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"Gabrielle Chanel", "Man Ray", "Pierres Précieuses" : les expos de mode cartonnent en France à l'heure de la crise sanitaire

"On a arrêté de considérer la mode comme quelque chose de futile et d'éphémère. Elle s'inscrit dans une évolution artistique et n'est pas si éphémère que cela, on voit le retour des formes, des styles", explique Esclarmonde Monteil, directrice du Musée des tissus à Lyon.

Article rédigé par franceinfo Culture avec AFP
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 5min
Exposition "Gabrielle Chanel. Manifeste de mode" au Palais Galliera ; le mythique tailleur en tweed présenté dans la galerie courbe, un des nouveaux espaces d'exposition ouvert en sous-sol (PIERRE ANTOINE)

Première rétrospective Gabrielle Chanel, exploration de la facette méconnue de Man Ray photographe pour les couturiers, histoire des pierres précieuses, face à face entre les sculpteurs de la mode Alaïa et Balenciaga... en pleine pandémie, les Français se délectent de mode dans les musées.

"Il y a une appétence pour les valeurs culturelles (...) et les expos de mode sont très accessibles", explique l'historien de la mode Olivier Saillard. Depuis fin septembre il présente le deuxième volet de l'exposition Alaïa et Balenciaga. Sculpteurs de la forme faisant dialoguer les créations d'Azzedine Alaïa et Christobal Balenciaga. Comme plusieurs autres, cette exposition à la fondation Alaïa à Paris a été inaugurée autour de la Fashion Week parisienne, désormais en grande partie virtuelle.

Deuxième volet de l'exposition Alaïa et Balenciaga. Sculpteurs de la forme à Paris, en septembre 2020 (CORINNE JEAMMET)

Deux semaines d'attente

Les restrictions liées à la Covid-19 se sont encore durcies depuis, mais il y a deux semaines d'attente avant de réserver en ligne pour l'exposition Chanel au Palais Galliera qui après des travaux d’extension démarrés à l'automne 2018 a rouvert ses portes.

"Nous avons une relation très intime avec la mode, on s'exprime à travers nos vêtements. Dans les expositions de mode, on a une expression visuelle qui n'intimide pas les gens, ils se sentent à l'aise, libres de donner leur opinion", souligne Miren Arzalluz, directrice du palais Galliera. De la marinière en jersey de 1916 au tailleur des années 60 en passant par la petite robe noire, le parfum N°5 et des bijoux opulents : les visiteurs masqués découvrent en vrai "le style Chanel" dont tout le monde a entendu parler.

Au Musée des tissus à Lyon, l'affluence est moindre pour l'exposition consacrée à la Britannique subversive Vivienne Westwood, inaugurée en pleine épidémie, que pour la précédente sur la collaboration d'Yves Saint Laurent avec les soyeux lyonnais qui avait accueilli 80 000 visiteurs avant la crise sanitaire. "Les gens sortent moins, on n'a pas de touristes", explique Esclarmonde Monteil, directrice du musée. Mais vu le contexte, les chiffres ne sont toutefois pas si mauvais avec 350-500 visiteurs par jour pour Westwood contre 700-800 pour Saint Laurent.

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Avec ces deux expositions, la mode est entrée dans le plus grand musée des tissus au monde, rénové et modernisé.

"Emerveiller pour instruire"

"La mode n'existe pas toute seule, on sent les échos entre la mode, les arts décoratifs, c'est intéressant pour nous, cela fait découvrir d'autres disciplines aux visiteurs qui viennent pour la mode", souligne Esclarmonde Monteil.

Le Muséum d'histoire naturelle à Paris "émerveille pour instruire" dans l'univers des pierres précieuses qui marie géologie et créations joaillières de la Maison Van Cleef & Arpels. "Les pierres précieuses sont des éléments inertes qui arrivent à capturer la beauté éphémère et fragile de la nature. Elles jouent avec la lumière et donnent une impression de vie", avance Nicolas Bos, président de Van Cleef & Arpels.

Exposition "Pierres Précieuses" à la Grande galerie de l'évolution à Paris : calligraphie royale. Plaque polie d’onyx décrite par Roger Caillois (L’écriture des pierres, 1970). Brésil  (MNHN / F. Farges)

Le musée du Luxembourg à Paris tente aussi le pari de la mode en présentant l'artiste américain Man Ray sous un angle méconnu de photographe de mode, montrant comment son esthétique avant-gardiste a pu se diffuser avec des clichés initialement pris pour la publicité d'un mascara. Avant cela, "ici on n'a jamais eu la mode dans le titre d'une exposition", souligne Alain Sayag, commissaire scientifique de l'exposition Man Ray et la mode. "C'est un choix délibéré, on fait entrer la mode par le biais d'un artiste connu" dans un musée habitué aux "expositions patrimoniales et de peinture".

Man Ray "Bal au château des Noailles" vers 1929 (Man Ray 2015 Trust / Adagp, Paris 2020)

Déclin des magazines

Selon Esclarmonde Monteil, depuis 10-15 ans "on a arrêté de considérer la mode comme quelque chose de futile et d'éphémère. Elle s'inscrit dans une évolution artistique et n'est pas si éphémère que cela, on voit le retour des formes, des styles". Une veste cintrée Westwood à manches "assiettes" s'expose à côté du pourpoint de Charles de Blois du XIVe siècle, un chef-d'oeuvre du musée lyonnais, coupé de la même façon.

Pour Olivier Saillard, le succès des expositions de mode est aussi lié "au déclin des magazines et de la mode à la télévision". "Le succès de l'exposition Dior avec 700 000 entrées en 2018 au musée des Arts décoratifs à Paris" n'a pas d'équivalent en terme de lectorat d'un magazine de mode, dit-il.

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