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L'envol ou le rêve de voler, dernière exposition à La maison rouge

L'homme a toujours eu envie de voler. C'est autour de ce rêve que La maison rouge de la fondation Antoine de Galbert nous offre cette dernière exposition avant la fermeture du lieu. Une promenade réjouissante parmi 200 œuvres d'art moderne, contemporain, brut, ethnographique : des photographies, des peintures, des sculptures, des installations, des vidéos… (jusqu'au 28 octobre 2018).
Article rédigé par Valérie Oddos
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
L'envol, dernière exposition de La maison rouge (au plafond, "Letatlin", de Vladimir Tatline, 1929-1932, Reconstitution de Jürgen Steger, collection de l'aéroport de Francfort)
 (photo Marc Domage)

Au milieu de la campagne, de dos, un jeune homme bat des bras (des ailes serait-on tenté de dire). Il s'élance d'une (toute) petite butte et retombe sur ses pieds, inexorablement soumis à la loi de la pesanteur. Dans sa vidéo "Tentativo di volo" (1969), Gino de Dominicis refait inlassablement le même "exercice", en admettant qu'il n'arrivera sans doute jamais à voler.
 
A côté, le Japonais Shimabuku, lui, a trouvé le moyen de s'élever dans les airs : il a créé un cerf-volant à son image ("Flying Me", vidéo de 2006).

L'exposition "Envol" à La maison rouge, le "Vélo-hélicoptère" (1978) de Gustav Mesmer (Fondation Gustav Mesmer, Allemagne
 (photo Marc Domage)

Sportifs dans les airs

C'est du rêve de voler que parle la dernière exposition de La maison rouge. Un vieux rêve inaccessible que les artistes nous font vivre d'un nombre de façons infinies.
 
En saisissant en vol des sportifs en plein saut ou en plein plongeon, comme l'artiste russe Alexandre Rodtchenko, fondateur du constructivisme russe dans les années 1920. Ou en fabriquant des machines volantes extraordinaires comme le Belge Panamarenko et l'Allemand Gustav Mesmer (1903-1994) qui a imaginé un "Vélo-hélicoptère" et des chaussures à ressorts pour mieux retomber au sol.
 
L'exposition "L'envol ou le rêve de voler" s'ouvre sur la projection en grand d'un extrait de "La Dolce vita" de Federico Fellini, où un hélicoptère transporte une statue de Jésus au-dessus de Rome.
Agnès Geoffray, "Suspendue", 2016
 (Agnès Geoffray, Courtesy de l'artiste)

Danse, lévitation, extase

L'exposition rassemble des œuvres d'art moderne et contemporain, des œuvres ethnographiques, masques et autres objets rituels liés aux oiseaux rassemblés dans une grande vitrine. De l'art brut comme ces grands dessins de Henry Darger, peuplés d'enfants, dont des papillons aux corps d'enfants.
 
Elle propose des sculptures, par exemple une aile en plâtre et un danseur en terre de Rodin. Des photos, de personnages en lévitation, en extase, essayant de voler.
 
Lucien Pelen fait de grands tirages noir et blanc où il plane horizontalement, tenant une chaise, dans des paysages différents. Agnès Geoffray fait flotter ses personnages en l'air, ou bien elle découpe en images fixes un film de 1912 où un homme fait un saut (mortel) du premier étage de la Tour Eiffel pour tester un costume-parachute de sa fabrication et se tue.
Urs Lüthi, "Selfportrait", 1976
 (Urs Lüthi, Pro Litteris. Courtesy collection particulière)

Des ailes

Il y a aussi des vidéos comme celles, poétiques, du Suisse Roman Signer, où une petite camionnette est renversée pour devenir une fusée, où deux parapluies scotchés entre eux par le manche tentent de s'envoler un vain dans le vent, où une nuée de mini-hélicoptères se cognent au plafond et retombent au sol, comme des insectes.
 
Qui n'a pas rêvé d'avoir des ailes ? Rebecca Horn se drape dans un "Eventail blanc" et invente un moulin de plumes ("La petite sirène", 1990). Sur quatre photos, Mario Terzic, vêtu en aviateur, lève au ciel de grandes ailes au squelette de bois qui sont exposées juste à côté ("My Wings", 1970).
A La maison rouge, "Luna" (1968) de Fabio Mauri (Courtesy Centro Pecci, Prato, Italie)
 (photo Marc Domage)

Sur la lune, un sable étrange

"Ne demande pas la lune", nous dira-t-on ? Eh bien si, c'est sur la Lune qu'on est embarqués avec Fabio Mauri ("Luna", 1968), qui nous invite à fouler pieds nus un sol étrange de minuscules billes de polystyrène, dans une pièce obscure, où on a l'impression de marcher dans un sable d'un autre genre, plus léger.
 
A côté, une capsule spatiale en bois de Stéphane Thidet émet des sons étranges, tandis que le Cubain Chucho, convaincu d'avoir été enlevé plusieurs fois par des extraterrestres, raconte son expérience sur des feuillets manuscrits.
Henry Darger, "Youg Rebonna Dorthereans Blengins - Catherine Isles, Female, One Whip-Lash-Trail", 1920-30
 (Kiyoko Lerner, Adagp, 2018. Courtesy Musée d’art moderne de la Ville de Paris)

"Il arrive parfois que miracle se passe"

L'exposition se veut une promenade visuelle à travers 200 œuvres de 130 artistes qui nous attirent dans d'autres dimensions, spatiales, sensorielles, spirituelles. "Bien sûr, nous ne parviendrons jamais à nous envoler, mais il en va de notre survie d'en nourrir le rêve, incessamment. Car il arrive parfois que miracle se passe… à moins que La maison rouge n'ait été qu'un mirage", écrit Antoine de Galbert, le fondateur de La maison rouge qui clôt une aventure de 14 ans, après 131 expositions.
 
"En créant La Maison rouge, je savais que l'aventure finirait un jour", déclarait Antoine de Galbert au Monde en janvier 2017. "Il me semble préférable qu'elle finisse alors qu'elle est au plus haut de la vague", ajoutait-il.

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