"Cette décision n'a rien de rigoriste" : l'Observatoire de la laïcité répond à la polémique sur le retrait d'une croix à Ploërmel
Le Conseil d'Etat a ordonné le retrait d'une croix surplombant une statue de Jean-Paul II installée sur une place de Ploërmel, dans le Morbihan.
La décision déchaîne les passions. "Il faut sauver la croix de Ploërmel !", défendent des habitants. Le Conseil d'Etat a confirmé, mercredi 25 octobre, l'injonction, prononcée en première instance, de retirer une croix surplombant une statue de Jean-Paul II installée sur une place de Ploërmel (Morbihan), au nom du respect de la laïcité. "C'est une décision classique", explique Nicolas Cadène, rapporteur général de l'Observatoire de la laïcité. Franceinfo l'a interrogé sur cette affaire.
Franceinfo : Pouvez-vous tout d'abord rappeler les règles qui justifient cette décision ?
Nicolas Cadène : En prenant cette décision, le Conseil d'Etat ne fait qu'appliquer l'article 28 de la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des Eglises et de l'Etat : "Il est interdit, à l'avenir, d'élever ou d'apposer aucun signe ou emblème religieux sur les monuments publics ou en quelque emplacement public que ce soit." Il y a toutefois des exceptions : les édifices servant au culte, les terrains de sépulture dans les cimetières, les monuments funéraires ou encore les musées ou expositions.
La décision sur la statue de Ploërmel suit donc strictement la loi ?
Oui, c'est une application classique de la loi. Et elle a déjà eu lieu de nombreuses fois. Les croix peuvent être présentes sur des bâtiments cultuels et religieux ou dans des cimetières.
Lorsqu’elles datent d’avant 1905, elles ne sont pas concernées par l’article 28, elles font partie du patrimoine culturel et peuvent être entretenues. Mais de nouvelles croix ne peuvent pas être installées par une administration ou une collectivité locale, ça marquerait de leur part une adhésion à un culte.
Nicolas Cadèneà franceinfo
Or, dans un Etat laïque, les citoyens sont tous égaux devant l’administration, quelles que soient leurs convictions. Il peut en revanche y avoir une statue du pape, puisque c'est une personnalité internationale et historique, au-delà du fait qu’il soit religieux. Mais une administration municipale ne peut évidemment pas afficher sur une place publique un grand signe religieux, politique ou philosophique. Je suis très étonné par les débats que ça a suscités.
Justement, que pensez-vous de la polémique qui a suivi ?
Cette décision n'a rien de "rigoriste", à l'inverse de ce que l'on a pu entendre. Il est tout à fait normal que l'administration publique, neutre et impartiale, ne marque pas d'adhésion confessionnelle ou convictionnelle. S'opposer à cette décision, c'est s'opposer à la loi de 1905 et à la laïcité.
Quant aux arguments avancés sur "les racines chrétiennes de la France", bien évidemment que l'Eglise catholique a eu une influence considérable sur notre pays, mais ça ne signifie pas que ces racines ne sont que chrétiennes. On oublie par exemple les outre-mer, où il y a une grande diversité confessionnelle. Il faut bien comprendre que dans un Etat laïque, il n'y a pas de majorité ou de minorité, pas de racines à opposer à d'autres. Il n'y a que des Français, tous à égalité, avec leurs appartenances propres.
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