Fondation Louis Vuitton : l'œuvre poétique de Frank Gehry ouvre au public
On avait vu l'extérieur. L'intérieur de la Fondation est aussi un grand choc esthétique et sensitif.
C'est avec émotion que Frank Gehry, qui a fait le voyage des États-Unis, livre son bâtiment au public. Et on est aussi ému quand on l'entend en parler. Lors de la présentation à la presse vendredi, avant l'inauguration lundi par le président François Hollande, il dit son amour de la France et se dit particulièrement heureux que la France l'aime. Il dit comme il est difficile d'expliquer pourquoi et comment il est arrivé à ce résultat.
Une œuvre qui se veut inachevée, ouverte à des interventions multiples
"Mon idée était de faire un édifice qui ne soit pas statique. Il n'a pas l'air fini, et c'est délibéré. Je pense que ça invite à interagir avec." L'architecte raconte que Daniel Buren lui a déjà proposé de peindre les bandes de verre du bâtiment en couleur. "Je lui ai dit qu'il n'en était pas question pour la première exposition, mais nous le ferons. C'est le genre de chose que je souhaite. Ça deviendra alors un bâtiment de Daniel Buren, pas de Frank Gehry. J'espère que des enfants feront des dessins qu'on agrandira et qu'on pourra y suspendre."
Reportage : D. Wolfromm, H. Pozzo, A. Janot, V. Castel
Frank Gehry conçoit son œuvre, située en bordure du Jardin d'acclimatation, comme un bâtiment inachevé, "ouvert au changement". Il précise que l'espace entre l'enveloppe de verre et ce qu'on appelle l'iceberg (le corps du bâtiment) est un espace vivant qui peut changer. En résumé, il dit qu'il est "grand ouvert".
Une exposition sur la réalisation du projet de Frank Gehry
Le vaisseau de Frank Gehry est destiné à exposer de l'art, et trois présentations inaugurales sont prévues (la seconde en décembre et la troisième en mars), la première étant plus particulièrement consacrée à la construction du bâtiment.
La réalisation de la Fondation, qui a duré des années, est un exploit technique, grâce à la numérisation du projet. Une exposition lui est entièrement consacrée : dans une grande salle toute noire, on peut voir les maquettes successives qui ont ponctué le projet : l'assemblage des boîtes qui constituent l'"iceberg", le cœur du bâtiment, des voiles en verre comme les douze qui l'enveloppent, suspendues au plafond, un grand modèle de l'intérieur du bâtiment. Le commissaire de l'exposition, Frédéric Migayrou, qui a également conçu la rétrospective du Centre Pompidou consacrée à Frank Gehry, explique que cette œuvre est une interprétation du site, en dialogue avec Paris, car l'architecte est aussi un urbaniste.
Des œuvres créées spécialement pour la Fondation
Pour restituer l'impression d'une architecture "en perpétuel mouvement", on verra des images animées tourner dans les airs, autour du bâtiment, à partir de drones et d'hélicoptère, un point de vue impossible autrement.
Pour l'inauguration, l'accrochage est minimal, les premières semaines ayant pour vocation de faire découvrir l'œuvre de Frank Gehry, où les points de vue sont multiples. On est accueilli dans le grand hall lumineux par une rose géante de l'artiste allemande Isa Genzken, dressée près de l'entrée, qu'on pourra revoir, du niveau supérieur, à travers une vitre qui plonge dessus.
Des œuvres ont été conçues spécialement pour la Fondation, comme les peintures monochromes d'Ellsworth Kelly accrochées dans l'auditorium, grand espace ouvert sur le bassin, qui peut accueillir entre 400 et 1000 personnes.
Une cascade en extérieur
En bas, un cours d'eau traverse le bâtiment, longé par une œuvre monumentale de l'artiste islando-danois Olafur Eliasson, alternant des panneaux jaunes et des miroirs et menant à un espace extérieur où la musique d'une large et douce "cascade" berce le visiteur.
Les "galeries" d'exposition (3500 m2 au total) qui abritent les œuvres (pour le premier accrochage, une grande salle dédiée à Gerhard Richter, d'autres à Bertrand Lavier, Pierre Huygues, Christian Boltanski…) sont réparties sur trois niveaux. De grands espaces rectangles côtoient d'autres, plus petits et plus particuliers, comme cette salle à cinq côtés coiffée d'un haut puits de lumière, où on peut voir d'autres peintures d'Ellsworth Kelly.
Une grande liberté de circulation
Les différents niveaux communiquent avec des terrasses entourant l'"iceberg", elles-mêmes reliées par des escaliers, l'ensemble donnant une impression de grande liberté de circulation. On est constamment aspiré vers l'extérieur, où on a la sensation magique d'être suspendu au-dessus de la verdure. Souvent abrité par les grandes voiles de verre, on voit à travers comme dans un rêve estompé les jardins, le bois, la banlieue sud-ouest au loin, les tours de la Défense, la Tour Eiffel. Parfois, la voile s'ouvre, une trouée offrant un paysage plus net, ou bien on se retrouve en plein vent.
Frank Gehry conçoit sa création comme un instrument de musique. À Suzanne Pagé, la directrice artistique de la Fondation, il dit qu'il a fait un violon, et qu'il faut qu'elle apprenne à en jouer, en toute liberté. A suivre donc. Fondation Louis Vuitton, 8 avenue du Mahatma Gandhi, 75016 Paris (métro Sablons)
Week-end inaugural gratuit (sur réservation) : vendredi 24 (10h-18h), samedi 25 (10h-2h du matin), dimanche 26 (10h-23h)
Ouverture le 27 octobre (horaires et jours d'ouverture différents selon les périodes)
Tarifs 14€ / 10€ / 5€
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