Les trois reproches faits aux nouveaux rythmes scolaires
Désorganisation, fatigue des enfants, coût pour les communes... Près d'un mois après la rentrée, parents d'élèves, opposition et syndicats critiquent le passage à la semaine de 4,5 jours à l'école primaire.
Près d'un mois après son entrée en vigueur, la réforme des rythmes scolaires ne fait toujours pas l'unanimité. Mise en place dans 4 000 villes à la rentrée 2013, la semaine de 4,5 jours s'attire aussi bien les critiques des personnels de l'éducation que des parents d'élèves et de l'opposition. Le patron de l'UMP Jean-François Copé a ainsi demandé au ministre de l'Education Vincent Peillon, jeudi 26 septembre, un "report" de sa mise en place, prévue pour s'échelonner sur deux ans, et a même appelé à une grève des nouveaux rythmes.
Francetv info passe en revue les principaux reproches formulés. Et la réponse apportée par la majorité.
Des enfants plus fatigués qu'avant
C'est l'effet le plus contraire à l'esprit de la réforme : beaucoup de parents se plaignent de voir leurs enfants plus fatigués qu'avant. Ils se lèvent tôt un jour de plus, le mercredi. Selon les chronobiologistes, ces spécialistes des rythmes, la régularité dans les horaires de coucher et de lever est pourtant moins fatigante. Et l'étalement des apprentissages sur 4,5 jours est censé mieux répartir la charge de travail. Voilà pour la théorie, mais dans la pratique, les familles ont visiblement du mal à s'y faire.
"Nos enfants sont fatigués !" lance une mère d'élève lors d'une réunion d'étape avec la mairie à Boves (Somme), relayée par Le Courrier Picard. Le choix de la ville de placer les nouvelles activités périscolaires sur la pause méridienne fait partie des griefs : "Mes filles se plaignent qu'elles ont faim. Elles déjeunent à 7 heures et mangent à 13 heures", poursuit la maman.
Même quand ces activités sont organisées l'après-midi, comme à Paris, les nouveaux rythmes sont jugés "exténuants". Notamment pour les élèves de petite section, dont les siestes sont écourtées. Pour la FCPE, fédération de parents d'élèves classée à gauche, la mise en application en maternelle a été "collectivement mal pensée", car "le rythme d'un enfant de 3 ans ou de 8 ans n'est absolument pas le même". Selon Le Figaro, certains parents de la capitale ont décidé de retirer leurs enfants des activités périscolaires.
La réponse de la majorité. Interrogée sur 20 Minutes.fr, l'adjointe au maire (PS) de Paris en charge de l'Education s'en tient aux principes de la réforme. "De très nombreux chercheurs, spécialistes de l’éducation, médecins (l’Académie de médecine notamment) ont pointé l’effet 'néfaste' de la concentration des apprentissages sur quatre jours, plaide-t-elle. Avoir un cours de maths le mercredi matin à 9 heures est plus efficace que le vendredi à 16 heures." Quant à la problématique de la maternelle, la mairie a "fait le choix d’une même organisation horaire" pour tous les élèves du primaire afin de faciliter l'organisation des familles.
Une désorganisation et un problème de sécurité
Comme le rapporte Le Figaro, des parents d'élèves "se font peur en racontant l'histoire de cet enfant de 5 ans parti seul dans la rue sans que personne le retienne en plein après-midi". Quelques cas d'enfants sortis plus tôt de l'école sans surveillance ont en effet été rapportés dans les médias, comme dans cet article du Parisien daté du jeudi 26 septembre.
Le SNUipp-FSU Paris, premier syndicat d'enseignants du premier degré, s'est ainsi inquiété d'une organisation "catastrophique" et "alarmante", notamment en maternelle. "L'alternance de jours irréguliers et l'utilisation des classes pour l'apprentissage et le récréatif empêchent une structuration du temps et de l'espace chez les élèves", explique-t-il. "Cette arythmie scolaire a des répercussions sur les élèves d'élémentaire qui sont plus fatigués, désorientés et inquiets dès qu'on évoque la sortie des classes", poursuit-il. Marielle de Sarnez, candidate du MoDem à la mairie de Paris, déplore aussi une "grande désorganisation". L'Association des maires de France (AMF) s'inquiète, quant à elle, de l'allègement du taux d'encadrement des enfants par les animateurs dans certaines villes.
La réponse de la majorité. "Il me paraît malhonnête intellectuellement de prétendre tirer le bilan d'une réforme de si grande ampleur au bout d'à peine trois semaines d'application", réagit Colombe Brossel. Le député-maire de Feyzin (Rhône), porte-parole du groupe PS sur la réforme des rythmes scolaires, assure qu'il "ne rencontre que des parents qui (l)e remercient". Yves Blein vante "ces nouveaux dispositifs", "bénéfiques pour les enfants".
Une réforme coûteuse pour les collectivités locales
Cette réforme est "intenable sur le plan financier, sauf à augmenter les impôts". C'est l'argument de Jean-François Copé pour appeler à son report. "L'Etat verse 50 euros sur les 150 que coûte cette réforme par adulte et enfant, les communes doivent donc trouver 100 euros supplémentaires", indique-t-il, estimant que la réforme est "une atteinte majeure à un principe constitutionnel : on donne des obligations nouvelles aux communes, mais on ne donne pas l'argent qui va avec".
L'AMF ne suit pas le président de l'UMP sur un "report", mais son président, Jacques Pélissard, dénonce "l'effet ciseaux" auquel sont confrontées les collectivités locales, avec "plus de charges et moins de dotations".
La réponse de la majorité. Vincent Peillon n'a pas mâché ses mots face à l'initiative de Jean-François Copé, dénonçant une "faute politique". Le ministre assure que l'Etat va "continuer à aider" les communes dans l'application des rythmes, rappelant que le fonds de 250 millions d'euros prévu à cette fin "n'a pas été consommé". Il conteste par ailleurs les chiffres avancés par le maire de Meaux : "La ville avait droit cette année à 150 euros, Jean-François Copé parle d'une aide de 50 euros. Il ne compte pas la Caisse d'allocations familiales."
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