Berbizier, l'homme qui a plaqué Chabal
On parle beaucoup du caractère volcanique du rugbyman barbu le plus célèbre de France pour expliquer son éviction du Racing Métro. Mais son ex-entraîneur est un volcan rarement en sommeil. Portrait.
Sébastien Chabal ne fait plus partie de l'effectif du Racing Métro depuis jeudi 3 février et un communiqué envoyé à 23 h par le club francilien. "Caveman" ("l'homme des cavernes"), doux surnom affublé par la presse néo-zélandaise, ne rentrait plus dans les plans de son entraîneur, Pierre Berbizier. Celui-ci le trouvait peu performant depuis le début de la saison. L'icône a pris de l'âge, les blessures ont suivi les baisses de régime, et le temps passé par l'international sur le terrain devenait famélique : 6 titularisations en Top 14 sur 16 possibles.
D'après le magazine spécialisé Midi Olympique, une des raisons de ce renvoi soudain serait que Chabal ait critiqué les méthodes de son entraîneur, affirmant que de nombreux joueurs sont en désaccord avec les méthodes du coach. Une information qui n'est pas nouvelle. Certains joueurs cadres de l'équipe avaient fait fuiter l'info dans la presse, en décembre. Depuis, on évoque un exode des stars du Racing Métro, comme Nallet, Steyn ou Hernandez en fin de saison.
Chabal, lui, a expliqué en conférence de presse que "la communication ne passait plus avec Pierre Berbizier." Il n'est pas le premier. Pierre Berbizier cultive une longue tradition de ruptures avec divers acteurs du monde du rugby.
• Dur avec ses joueurs
La communication, ça n'est pas toujours le point fort de Berbizier. Un joueur du Racing Metro expliquait, dans Le Figaro en décembre : "A certains d'entre nous, il a même dit qu'il ne leur adresserait plus la parole, que leurs relations se réduiraient à un bonjour et à un au revoir. Quand tu entends ça de la part de ton coach, tu es en droit de te poser des questions."
Autre difficulté pour Berbizier : adapter son projet de jeu à son équipe. En 1995, échouant en demi-finale de la Coupe du monde en tant que sélectionneur du XV de France, il s'était coupé d'une partie de ses joueurs. "Il y a trop d’écart entre son discours et ce que peuvent réaliser certains joueurs", regrettait alors l'ex-entraîneur de Toulon, Daniel Herrero, cité par l'excellent blog Ruck'n'Maul. Pierre Berbizier est un entraîneur très ambitieux pour ses équipes. Trop ?
• Impitoyable avec les dirigeants du rugby français
Après avoir été exclu de l'équipe de France en 1991 (en tant que joueur), en raison d'un contexte politique détestable au sommet de la Fédération française de rugby, Pierre Berbizier avait réussi le tour de force de revenir deux mois plus tard, en tant que sélectionneur. L'aventure s'est mal terminée. Berbizier a réglé ses comptes une fois remercié, en 1995. Il qualifie le président de la fédération, Bernard Lapasset, de "danseur de tango" avec qui c'était "un pas en avant, trois pas en arrière". "Tout a été fait pour que cette équipe ne gagne pas", lâche aussi Berbizier, regrettant qu'on n'ait pas suivi son plan pour la préparation au Mondial.
Pierre Berbizier s'est aussi mis à dos le président de la Ligue nationale de rugby, Pierre-Yves Revol, qualifié de "faux cul", ainsi que le président de Clermont, Jean-Marc Lhermet, accusé d'intimider les arbitres. Ça fait du monde.
• Intraitable avec les arbitres
Bien avant Mourad Boudjellal (qui s'est plaint le mois dernier de "sodomie arbitrale"), Pierre Berbizier a déjà attaqué frontalement un arbitre, Christophe Berdos. En deux temps, d'abord en mai 2010, puis en septembre. "Je ne le respecterai plus jamais", déclare Berbizier, après une défaite contre Clermont. Ce qui lui a valu quatre matchs de suspension.
• Glacial avec tout le monde
On le dit "rigide" (selon Emile N'Tamack, ancien entraîneur adjoint des Bleus), "parano" (selon Pierre-Yves Revol, dirigeant du rugby français) et rarement souriant, comme l'explique ce supporter sur un forum de passionnés du ballon ovale, déniché par France Soir : "Berbizier, il n’a pas souri depuis la demi-finale de 1995".
Droit dans ses bottes, apôtre d'un certain style de jeu où le combat est bien présent, sûr de son bon droit... Bon sang mais c'est bien sûr, c'est une sorte de Raymond Domenech du rugby ! Dans une de ses dernières interviews, Berbizier avait utilisé l'expression "l'odeur du sang", immortalisée par l'ex-sélectionneur des Bleus.
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