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Gustav Klimt et la Sécession viennoise à la Pinacothèque
Autour de Gustav Klimt, une de ses principales figures, la Pinacothèque de Paris présente la Sécession viennoise, courant autrichien de l'Art nouveau qui s'est développé au tournant du XXe siècle en réaction à l'art académique avec l'objectif de créer un art total. Au cœur de l'exposition, une copie de sa "Frise Beethoven" et une de ses peintures les plus célèbres, "Judith".
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La Pinacothèque a réuni 180 œuvres prêtées par des collections privées et par le musée du Belvédère de Vienne, qui conserve la plus grande collection d'art autrichien et notamment le plus grand fonds d'œuvres de Gustav Klimt (1862-1918).
Cette exposition a pour objectif de montrer que, pour la Sécession, "tous les arts étaient sur un même pied d'égalité, peinture, sculpture, architecture, dessin, photo", explique Alfred Weidinger, commissaire de l'exposition et conservateur au Belvédère. "Car traditionnellement, à Vienne, c'est la peinture qui occupait le premier rang. Après, il y avait un gouffre, puis venait la sculpture. La photographie, elle, n'avait aucune importance", rappelle-t-il.
Tous les arts sur le même plan
Gustav Klimt et ses amis ont créé en 1897 l'Union des artistes ou Sécession "pour montrer tous les arts sur le même plan". Ils voulaient aussi prendre en compte la dimension internationale de l'art, et, d'ailleurs, "le première exposition de la Sécession était consacrée au symbolisme belge", raconte Alfred Weidinger.
Après une brève introduction présentant l'art impérial autrichien ou le contexte artistique dans lequel est née la Sécession, on découvre les premières œuvres de Gustav Klimt, encore assez académiques. Ce fils d'orfèvre qui a étudié à l'Ecole des arts et métiers de Vienne ouvre en 1880 avec son frère Ernst et son ami Franz Matsch un atelier de décors de théâtre et de peinture murale. Ils travaillent pour les nombreux palais qui se construisent dans la capitale autrichienne.
Une salle de l'exposition témoigne de l'influence à cette époque de Paris et notamment des impressionnistes. De nombreux artistes viennois y séjournent et peignent ses maisons, les Tuileries, la Tour Eiffel, les cafés.
Une copie de la "Frise Beethoven" exposée
La première exposition de la Sécession où on devait exposer des artistes autrichiens, prévue en 1901, a lieu finalement en 1902. Elle est dédiée à Beethoven et c'est là que Gustav Klimt présente sa "Frise Beethoven", une de ses œuvres majeures. L'original orne le Pavillon de la Sécession à Vienne, manifeste architectural du mouvement et lieu d'exposition.
"Pour la première fois, l'organisation de l'exposition est confiée à un architecte (Josef Hoffman) et on parle alors d''architecte de l'exposition'", raconte Alfred Weidinger. "L'idée est de montrer l'art dans sa globalité."
Longue de 22 mètres, la "Frise Beethoven" représente des images évoquées à Klimt par son expérience de la musique, elle exprime son émotion à l'écoute de la "Neuvième symphonie". Sous des figures allongées qui flottent dans les airs, des scènes représentant les tourments humains, où il intègre des feuilles d'or et divers matériaux. Une copie de la frise est présentée à la Pinacothèque, courant au centre de l'exposition.
Klimt, peintre des femmes
"Qu'est-ce qui distingue Gustav Klimt ? Il montre l'homme, la femme, tels qu'ils sont. Chez les préraphaélites, le nu était idéalisé. Klimt, lui, le présente comme dans un miroir. Dans 'Nuda veritas', qui malheureusement n'est pas ici, on voit sur la peau du modèle les marques laissées par la lingerie", raconte le commissaire de l'exposition.
"Dans la Vienne de 1900, le sujet qui domine la démarche artistique, c'est la femme", souligne-t-il. Et Klimt, qui a toujours vécu avec sa mère et ses sœurs, "observait les femmes dans leur intimité. Il a peint des femmes enceintes, ce qui a fait scandale".
Des figures féminines, qui intègrent une nouvelle dimension érotique, sont regroupées en différents thèmes, femme fragile, femme fatale, avec l'adolescente d'Elena Luksch Makowska, des nus de Kokoschka et la "Judith" (1901) de Klimt, une des pièces centrales de l'exposition. La figure biblique de Judith tenant la tête coupée d'Holopherne est représentée nue dans un décor luxuriant et doré.
La photographie au côté de la peinture
Un artisanat d'art de haute qualité, élément important de la Sécession viennoise, est représenté avec des meubles, de somptueuses broches de Josef Hoffman et Wiener Werkstätte, des céramiques de Michael Polowny.
La photographie dans tout son aspect pictural, est présente aussi, avec de magnifiques tirages de Heinrich Kühn, une "Etude de nu" rivalisant avec une "Sensualité", nu peint par Franz von Stuck.
Il n'y a pas véritablement d'unité stylistique de la Sécession viennoise, c'est plutôt un état d'esprit. Il s'agit de promouvoir "les arts contre les colporteurs qui se font passer pour des artistes et qui on intérêt commercial à ne pas laisser l'art s'épanouir", écrit le critique littéraire viennois Hermann Bahr (1863-1934).
Koloman Moser et Oskar Kokoschka : vers l'expressionnisme
Une section consacrée aux peintures de paysages qui, pour les artistes de la Sécession, sont le reflet des sentiments. Un délicat "Verger le soir" de Klimt, au ciel rose et à la verdure tout en douceur, côtoie des pins ou une montagne de Koloman Moser saisissants dans leur modernité quasi abstraite. De la même façon, les portraits doivent traduire la psychologie du modèle.
A la veille de la première guerre mondiale, des artistes comme Koloman Moser ou Oskar Kokoschka se détourneront du style décoratif qui est une des caractéristiques de l'œuvre de Klimt, pour donner naissance à une approche plus expressive, plus tumultueuse.
Au temps de Klimt, la Sécession à Vienne, Pinacothèque de Paris, 28 place de la Madeleine et 8 rue Vignon, 75008 Paris
Tous les jours 10h30-18h30
Nocturnes mercredi et vendredi jusqu'à 20h30
Le 1er mai : 14h-18h30
Tarifs : 14€ / 11,50€
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