythmes scolaires dans le primaire, qui rassemblait tout le monde il y a quelques mois, est devenue la nouvelle pomme de discorde de l'Education nationale. Les enseignants, qui réclament une contrepartie financière et davantage de concertation, font grève et manifestent à Paris mardi 22 janvier, et partout en France mercredi, jour de la présentation du projet de loi sur la refondation de l'école en Conseil des ministres. Les collectivités territoriales, mises à contribution dans cette réforme, n'en pensent pas moins.
Quelle est la position des parents d'élèves ? Pour le savoir, francetv info a interrogé Jean-Jacques Hazan, président de la FCPE, l'une des deux principales associations de parents d'élèves, classée à gauche.
Francetv info : Soutenez-vous le mouvement de certains enseignants contre la réforme des rythmes scolaires ?
Jean-Jaques Hazan : S'ils ont des choses à revendiquer, qu'ils le fassent. Mais ce n'est pas le moment. Pour nous, ce n'est pas du rythme des enseignants dont on doit parler en priorité, mais de celui des enfants. Il faut les faire passer d'abord pour une fois. Toutes les organisations syndicales et tous les partis étaient d'accord pour en finir avec la semaine de quatre jours. Si chacun regarde midi à sa porte maintenant, on ne va pas avancer.
La mise en œuvre de la réforme dès 2013 dans certaines villes, dont Paris, est jugée trop précipitée. N'aurait-il pas fallu davantage de concertation ?
Mais cette réforme des rythmes scolaires, cela fait trente ans qu'on en parle et quatre ans que la FCPE la réclame ! Pourquoi attendre encore ? Avec 144 jours de classe par an et six heures de cours par jour, on a la pire situation qui soit. Une société cohérente doit protéger un peu plus ses enfants que ses adultes. Les droits des élèves devraient figurer dans le Code de l'éducation, au même titre que ceux des salariés dans le Code du travail.
Etes-vous satisfait du décret tel qu'il est rédigé actuellement ?
Non, nous allons militer pour quelques retouches et faire en sorte que le texte sur la refondation de l'école en général soit plus ambitieux. Cinq heures trente de cours par jour, c'est encore trop long. Et il faudrait aussi étendre le temps scolaire sur l'année entière.
Certains enseignants regrettent que la pause de midi, pourtant allongée (une heure trente), ne soit plus consacrée au soutien scolaire...
Nous ne sommes pas favorables à l'aide personnalisée telle qu'elle est conçue actuellement. Elle ne fait que stigmatiser un peu plus les élèves, les empêchant d'aller se détendre avec leurs camarades.Tout doit se jouer dans la classe. L'école doit arrêter de se décharger sur l'extérieur et de déléguer. Il faut en finir avec les devoirs, comme c'est déjà le cas dans certains établissements, mais aussi avec les notes et le redoublement. Une véritable révolution pédagogique est nécessaire dans notre école.
Et le collège ? Beaucoup de parents regrettent qu'il ne soit pas concerné par la réforme des rythmes scolaires.
Nous attendons en effet une autre circulaire sur le sujet, qui limite à six le nombre d'heures de cours par jour, fasse commencer la journée à 9h et impose quatre-vingt dix minutes de pause le midi. On a reçu beaucoup d'emplois du temps de collèges qui dépassaient les bornes avec huit heures de cours par jour et quarante-cinq minutes de pause le midi.
Assiste-t-on à une nouvelle fracture enseignants/parents d'élèves ?
Cette fracture, elle va durer un jour. Et pour l'instant, il est surtout question des enseignants parisiens. La ville de Paris dispose pourtant d'une manne financière importante pour financer cette réforme, ce qui va permettre de "déprécariser" certains personnels, embauchés pour les activités périscolaires des enfants. Il y a un vrai travail local à faire, car le temps scolaire est, de fait, cogéré entre l'Education nationale et les collectivités territoriales. Certaines écoles ont déjà mis en place des schémas un peu complexes pour coller à la vigilance de l'élève, plus élevée en fin de matinée et en seconde partie d'après-midi. Un sas d'entrée scolaire le matin, qui permet aux enfants d'être déposés à 8h30 mais de commencer les cours à 9h, est aussi une bonne idée.
Ne craignez-vous pas, au final, une réforme a minima, surtout si la mobilisation des enseignants, traditionnel électorat de la gauche, prend de l'ampleur ?
Si on ne croit jamais en rien, on ne fait plus rien. C'est vrai qu'il y a beaucoup d'attentisme aujourd'hui et que les croyances en une vraie transformation de notre école sont faibles. Mais on a demandé une refondation et on vient tout juste d'entamer le processus. Ce n'est pas l'affaire d'une mandature, il y en a bien pour quinze ans ! C'est le temps qu'il a fallu à la Finlande ou au Danemark pour réformer leurs écoles.
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