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Damien Hirst de retour avec une fiction sous-marine spectaculaire à Venise
L'enfant terrible de l'art contemporain est de retour. Le Britannique Damien Hirst est l'hôte de la Fondation Pinault, à Venise, pour une exposition monumentale. Dans deux lieux, le Palazzo Grassi et La Punta della Dogana, il entraîne le spectateur dans une fiction sous-marine qui cultive une ambiguité ...abyssale.
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Une fausse pêche miraculeuse
Le secret avait été jalousement gardé sur ce projet ambitieux auquel Damien Hirst, 51 ans, à consacré dix années et qui rassemble - à partir de dimanche 9 avril et jusqu'au 3 décembre - près de 200 oeuvres inédites dans les deux écrins de la Fondation Pinault que sont le Palazzo Grassi et La Punta della Dogana.
Baptisé "Treasures from the Wreck of the Unbelievable" ("Trésors de l'épave de l'Incroyable"), il conte la légende de "l'Incroyable", un vaisseau qui sombra il y a des siècles au large des côtes d'Afrique, emportant avec lui sa cargaison inestimable.
Dans les cales du navire, des sphynx venus d'Egypte, des statues grecques, des colosses de bronze, de l'or, des bijoux et des armes à profusion.
Ce trésor englouti, Damien Hirst fait mine de l'avoir retrouvé au fond de l'océan Indien. Il l'aurait ensuite extrait des profondeurs au cours d'une prétendue campagne de fouilles sous-marines dont les vidéos sont projetées au fil de l'exposition.
A Venise, le plasticien expose le fruit de cette pêche miraculeuse dont les pièces sont encore recouvertes d'algues durcies, de coraux ou de coquillages, autant d'empreintes que la mer a déposées au fil des siècles.
Antique ou moderne ? Hirst cultive l'ambiguïté
Mais le visiteur s'interroge... Ce démon de 18 mètres de haut (sans conteste l'oeuvre la plus spectaculaire) qui accueille le visiteur dans l'atrium de Palazzo Grazzi est-il bien en résine peinte, comme l'indique le
catalogue ?
Et cette collection de bijoux: est-elle vraiment en aluminium thermolaqué et polyester, tout comme ces torses "antiques" ou ce Cerbère ?
On reste perplexe devant cette statue gréco-romaine à tête de mouche inspirée du poème épique d'Ovide, "Les Métamorphoses". De même qu'on est troublé par ces déesses ou monstres marins qui mêlent le style classique à l'esthétique des super-héros ou des mangas. Sans parler des bustes de Mickey recouverts de coraux multicolores, qui déconcertent.
"Le visiteur ne sait pas si les oeuvres qu'il voit sont restées deux mille ans au fond de l'eau ou si elles sont le résultat du travail de l'artiste. On est dans l'ambiguïté qui laisse la place au rêve", explique Martin Bethenod, directeur des Palazzo Grassi et Punta della Dogana. "Il y a différents niveaux d'interprétation qui se superposent et qui font la richesse et la complexité du projet", analyse-t-il.
Un tournant pour cet artiste obsédé par la mort
Artiste de la finitude, Damien Hirst semble opérer avec ce travail un tournant dans sa carrière qui l'avait amené depuis les années 1980 à explorer les rapports entre l'art et la mort.
Il est connu pour son emblématique requin plongé dans du formol (1991), ou son célèbre "Mother and Child Divided" ("Mère et enfant séparés", 1993): une vache et son veau découpés dans le sens de la longueur et placés dans quatre vitrines.
"La mort, la décomposition sont depuis toujours au coeur de l'oeuvre de Damien Hirst mais elles sont ici traitées à contre-courant, comme si les oeuvres étaient ressuscitées", explique Martin Bethenod. "De même qu'en recréant des coraux en bronze, il reproduit l'action du temps qui n'est plus l'oeuvre de la nature mais celle de la main de l'homme", souligne-t-il.
Quatre mois ont été nécessaires pour acheminer jusqu'à la Sérénissime les 200 oeuvres, dont certaines ont été produites en plusieurs exemplaires. Quant à leur valeur marchande, elle reste un mystère même si des informations de presse, citant de potentiels acquéreurs, ont évoqué des prix allant de 500.000 à 5 millions de dollars, selon les pièces.
Un des artistes vivants les plus cotés
Aurant admiré que décrié, Damien Hirst est un des artistes vivants les plus cotés de la planète. En 2008, il avait organisé lui-même une vaste vente aux enchères de ses oeuvres chez Sotheby's, court-circuitant le travail de ses propres galeristes. La vente de 223 pièces lui avait rapporté 137 millions d'euros. Quant à sa fortune personnelle, elle avait été estimée en 2012 par le Sunday Times à 433 millions d'euros.
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