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Charlie Hebdo : la presse en deuil se revêt de noir

"Barbarie", "Guerre contre la liberté", "Chantage répugnant". Le choc ressenti après le sanglant attentat contre Charlie Hebdo transparaît jeudi à la une des journaux en France et en Europe, dont certains se sont couverts de noir. Dans la presse française, des fonds noirs et des dessins rendent hommage aux 12 morts, tués dans l'attentat.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Les unes de la presse française en deuil après l'attentat contre Charlie Hebdo
 (DAMIEN MEYER / AFP)

"Nous sommes tous Charlie", titre le quotidien Libération (gauche). La mention, brandie par de nombreux manifestants lors de rassemblements mercredi soir, se retrouve très souvent en manchette des quotidiens.

"La liberté assassinée", clame de son côté Le Figaro qui publie les photos de six des victimes: les dessinateurs Cabu, Charb, Honoré, Tignous, Wolinski et le chroniqueur Bernard Maris. Dans un éditorial intitulé "La guerre", le directeur du journal annonce "une vraie guerre, menée non par des assassins de l'ombre mais par des tueurs
méthodiques et organisés, dont la tranquille sauvagerie glace le sang".

Le quotidien Les Echos appelle à faire "Face à la barbarie" et publie le dernier dessin de Charb. L'éditorial s'en prend à "des salauds cagoulés (qui) ont déclaré la guerre à la France, à notre démocratie, à nos valeurs". "Barbarie", sur fond noir est le titre également choisi par le journal gratuit 20 Minutes.

L'ultime dessin étrangement prémonitoire de Charb paru dans le dernier numéro de Charlie Hebdo avant son assassinat
 (Charb/Charlie Hebdo)
En Europe
En Belgique, le journal économique L'Echo titre "Tous des Charlie" sur fond noir, au centre de sa une, qui reproduit 17 unes de Charlie Hebdo. Son jumeau néerlandophone De Tijd, plus sobre, présente une première page presque entièrement noire avec les mots "Je suis Charlie", en français.

Toute la une du quotidien néerlandophone De Morgen est occupée par un dessin représentant en rouge sur fond blanc un terroriste brandissant une Kalachnikov et qui s'exclame "Ils sont armés !" face à un personnage hors champ armé d'un simple crayon. L'éditorialiste de La Libre Belgique, Francis Van de Woestyne, estime que "cette attaque est, dans son impact, sa violence, aussi importante que celle qui a frappé New York le 11 septembre 2001".

La une du quotidien belge Le Soir, toute de noir, est ornée d'un dessin du caricaturiste Pierre Kroll avec pour légende "Morts de rire".
Le dessin de une du quotidien belge Le Soir signé Pierre Kroll
 (Pierre Kroll - Le Soir)
Dans la presse britannique, le Daily Mail et le Daily Telegraph titrent tous deux en une "La guerre contre la liberté", avec une photo de l'attentat montrant deux agresseurs pointant leurs armes contre un policier gisant sur le sol. Dans la même veine, le Times titre en une "Attaque contre la liberté" et le Guardian "Assaut contre la démocratie".

Le Guardian relève dans son éditorial que les journalistes de Charlie Hebdo, qui se sont toujours moqués du christianisme, "n'ont jamais vu de raison particulière de montrer plus de déférence vis-à-vis d'autres religions".
Les unes de la presse européenne après l'attentat contre Charlie Hebdo
 (KAY NIETFELD / DPA / dpa Picture-Alliance)
"L'attaque contre les journalistes de Charlie Hebdo cible le coeur de la démocratie - la liberté de la presse", écrit sur son site internet le quotidien conservateur allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ), estimant que, dans la lutte contre le terrorisme, "il ne faut pas reculer". "Oui, d'une certaine façon, c'est un combat de civilisations", affirme encore le journal, qui appelle toutefois à "garder la tête froide".

 "Je suis (ich bin) Charlie !", clame sur son site internet le Tageszeitung (gauche). "L'Europe n'a pas peur", titre de son côté l'édition en ligne du grand hebdomadaire portugais Expresso, soulignant que des milliers d'Européens sont descendus dans la rue "pour la liberté d'expression, contre la barbarie du terrorisme".

"Il ne faut pas céder au chantage répugnant de la terreur. Et transformer leur haine en défaite", écrit le journal de référence Publico dans un éditorial intitulé "Combattre la haine, défendre la liberté".

En Espagne, un éditorial publié sur le site internet de la radio Cadena Ser énonce que "les caricatures ne sont coupables de rien" et affirme que "la solution n'est pas de mutiler les libertés, mais de combattre le fanatisme, la haine irrationnelle, l'obscurantisme et l'ignorance".
Crayons déposés en hommage aux caricaturistes assassinés lors de l'attentat contre Charlie Hebdo, Pariser Platz à Berlin
 (KAY NIETFELD / DPA / dpa Picture-Alliance)
Le journal danois Berlingske affiche en une un dessin représentant une feuille de papier blanche sur laquelle "Charlie Hebdo" est écrit en noir, entouré des impacts de 12 balles, en référence aux 12 morts. En-dessous, un texte affirme que "la démocratie et la liberté d'expression ne doivent pas et ne devraient pas être étouffées". 

Sous le titre "attaque à la liberté de tous", le grand quotidien italien Corriere della Sera évoque "les ennemis de Charlie Hebdo et de notre liberté". "Les responsables de l'attentat qui ont commis un massacre au siège de l'hebdomadaire n'en supportaient pas la liberté et son refus de se plier à toute autorité", écrit l'éditorialiste du journal.

La Repubblica, l'autre grand quotidien italien, dénonce dans un éditorial "le terrorisme islamiste" qui s'est attaqué à "un autre symbole de la démocratie: un journal", tandis que le quotidien romain Il Messaggero évoque en une un "massacre islamique contre la liberté".

Le journal internet Gazeta.pl, du groupe du premier quotidien polonais Gazeta Wyborcza (centre gauche), publie 13 "couvertures les plus frappantes de Charlie Hebdo" - dont plusieurs visant le pape, avec ce commentaire: "Ils n'épargnaient personne, rien n'était sacré pour eux." 

L'organisation de défense de la liberté de la presse basée en France, Reporters sans frontières, avait lancé dans un communiqué mercredi "un appel
international à tous les directeurs de médias pour qu'ils publient dès demain (jeudi) les dessins du magazine endeuillé". 

"La liberté de l'information ne saurait s'effacer face à la barbarie et céder au chantage de ceux qui pourfendent notre démocratie et nos valeurs républicaines", ajoute le communiqué de RSF.

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