Tour de France : cinq conseils de champion pour descendre à fond, à fond, à fond
Mieux vaut rester concentré quand les vitesses avoisinent 100 km/h. Ancien spécialiste de l'exercice, Frédéric Vichot livre ses conseils aux plus intrépides pour exploser le chrono dans les cols.
On le surnommait "Le Descendeur". Beaucoup ont encore en mémoire le numéro de Frédéric Vichot, un beau jour de 1984 à Grenoble. Après avoir lâché l'Australien Phil Anderson, le Français remportait sa première victoire sur le Tour de France. La mythique descente du col d'Allos est notamment au programme de la 17e étape, mercredi 22 juillet.
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Un brin sévère, Frédéric Vichot estime qu’il "n'y a plus vraiment de descendeurs aujourd'hui, même si l’Italien Vincenzo Nibali a de bonnes trajectoires. Quand je regarde une descente à la télé, j'ai une petite habitude. Si je vois une moto-caméra de 500 kg réussir à suivre le coureur, c'est que le cycliste fait 'de la roulette'. A l'époque, il m'est arrivé de mettre en difficulté des motos de la gendarmerie."
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Pour semer la maréchaussée en montagne, voici donc cinq conseils prodigués par l'ancien champion, contacté par francetv info.
1Gardez des forces : une descente, c’est crevant
Vous pensez souffler un peu, pendant que le vélo roule tout seul ? Grave erreur. Même après une ascension, il faut en garder sous la semelle. "Si vous êtes déjà entamé physiquement, il sera impossible de réaliser une bonne descente, car cela demande un gros effort de concentration, qui exige parfois d'être en apnée pendant plusieurs virages", explique Frédéric Vichot. La lucidité est primordiale. Pas la peine de se mettre dans le rouge : "Si vous avez l'aiguille du compteur dans la boîte à gants, ce n'est pas la peine."
Il faut également prévenir un coup de froid éventuel. "Avec la vitesse, l’air froid va vite refroidir le coureur, surtout quand il y a de l’humidité. En cas de faible température, vous ne pourrez pas endurer longtemps la descente, car vous commencerez à trembler au bout de dix minutes, comme cela m’est déjà arrivé." Mais faites vite pour vous préparer. Pas question de perdre trente secondes à bourrer du papier journal sous le maillot.
2Veillez à équilibrer vos appuis, tout le temps
Baisse la tête, t'auras l'air d'un champion. Sur les sections où il n'est pas nécessaire de pédaler, il faut exploiter au mieux la pente. Lancés à vive allure, les coureurs "réduisent la surface frontale et se profilent au maximum. Certains s'assoient sur le cadre, d'autres prennent appui sur les pédales, mais il faut bien équilibrer tous ses appuis. Dans une ligne droite, il est alors possible de descendre à plus de 100 km/h." Il faut prendre garde à alterner l’allure, sous peine de manger le fossé. "Sur une série de virages, à 50-60 km/h, c'est beaucoup plus difficile à gérer, surtout si le revêtement est mauvais. Là, il ne faut pas faire d'acrobatie et surveiller ses appuis en se calant en appui sur la selle, avec les mains et les pédales."
3Gardez le regard au loin, anticipez plusieurs virages
Et quand on aborde le virage ? "Ah non, attention. Si vous demandez ça, c'est que vous n'êtes déjà plus dans le bon timing", prévient Frédéric Vichot. Les bons descendeurs ne gèrent jamais les virages un par un, mais plutôt par séries. C'est pour cela que la trajectoire est si importante. "Il est important de visualiser le paysage au loin, pour déchiffrer la route. Le regard doit permettre de déchiffrer deux, trois ou même quatre courbes en avance. Je m'aidais parfois des feux de motos ou de voitures qui me précédaient, pour avoir une idée de l'amplitude de la difficulté suivante." Vincenzo Nibali est l'un des coureurs qui offrent actuellement les plus belles trajectoires. Le voici en 2014, lors du Tour de Romandie.
Frédéric Vichot compare les descendeurs aux skieurs et aux motards. A la différence de ces derniers, toutefois, les cyclistes n'ont pas la puissance pour se relancer à la sortie d'un virage. "Comme au ski, on dit souvent être 'au-dessus' ou 'au-dessous' de la trajectoire idéale. On doit aborder le point de corde légèrement après, en coupant le virage un peu plus bas, afin de conserver une certaine marge de sécurité et aborder sereinement le virage suivant." Et par sécurité, dans le virage, on évitera d’être à la limite absolue de l'adhérence.
4Restez concentré, même dans un secteur familier
"Même quand on connaît une descente par cœur, il peut toujours y avoir quelque chose de différent au moment de la course : un écoulement d'eau, des gravillons, du goudron fondu, une voiture arrêtée, une moto... On doit s'attendre à tout." Une descente ne doit jamais être prise à la légère. "La concentration doit être maximale pour être capable de réagir au centième de seconde, car les freinages sont retardés au maximum."
5Pas besoin de jouer le casse-cou pour être efficace
Certains coureurs, comme Peter Sagan, ont médusé les observateurs par leurs capacités à prendre des risques en descente. "Oui, mais lui ce n'est pas un descendeur, c'est un acrobate !" sourit Frédéric Vichot. "Vous savez, quand j'étais en compétition, je n'ai jamais eu l'impression de prendre de risques. Le but, c'est quand même d'arriver entier en bas. La peur est un indicateur. Si on commence à douter, c'est que quelque chose ne va pas. Il faut être sûr de soi et de son matériel. Un descendeur qui tombe n'est pas un descendeur."
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