A Venise, le palais oublié de Sissi construit par Napoléon rouvre ses portes aux visiteurs
Après vingt-deux ans de restauration, et près d'un siècle passé aux oubliettes de l'Histoire, le Palais royal de Venise, construit sur ordre de Napoléon et habité par l’impératrice Sissi, rouvre ses portes au public, le 14 juillet.
En fermant les yeux, on pourrait presque encore sentir son parfum ou entendre le froufrou de ses robes : le palais vénitien de Sissi, fantasque impératrice d'Autriche, rouvrira enfin ses portes au public le 14 juillet après des décennies d'oubli.
Situés entre la place Saint-Marc et l'embouchure du Grand Canal, donc au coeur de la Sérénissime, ces superbes appartements comptent pas moins de vingt-sept pièces ayant nécessité vingt-deux ans de travaux. "Il fallait faire sortir cinq administrations parce que ces pièces avaient été transformées en bureaux à la fin de la monarchie (...) Cela n'a pas été très simple", explique Jérôme Zieseniss, président du Comité français pour la sauvegarde de Venise, l'organisme qui a intégralement financé les sept millions d'euros de travaux grâce aux dons de généreux mécènes.
Quelques semaines avant l'ouverture au public, des artisans de haut vol sont encore à pied d'oeuvre pour mettre la dernière touche aux aménagements, comme Andrea Dal Mas, tapissier de son état et occupé à ajuster le drapé d'un lit à baldaquin.
Les appartements de Sissi
Des hauts plafonds de la salle de bal à l'intimité du minuscule boudoir d'Élisabeth d'Autriche, également reine de Hongrie, de Bohême et de Lombardie-Vénétie, le visiteur plonge dans une atmosphère d'un autre siècle et découvre le cadre de vie de celle qui tomba sous les coups d'un anarchiste italien en 1898 à Genève, à seulement 60 ans. Le boudoir, particulièrement touchant avec "une frise représentant ses fleurs préférées qui étaient les muguets et les bleuets (...) a été entièrement fait pour elle", raconte à l'AFP Jérôme Zieseniss.
"C'est elle qui a vécu le plus longtemps dans ce palais" : outre des visites ponctuelles, "elle a passé sept mois de suite ici", précise-t-il à propos de celle qui fut immortalisée au cinéma par Romy Schneider et Ava Gardner. "Elle recevait peu, elle se faisait envoyer des photos de jeunes femmes de toute l'Europe pour se comparer avec elles et voir si elle était encore belle".
Debout devant un portrait de l'impératrice, Andrea Bellieni, directeur du Musée Correr et à ce titre administrateur du palais, révèle que "Sissi, à la personnalité complexe et introvertie, n'aimait pas la vie publique et aimait, apparemment, sortir de nuit en gondole". Quand on lui demande si Sissi reconnaîtrait aujourd'hui "son" palais, Jérôme Zieseniss répond avec ironie : "Connaissant l'esprit vagabond de la princesse, reste à savoir si elle serait restée ou si elle aurait encore changé de résidence".
"Le Louvre de Venise"
Après ses années de travail acharné, Jérôme Zieseniss, ici comme chez lui, a choisi de raconter les péripéties du lieu dans un livre, Le Palais royal de Venise - Le joyau caché de Venise, préfacé par l'ancien président-directeur du Louvre Pierre Rosenberg. Fourmillant d'anecdotes, il relate avec gourmandise l'entrelacs des liens familiaux entre les occupants successifs de ces lieux d'exception.
Dans la chambre de Sissi, il montre du doigt le lit de repos d'Eugène de Beauharnais, "qui était le beau-fils de Napoléon, vice-roi d'Italie et prince de Venise". "Eugène était marié à Auguste-Amélie de Bavière, qui était la propre tante de Sissi. Donc les dynasties se sont succédé, mais en fait pratiquement c'est toujours la même famille qui reste", note Jérôme Zieseniss avec un sourire.
Sur le plan pratique, les salles enfin restaurées du Palais royal sont accessibles avec le billet d'accès au Musée Correr, un complexe muséal surnommé par certains "le Louvre de Venise". Une appellation volontiers acceptée par son directeur car "cet édifice concentre des siècles d'histoire et abrite depuis 1922 le musée de la ville, qui raconte la grande histoire de la Sérénissime".
Si l'impératrice d'Autriche est son hôte la plus connue, le palais doit sa naissance à l'empereur français Napoléon 1er, devenu roi d'Italie en 1805, même s'il n'y mit lui-même jamais les pieds. Une statue le figurant en empereur romain est néanmoins exposée dans le palais pour rappeler son rôle.
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