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Cabu, Wolinski, Charb et Tignous : quatre immenses signatures de la presse assassinées

Cabu, Wolinski, Charb et Tignous : ce sont des figures incontournables de la presse satirique qui ont été assassinées. Ils ont accompagné, pendant 50 ans pour les plus âgés d'entre eux, les évolutions de la société française, apportant une lecture critique et un œil souvent amusé sur les événements. Un travail journalistique et culturel salutaire, indispensable à l'exercice de la démocratie.
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Les dessinateurs Cabu, Wolinski, Charb et Tignous, tués le 7 janvier 2014 à Paris
 (SIPA)

Cabu

Jean Cabut, dit Cabu, allait avoir 76 ans. Né à Châlons en Champagne, dans la Marne, il étudie à l'Ecole Estienne à Paris. Après des débuts durant la guerre d'Algérie (où il est mobilisé), il commence dans la presse satirique dès le début des années 1960 : ce sera d'abord Hara Kiri (créé par François Cavanna et le professeur Choron), où il rencontre déjà ceux qui seront ses compagnons de route : Gébé, Fred, Wolinski, Reiser...
Cabu dans son bureau à Charlie Hebdo montrant un dessin pouvant figurer à la Une du journal satirique.
 (MIGUEL MEDINA / AFP)
Puis vient le magazine Pilote à partir de 1962 où Cabu invente Le Grand Duduche, son personnage fétiche, un lycéen en grand partie autobiographique et en 1970 Charlie Hebdo qui sera, avec le Canard Enchaîné, son organe de référence jusqu'à la fin, même si on compte également de nombreuses collaborations à d'autres journaux et à la télévision.

Parmi les livres de Cabu, signalons avant tout la série "Le Grand Duduche" et celle liée au "Beauf", l'autre personnage important créé par le dessinateur. Mais aussi : "Dessins cruels", "Peut-on encore rire de tout ?", "Adieu Tonton", "Les abrutis sont parmi nous", "Inspecteur la bavure".

Wolinski

Autre "monument" de la presse satirique : Georges Wolinski, dessinateur de presse, auteur de bande dessinée, intellectuel. Il avait 80 ans. Issue d'une famille venue de Tunisie, il débute dans le dessin dès 1960 dans l'équipe de Hara Kiri, puis à la revue Action où il se fait connaître lors des événements de 1968 par un humour grinçant. A partir de cette date il commence une collaboration au Journal du Dimanche avant de prendre la rédaction en chef de Charlie Hebdo (qui succède à Hara Kiri) de 1970 à 1981.
  (Drugstore)
Dans l'Humanité, où il collabore par la suite, Wolinski offre des dessins moins militants qu'à ses débuts, mais développe un style de grande simplicité, plus caustique et nuancé qui seront l'une de ses marques de fabrique. Enfin, Wolinski deviendra également l'une  des signatures de l'hebdomadaire Paris Match le consacrant parmi les noms incontournables de la presse. Son œuvre compte de nombreux livres parmi lesquels : "Ils ne pensent qu'à ça", "Elles ne pensent qu'à ça", "Vive la France", "Les femmes sont des hommes comme les autres", "Les cocos", la série "Paulette", "J'étais un sale phallocrate".

Reportage: Nicole Bappel, Arlette de Luthern
Charb

Né en 1967 à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), Stéphane Charbonnier, dit Charb, "avait appris à dessiner pendant les cours de maths et bon an, mal an finit par être un peu moins nul en dessin qu'en maths", selon son éditeur Casterman. Son irrévérence, il la manifeste dès les jeunes années : "Il avait 18 ans et il était déjà génial et féroce à la fois", raconte Jean-François Guyot, aujourd'hui journaliste à l'AFP, qui a connu Charb à la fin des années 80 aux "Nouvelles du Val-d'Oise". 

En 1991, Charb participe au lancement de "La Grosse Bertha", hebdomadaire satirique créé pour dénoncer la guerre du Golfe. Charb quittera le journal un an plus tard, avec le gros de l'équipe, pour participer au lancement de Charlie Hebdo dans lequel il publiait encore aujourd'hui l'essentiel de ses dessins.

Au cours des vingt dernières années, on avait aussi pu voir ses dessins dans l'Humanité, Libération, le Monde Libertaire, Télérama, Mon Quotidien, l'Hebdo, le Monde des Ados, Fluide Glacial ou l'Echo des Savanes. Charb est l'inventeur des personnages de "Maurice et Patapon", un chien et un chat anticapitalistes, à l'humour sarcastique irrévérencieux.
Charb en décembre 2012...
 (FRED DUFOUR / AFP)
Auteur de la rubrique Charb n'aime pas les gens, dans Charlie Hebdo, il devient directeur de la publication du journal après le départ de Philippe Val, en 2009. Il est l'auteur de : "Les fatwas de Charb", "Je suis très tolérant" et "Maurice et Patapon".

Tignous

Bernard Verlhac, alias Tignous, né en 1957 était un caricaturiste et un auteur de BD, caustique et engagé. Depuis 1980 il traquait la folie du monde avec un humour percutant et un peu désespéré. Après des débuts dans l’illustration et la bande dessinée, il publie en 1990 ses premiers dessins d’actualité dans L’idiot international et rejoint ensuite la rédaction de La Grosse Bertha. "Un dessin de presse, c'est super dur à réussir parce qu'il faut tout mettre dans une seule image. C'est tout le contraire de la BD", disait-il. Durant toute sa carrière, Tignous a beaucoup dessiné pour L’événement du Jeudi, Charlie Hebdo, Marianne, Fluide Glacial, l’Express, VSD, Télérama et L'Humanité. 
  (Editions Denoël)

Après son livre "On s'énerve pour un rien" en 1991, il taclait le capitalisme, les actionnaires et les inégalités sociales en 1999 dans "Tas de riches" et "Tas de pauvres" (Denoël) et fera paraître en 2010 "Le fric, c'est capital"... Passionné par l'actualité, il retrace le procès Colonna dans un album en  2008 puis sort sa BD "Pandas dans la brume" en 2010 (Glénat), où il donne la parole à ces charmantes petites bêtes pacifistes et menacées d'extinction.

Son dernier livre, "Cinq ans sous Sarkozy", publié en 2011 chez l'éditeur 12 Bis, compilait ses dessins de presse. Une manière de se remémorer avec humour les hauts faits et affaires du quinquennat de Nicolas Sarkozy, à travers l'oeil d'un des plus fervents détracteurs de l'ex-président de la République.

Le dernier dessin d'Honoré posté sur son compte Twitter
Après le décès des quatre caricaturistes, un cinquième, Honoré, 73 ans, a perdu la vie suite à ses blessures.

En hommage aux victimes de Charlie Hebdo, l'équipe "Des Mots de Minuit" vous propose de revoir l'interview de Georges Wolinski dans la version TV de l'émission, ainsi que celle, plus récente, de l'économiste Bernard Maris (également tué par les terroristes) en septembre dernier, dans "Des Mots de Minuit, une suite"

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