Œuvres d'art, boîtes mystère et "émotions personnelles"... Comment expliquer le succès des figurines artistiques Pop Mart ?

En une dizaine d'années, l'entreprise chinoise s’est imposée comme un leader mondial des "art toys", qu'elle vend en édition limitée. Mais qu'est-ce qui séduit autant les acheteurs ? Rencontre avec Wang Ning, le fondateur de la marque.
Article rédigé par Laetitia de Germon
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Wang Ning, le fondateur de POP MART, et la boutique située dans le quartier des Halles, à Paris (© POP MART)

Plus que collector, une vraie addiction pour ces figurines. Et pour cause : l'achat se fait à l’aveugle. La particularité des POP MART est précisément que, lorsque vous choisissez une boîte, vous ne savez pas quelle figurine se trouve à l’intérieur... Pourtant, à l’origine, l’entreprise chinoise, créée en 2010, était centrée uniquement sur l’univers pop culture.

Mais, en 2015, la société remarque que les "art toys", aussi connu sous les noms de "designer toys", "urban vinyl" ou "vinyl toys", sont en tête des ventes. Elle décide alors de "cesser de vendre d’autres produits pour se concentrer uniquement" sur ceux-là, explique Wang Ning, le fondateur de la marque.

Un concept innovant et addictif

En 2016, la première série Molly Zodiac est lancée. Ces 12 figurines, ainsi qu'une 13e "mystère", reprenant les signes du zodiaque n’est disponible qu’en précommande : "Tout a été vendu en quelques secondes", sourit l'homme d'affaires. Fort de ce succès, POP MART décide alors de "réorienter (sa) stratégie commerciale autour de personnages originaux et de pousser davantage le concept de 'blind box' (boîte mystère). En 2019, près de 10 millions de figurines Molly ont été vendues."

Chaque série comporte un personnage rare. La probabilité de le remporter est inscrite sur les boîtes, comme par exemple "1/44". Pour tenter de savoir quelle figurine se trouve à l’intérieur, les clients ont tous leurs techniques : secouer la boîte, estimer son poids… C’est cela qui motive les fans : le plaisir de la découverte et la joie de pouvoir compléter leur collection, assure l'entreprise, qui mise sur "un système solide de développement et d’exploitation de personnages originaux", explique son fondateur Wang Ning. Pour cela, elle s’entoure de nombreux artistes, tels que Kenny Wong, le premier collaborateur et créateur de Molly, ou Kasing Lung, le créateur de Lababu.

Des designs originaux, des collaborations internationales et prestigieuses

Afin d’avoir des figurines de qualité, POP MART ne choisit au hasard pas les artistes avec qui elle collabore : "Le principal critère est la capacité à générer un produit, un concept de haute qualité et de manière régulière. Le second est l’originalité des différentes collections que nous présentons", précise Wang Ning, qui vise grand. "Notre prochain objectif est de trouver des artistes locaux dans différents pays et de les aider à incuber leurs propres personnages originaux. À titre d’exemple, nous avons Cry Baby, créée par une artiste thaïlandaise et Peach Riot, créée par une artiste américaine.” Toutes les deux ont obtenu "d’excellents résultats dans leurs pays", se réjouit le patron de 37, qui pointe au rang 1764 des personnalités les plus riches du monde, selon le classement Forbes.

Disney, Universal Sudios, Naruto, Les Minions, Hello Kitty, Spy x Family... POP MART a également établi de "solides relations" avec ces licences et grands groupes. "Nous sommes en partenariat et non en concurrence. Nous utilisons ces personnages pour toucher de nouveaux marchés", assure Wang Ning. En plus du mystère autour de l'achat, le groupe propose également des prix limités : les figurines sont disponibles dans différents formats et prix, de 15 euros (qui représente 85% des ventes) à plus de 220 euros, voire plus pour les collectors. La marque est présente dans plus de 30 pays et compte des centaines de boutiques et des milliers de distributeurs automatiques. La France accueille trois boutiques, uniquement situées à Paris.

Figurines issues des partenariats noués notamment avec Disney et Universal Studios (© POP MART)

"Préserver et chérir l’âme d’enfant"

L’une des particularités de certaines de ces figurines est... leur manque d'expression. En ce qui concerne Molly, c’est un choix de son créateur : "Comme il n’y a pas d’expression claire sur le visage, les consommateurs peuvent considérer Molly comme un avatar de leur propre esprit. Quand ils sont contents, ils peuvent penser qu’elle est heureuse et quand ils sont tristes qu’elle l’est aussi. C’est une logique propre à Kenny Wong", décrypte le fondateur de la société.

L'occasion de préciser l'esprit même de l'entreprise, qui cherche à "préserver et chérir l’âme d’enfant de toutes et tous" : Wang Ning estime que "les valeurs émotionnelles comme la curiosité, la satisfaction, la guérison, le plaisir, valent la peine d’être conservées et défendues." C’est pourquoi lorsque "les artistes créent des 'art toys', ils intègrent leurs émotions personnelles." De cette manière, lorsqu’un client achète une figurine, il peut "ressentir la nature spirituelle du produit et une résonance émotionnelle", selon lui.

Certaines collections sont porteuses de messages. C’est notamment le cas de Skullpanda the Warthm, figurine au visage poupon apaisé. Son message est "celui de s’accepter, de s’ouvrir et de ressentir la présence chaleureuse des personnes qui nous entourent", assure ainsi la marque.

Une communauté de "30 millions de membres"

En moins d'une dizaine d'années, le groupe a donc créé une véritable communauté d'amateurs : on compte "environ 30 millions de membres" à travers le monde, âgés "de 15 à 40 ans", qui se retrouvent sur les réseaux sociaux pour partager leurs achats et discuter de leur passion. "On peut dire que POP MART est la nouvelle monnaie sociale des jeunes", s’amuse Wang Ning.

Tous ont des raisons différentes d’acheter ces figurines. Pour certains, ce sont des œuvres d’art, pour d’autres, c’est un moyen de se plonger dans un univers. Parmi les plus grands succès de Pop Mart, il y a Molly, Dimoo, Skullpanda et Hirono. Le personnage phare du moment est par exemple Labubu, notamment en raison d’un effet de mode lancé par Lisa, du groupe de K-pop, Blackpink.

Personnages des séries Labubu, Skullpanda et Molly (© POP MART)

Dans les années à venir, Wang Ning entend "standardiser les œuvres d’art de niche pour en faire des produits de consommation universels et ainsi trouver un équilibre parfait entre le commerce et l’art." Pour cela, l’entreprise "explore les œuvres d’artistes et les aide à définir des tendances et à produire en masse, pour les transformer en produits destinés à des consommateurs de niche spécialisés dans les 'art toys', mais aussi à destination de tous les publics."

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