À la 60e Biennale de Venise, fragilités de la planète et résilience se dessinent en filigrane

La Biennale internationale d'art contemporain vient d'ouvrir ses portes à Venise et la thématique de notre rapport à la nature affleure dans plusieurs installations.
Article rédigé par franceinfo Culture avec AFP
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Adriano Pedrosa, premier commissaire brésilien à prendre les rênes de la Biennale de Venise. (GABRIEL BOUYS / AFP)

Des banquises du Groenland à la déforestation en Amazonie, la fragilité de la planète et le rapport de l'homme avec la nature se dessinent en filigrane à la 60e Biennale internationale d'art contemporain de Venise. La manifestation, qui a ouvert ses portes samedi 20 avril 2024, sera visible jusqu'à la fin novembre.

La créativité humaine porteuse d'espoir

L'artiste japonaise Yuko Mohri s'intéresse aux tentatives de "bricolage" pour limiter les fuites d'eau dans les stations de métro de Tokyo, provoquées par les multiples inondations et séismes qui frappent la mégapole.

À travers des objets de fortune – bouteilles en plastique, seaux et tuyaux – disposés pour recueillir, en vain, les gouttes d'eau, elle rend hommage à l'inventivité des hommes face aux défis qui s'imposent à la planète.

L'installation de Yuko Mohri dans le pavillon japonais à la 60e Biennale de Venise (Italie), le 17 avril 2024. (MIRCO TONIOLO / AGF / SIPA)

Reliés à des fruits en décomposition, des câbles électrodes contrôlent un mécanisme sonore en jouant sur le degré d'humidité, sollicitant tous les sens du visiteur.

"Il s'agit de montrer comment la créativité humaine peut apporter des espoirs et des solutions quand beaucoup de choses sont critiques dans nos vies", explique Sook-Kyung Lee, commissaire de l'exposition. Pour souligner l'universalité de la menace climatique, l'artiste a récupéré ses matériaux sur les marchés aux puces de Venise, elle aussi concernée par les inondations.

Menaces sur les traditions inuites au Groenland

Le pavillon du Danemark met à l'honneur le travail du photographe Inuuteq Storch à travers six séries, dont Soon Will Summer Be Over documente les effets du changement climatique, de la colonisation et des traditions inuites de chasse et de pêche dans l'extrême nord du Groenland.

On y retrouve des scènes méconnues de la vie quotidienne d'où émane un sentiment diffus de nostalgie, dans ce territoire reculé où le soleil ne se couche jamais en été.

Une série de photos de Inuuteq Storch, le 18 avril 2024, dans le pavillon du Danemark à la 60e Biennale de Venise (Italie). (GABRIEL BOUYS / AFP)

Les photographies en couleur et en noir et blanc, qui mêlent terre, ciel et banquise, ramènent le visiteur au cycle des saisons et à la vulnérabilité des pôles.

"Le réchauffement climatique est sous-jacent", explique à l'AFP Louise Wolthers, curatrice et historienne de l'art. "Ainsi par exemple, dans cette série de Qaanaaq, il nous dit que les chasseurs ne peuvent plus pratiquer les méthodes de chasse traditionnelles à cause du changement climatique, de la fonte des glaces et, plus encore, des conditions météorologiques extrêmes", explique-t-elle.

Déforestation au Brésil

À l'entrée du pavillon brésilien, les visiteurs découvrent une imposante motte de terre : sur ses flancs, des racines de manioc et des tubercules. À ses pieds, des coulées de graines évoquant la vie sous différentes formes – les veines humaines, la sève des arbres et les fleuves brésiliens vus du ciel.

L'installation "Foreigners Everywhere" dans le pavillon brésilien à la 60e Biennale de Venise (Italie), le 16 avril 2024. (MATTEO CHINELLATO / IPA / SIPA)

Posée au sommet, une vieille télévision montre une femme prenant à partie le spectateur sur les ravages de la déforestation. "Vous n'avez pas appris de vos erreurs et la forêt continue d'être abattue au service d'hommes sans scrupules", lance-t-elle.

À travers cette installation, l'artiste et militante indigène Olinda Tupinambá a voulu interroger "l'équilibre entre les êtres humains" et leur relation avec la planète afin de "réfléchir de manière globale au problème environnemental", explique-t-elle à l'AFP.

Les violences infligées aux animaux

"Le cœur d'une girafe en captivité pèse 12 kg de moins" : tel est le titre du projet collaboratif de la République tchèque, qui revient sur le destin funeste de Lenka, capturée au Kenya en 1954 pour être transportée au zoo de Prague, où elle ne survécut que deux ans.

Avec cette installation, l'artiste thèque Eva Kotátková a voulu recréer les entrailles et le squelette défragmenté de la girafe pour interpeller le public sur le rapport de l'homme avec son environnement et les violences infligées aux animaux.

"Le cœur d'une girafe en captivité pèse 12 kg de moins" d'Eva Kotatkova et Hana Janeckova, dans le pavillon tchèque à la Biennale de Venise (Italie), le 17 avril 2024. (OTTAVIA DA RE / SINTESI / SIPA)

Une manière aussi de s'interroger pour repartir en se demandant : "Quel est mon rôle dans cette histoire ?", dit-elle à l'AFP.

Le projet résonne aussi avec le thème central de cette édition, Stranieri ovunque-Foreigners Everywhere (Étrangers partout), à laquelle quelque 90 pays sont représentés.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.