Loi sur la prostitution : le Sénat supprime la pénalisation des clients et rétablit le délit de racolage
Le texte devrait repartir en deuxième lecture à l'Assemblée. En cas de désaccord entre les deux chambres, ce seront les députés qui auront le dernier mot.
C'était le point fort de la proposition de loi visant à renforcer la lutte contre la prostitution. Le Sénat a finalement supprimé, dans la nuit du lundi 30 mars au mardi 31 mars, la pénalisation des clients, et rétabli dans le même temps le délit de racolage, initialement abrogé par le texte.
La proposition de loi a été adoptée par 165 voix pour et 44 contre. Elle avait été votée en décembre 2013 à l'Assemblée nationale. Le texte devrait y repartir en deuxième lecture. En cas de désaccord entre les deux chambres, ce seront les députés qui auront le dernier mot.
Le délit de racolage rétabli à une voix près
La proposition de loi prévoyait d'abroger le délit de racolage instauré par Nicolas Sarkozy et d'instaurer en contrepartie la pénalisation des clients par une contravention de 1 500 euros. Mais la commission spéciale du Sénat a modifié la donne en réintégrant le délit de racolage, pourtant décrié par les associations sur le terrain, et a rejeté la sanction des clients.
La commission a été suivie par les sénateurs en séance : 162 sénateurs – 142 UMP, 19 UDI-UC et un divers droite – ont voté pour un amendement en ce sens du président de la commission spéciale, Jean-Pierre Vial (UMP). A l'inverse, 161 ont voté contre : 12 centristes, et les membres des groupes socialiste, CRC (Communiste, républicain et citoyen), RDSE (à majorité PRG) et écologiste.
Le délit de racolage accusé de précariser les prostituées
De quoi faire s'étrangler certains sénateurs, comme l'écologiste Esther Benbassa. "Il est tout bonnement impensable de rétablir ce délit [de racolage] qui a fait, en douze ans, la preuve de son inutilité en matière de répression des réseaux et de dangerosité à l'égard des personnes prostituées", a-t-elle estimé. "Cet amendement marque un véritable coup d'arrêt à une possible amélioration des conditions de vie des personnes prostituées", a renchéri la socialiste Claudine Lepage.
Sur Twitter, la secrétaire d'Etat chargée des Droits des femmes a elle aussi condamné cette décision du Sénat, jugée "regrettable". "Ce n'est pas la lutte contre le système prostitutionnel mais le statu quo qui a été choisi ce soir", regrette Pascale Boistard.
Ce n'est pas la lutte contre le système prostitutionnel mais le statu quo qui a été choisi ce soir #DirectSénat #prostitution
— Pascale Boistard (@Pascaleboistard) March 30, 2015
Pour les associations, le délit de racolage institué en 2003 a surtout précarisé et stigmatisé les prostituées, victimes parfois de "harcèlement" et d'arrestations "abusives".
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