Coupe du monde : le Brésil peut-il gagner sans Neymar ?

Une seule crête vous manque, et tout est dépeuplé. Le Brésil a perdu son meilleur joueur, Neymar, vendredi 4 juillet, lors du quart de finale de la Coupe du monde contre la Colombie. Le numéro 10 de la Seleçao, idole dans son pays, a eu une vertèbre fracturée après une charge très violente de Juan Zuniga, et a dû déclarer forfait pour le reste du Mondial.

Le Brésil, poussif dans le jeu depuis le début de la compétition, pourra-t-il gagner sans son joueur vedette ? Francetv info pèse le pour et le contre.

Non, il était le seul à pouvoir changer le cours d'un match

Avec quatre buts inscrits et une passe décisive délivrée en cinq matchs disputés, Neymar était le joueur le plus dangereux de la Seleçao. Il était en outre l'Auriverde qui tirait le plus au but et se créait le plus grand nombre d'occasions, selon les statistiques relevées par la chaîne américaine ESPN. Des performances d'autant plus remarquables que le joueur de 22 ans n'évolue pas en pointe de l'attaque, poste où enchaîner les buts est plus habituel.

Neymar is out for the rest of the #WorldCup with a with fractured vertebra. Here's what he's meant to #BRA pic.twitter.com/SqUQML11sb

— ESPN Stats & Info (@ESPNStatsInfo) July 5, 2014

Mais l'importance de Neymar sur la sélection brésilienne ne se mesurait pas uniquement d'un point de vue quantitatif. Avec ses dribbles incessants et sa technique insolente, celui qui évolue aux côtés de Messi au FC Barcelone incarnait une certaine tradition du "joga bonito" à la brésilienne que le reste de son équipe semble avoir abandonné au profit d'un jeu physique et rugueux, loin d'être flamboyant. Difficile pour ce Brésil-là de faire basculer un match sans les coups de folie de son enfant prodige.

19.2 - Le Brésil a commis 19.2 fautes par match, la moyenne la plus élevée de la Coupe du Monde 2014. Rugueux. pic.twitter.com/WvtElqKsuI

— OptaJean (@OptaJean) July 7, 2014

Non, car les supporters n'y croient plus

La réaction des supporters au forfait de Neymar est un autre signe que cette absence porte un coup terrible à la sélection brésilienne. Les images de l'AFP montrent que des dizaines de fans inquiets, certains en larmes, se sont spontanément regroupés devant l'hôpital de Fortaleza, où la star a été admise après le choc. Et que dire de cette vidéo, où chaque bambin paraît plus inconsolable que le précédent au moment d'évoquer la blessure de l'attaquant ?

Si Zuniga, l'auteur de la faute sur Neymar, a sans surprise été l'objet d'une déferlante d'insultes sur les réseaux sociaux, certains fans ont carrément franchi la ligne jaune en le menaçant de mort. Le tweet qui suit explique qu'à la différence d'Andrés Escobar, joueur colombien assassiné en 1994 après avoir marqué contre son camp lors du Mondial américain, Juan Zuniga n'aura pas besoin de rentrer au pays pour être tué. Ambiance.

Qual a diferença entre Zúñiga e Escobar? O Escobar morreu depois de chegar na Colômbia.

— #ETCnaCopa (@epictimechat) July 4, 2014

Oui, le Brésil ne serait pas la première équipe privée de superstar à réussir

Lui aussi privé de demi-finale après avoir reçu deux cartons jaunes en quatre matchs, le capitaine brésilien, Thiago Silva, a indiqué, après le match contre la Colombie, que son équipe était "déterminée à remporter la Coupe du monde pour Neymar". "Pour nous, cette épreuve pourrait être le point de départ d'une révolution. Nous savons qu'il attend beaucoup de ce groupe. Cela peut nous fédérer, et nous donner encore plus de détermination pour gagner", a-t-il ajouté, cité par la version britannique d'Eurosport. 

Des propos fruits d'une communication policée, mais qui ne sont pas sans fondement. En 1962, la Seleçao avait réussi à emporter sa deuxième Coupe du monde consécutive sans Pelé, qui avait dû déclarer forfait dès le deuxième match de la compétition. Ses coéquipiers avaient là aussi promis de remporter le tournoi pour leur prodige, alors âgé de 21 ans.

Plus récemment, le bon parcours des Colombiens, privés de leur crack Falcao, a prouvé que l'absence de superstar pouvait libérer certains joueurs. Reste à savoir si David Luiz, défenseur auriverde, auteur d'un superbe but en quart de finale, pourra être à la Seleçao ce que James Rodriguez a été pour les Tricolor en l'absence de Falcao.

Oui, la Seleçao a une bonne étoile pendant ce Mondial

S'il n'a que rarement été flamboyant dans le jeu, le Brésil a souvent bénéficié, lors de cette compétition, de coups de pouce du corps arbitral. Lors du match d'ouverture contre la Croatie, le Japonais Yuichi Nishimura a ainsi non seulement accordé un penalty aux locaux sur une simulation grossière de l'attaquant Fred, mais a également refusé un but aux Croates pour un léger contact avec le gardien brésilien. Très remonté, le sélectionneur de la Croatie avait déclaré, après la rencontre, qu'avec un arbitrage pareil, "autant jouer au basket".

Des scènes similaires se sont répétées par la suite. Lors du deuxième match des "jaunes et verts", contre le Mexique, Thiago Silva obtient un carton jaune plus qu'indulgent après un tacle assassin sur l'attaquant Javier Hernandez. De quoi faire naître des soupçons de favoritisme envers les joueurs du pays organisateur de la compétition. 

Avant le huitième de finale Brésil-Chili, le Chilien Alexis Sanchez a ainsi déclaré craindre un arbitrage en défaveur de son équipe. Ses propos ont été qualifiés de "primaires et d'immatures" par la Fédération brésilienne. Mais là encore, la Seleçao a réussi à terminer son match à 11 après une faute grossière du milieu Luiz Gustavo.

En attendant de savoir si la chance continuera à sourire aux coéquipiers de David Luiz, le milieu de terrain allemand Bastian Schweinsteiger a tenu à mettre la pression sur l'arbitre avant la demi-finale : "Les Brésiliens ne sont pas seulement des magiciens du football, ils savent aussi tacler très durement. Nous devons nous y préparer, et l'arbitre aussi", a-t-il lancé, cité par la BBC (en anglais). Un avertissement peut-être pas superflu, puisque la rencontre sera arbitrée par le Mexicain Marco Rodriguez, qui s'est fait remarquer en loupant le coup de dents de l'Uruguayen Luis Suarez sur l'Italien Giorgio Chiellini.