Cet article date de plus de huit ans.

L'article à lire pour comprendre la mission ExoMars

Cette mission ambitieuse européano-russe a un double rôle : apprendre à l'Europe à atterrir sur Mars et chercher des traces de vie extraterrestre sur la planète rouge.

Article rédigé par franceinfo - Alice Maruani
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 10min
La fusée Proton décolle de la base de Baïkonour (Kazakhstan), le 14 mars 2016, avec à son bord le module Schiaparelli. (KIRILL KUDRYAVTSEV / AFP)

Après la mission Rosetta, qui a envoyé avec succès un petit robot nommé Philae sur la comète Tchouri, l'Agence spatiale européenne (ESA) se lance à la conquête de Mars avec le programme ExoMars. Un premier module baptisé Schiaparelli devrait atterrir, mercredi 19 octobre, sur la planète rouge après sept mois de voyage. S'il réussit, ce sera la première fois que l'Europe, alliée aux Russes dans ce projet, procède à un "amarsissage". Alors que les Américains, qui ont déjà envoyé plusieurs robots sur Mars, projettent de coloniser cette planète d'ici 2030, franceinfo vous explique à quoi cette mission ExoMars va servir.

Quel est le but de la mission ExoMars ?

Comme son nom l'indique  "exo" vient d'"exobiologie", qui désigne l'étude de la vie extraterrestre –, la mission ExoMars a pour objectif de détecter des traces de vie passée sur la planète rouge, qui se situe dans la "zone habitable" de notre système solaire.

Le programme, mené conjointement par l'ESA et Roscoscomos, son équivalent russe, se divise en deux volets. Le premier vise à faire se poser un atterrisseur, sans encombres, si possible. C'est la mission de Schiaparelli. "Il s'agit d'apprendre aux Européens à atterrir sur Mars", résume à franceinfo Francis Rocard, chercheur au Centre d'étude spatial français (CNES). Jusqu'ici, seuls les Américains y sont parvenus et ce, dès 1975.

La deuxième étape de la mission n'aura lieu qu'en 2020. Elle consiste à envoyer sur Mars une véritable astromobile d'environ 350 kg qui devrait travailler pendant une année martienne. Soit 686 jours. On espère ainsi détecter des "biosignatures", c'est-à-dire des structures moléculaires qui portent la trace d'une vie ancienne.

Que va-t-il se passer mercredi ?

Le premier volet d'ExoMars touche à sa fin. L'atterrisseur baptisé Schiaparelli a été largué depuis la sonde Trace Gas Orbiter (TGO), dimanche 16 octobre, dans l'après-midi. Après trois jours de descente vers le sol martien, celui-ci devrait toucher la plaine équatoriale de Meridiani Planum mercredi, à 16h48, et vous pouvez suivre l'atterissage sur Mars en direct, sur le site du CNES.

Schiaparelli arrive sur Mars au terme d'un voyage de sept mois et de 225 millions de km : l'atterrisseur avait embarqué en mars 2016 à Baïkonour (Kazakhstan), à bord d'une fusée russe Proton. Voici les images du décollage :

Est-ce une étape risquée ?

A force d'entendre parler Barack Obama ou Elon Musk de colonisation de la planète rouge, on pourrait oublier qu'atterrir sur Mars est loin d'être gagné. La preuve : depuis 1971, sur 17 tentatives d'"amarsissage", dix ont échoué. Dont le dernier projet de l'ESA, Beagle 2, en 2003. Schiaparelli sera un nouveau test des capacités technologiques et industrielles européennes.

Selon Cieletespace, le module entamera sa descente vers Mars à 16h42 et entrera dans l'atmosphère martienne à la vitesse de 21 000 km/h. Il ne disposera que de quelques minutes pour ralentir suffisamment puis toucher le sol. Pour cela, l'engin, protégé par un bouclier thermique, est doté d'un parachute adapté, qui s'ouvrira à 11 km du sol. Mais il devra ensuite enclencher neuf rétrofusées à 1 km de la surface, qui s'éteindront à deux mètres du sol pour laisser l'engin "tomber comme une pierre" sur des matériaux écrasables prévus à cet effet.

L'atterrissage de Schiaparelli en huit étapes. (ESA)

Une simulation de cet atterrissage, qui se déroulera en 6 minutes, entre 16h42 et 16h48, a été publiée par l'ESA sur sa chaîne YouTube

Francis Rocard assure que les chances de réussite européennes sont meilleures aujourd'hui qu'en 2003. La raison tient en un mot : l'argent. Beagle 2 était presque entièrement britannique, rappelle-t-il. "C'était très compliqué de boucler les financements pour ce seul pays. Du coup, on avait construit le module en urgence, lancé sans avoir le temps d'être complètement testé. Quand ça se passe comme ça, c'est l'échec assuré." Echec qui n'en était finalement qu'à moitié un, puisque d'après des images de la Nasa prises en 2015, le module aurait bien atterri mais ces panneaux solaires ne seraient que partiellement dépliés.

Est-ce qu'on va chercher des signes de vie sur Mars tout de suite ? 

Eh non ! Schiaparelli sert essentiellement à préparer de prochains atterrissages sur Mars. Le module ne fonctionnera qu'entre deux et huit jours, en faisant principalement des relevés météorologiques, puisqu'il ne possède qu'une batterie non-rechargeable.

Les mesures les plus durables de ce premier vol seront effectuées par la sonde TGO. Mercredi, Trace Gas Orbiter va dévier sa trajectoire pour se mettre en orbite autour de Mars. Et à partir de 2018, cette sonde commencera à "renifler" l'atmosphère martienne pour chercher des traces de gaz qui pourraient indiquer la présence d'une forme de vie actuelle sur la planète. 

Mais le cœur de la recherche de vie sur Mars ne commencera qu'en 2020, avec l'envoi d'un second engin baptisté Pasteur.

Et en 2020, c'est quoi le programme ?

Ce dernier, qui doit être envoyé sur Mars en 2020, ne pèse qu'un tiers du poids de Curiosity, l'engin américain, mais il sera bardé d'instruments de mesure dernière génération. Il sera largué directement près de sites d'argiles, les roches qui intéressent aujourd'hui les scientifiques, et vers lesquelles le Rover américain avance depuis quatre ans.

Surtout, Pasteur sera capable d'effectuer des forages profonds, de un à deux mètres. "On espère qu'à ces profondeurs, les radiations qui tendent à détruire toute molécule organique à la surface de Mars ne sont pas opérantes", explique Francis Rocard. ExoMars est ainsi complémentaire de Curiosity, qui ne peut forer qu'à quelques centimètres de surface.

Cherche-t-on vraiment des petits hommes verts ?

Pas exactement. Dans les années 1970, les premières missions américaines – intitulées Viking – cherchaient en effet de la vie à la surface de Mars. Depuis, on a appris que les radiations sur cette planète rendaient son sol totalement stérile. C'est donc acté depuis longtemps : il n'existe pas de vie sur le sol martien. Ce que l'on cherche actuellement, ce sont des traces d'une vie passée sous la surface.

La présence d'un océan sur la planète rouge il y a trois à quatre milliards d'années est quasiment attestée. Avec, ou non, formation de vie. L'un des objectifs de la mission ExoMars est de le déterminer, en forant dans le sol pour prélever des échantillons. 

Quant à la présence actuelle d'êtres vivants, les scientifiques espèrent toujours en trouver, mais beaucoup plus profondément – de 1 à 100 km sous la surface, par exemple. "On pourrait imaginer que, comme sur Terre, il y ait du vivant sur Mars à grande profondeur, explique Francis Rocard. Ce pourrait être l'objet d'une future mission habitée sur Mars de le déterminer, en emportant de grandes foreuses."

Un échec serait-il synonyme d'abandon de la mission ?

On pourrait le croire, mais non. Le système d'atterrissage d'ExoMars, qui transportera l'astromobile en 2020, est déjà en construction. Et "pour des raisons de financement", selon Francis Rocard, celui-ci est entièrement russe, contrairement à Schiaparelli, qui est lui européen. L'éventuel échec de cet "amarsissage" ne présagera en rien du prochain vol européen. Ses conclusions ne serviront qu'aux suivants. Reste qu'un revers d'ExoMars, "ça ne sera pas une bonne nouvelle, c'est sûr", confie le chercheur du CNES.

Est-ce que ça coûte cher ? 

Oui. Même si le budget n'est pas totalement arrêté pour les deux missions ExoMars, il est estimé à 1,2 milliard d'euros, remarque L'Express. "Une somme faramineuse", selon l'hebdomadaire. D'autant que l'Agence spatiale européenne a été lâchée par la Nasa en 2011 en raison du coût de la mission, justement, ce qui a forcé l'ESA à faire appel à la Russie pour boucler ses financements.

A titre de comparaison, la mission Rosetta de l'ESA a coûté un peu plus d'un milliard d'euros. Et le coût de Curiosity avoisinait les 2,5 milliards de dollars (environ 2,27 milliards d'euros). Pour ExoMars, ce sont surtout les Italiens qui ont mis la main au porte-monnaie – d'où le fait que l'atterrisseur porte le nom d'un astronome italien du XIXe siècle.

Désolé, j'ai eu la flemme de tout lire et j'ai scrollé vers le bas. Vous me faites un petit résumé ? ;)

L'ambitieuse mission ExoMars, finacée par les agences spatiales européenne et russe, connaît une étape cruciale, mercredi 19 octobre. Après un voyage de sept mois, le module Schiaparelli va tenter de se poser sans encombre sur la surface de la planète rouge. Si tout se passe bien, il s'agirait du premier atterrissage sur Mars réussi pour l'ESA, l'Agence spatiale européenne.

Cette grande première doit aboutir à un second volet de la mission : l'envoi d'une astromobile appelée Pasteur sur la planète rouge en 2020. Elle sera dotée notamment d'outils de forage profond, d'un à deux mètres, contrairement aux engins américains. L'idée est de prélever des échantillons préservés des radiations de la surface martienne, pour déterminer si la vie s'est développée sur Mars il y a trois à quatre milliards d'années.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.